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Val


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#1 Easter1916

Easter1916

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Posté 28 septembre 2008 - 10:01

Max se leva et ouvrit les rideaux pour donner à la lumière lunaire l’opportunité d’éclairer la chambre. Elle s’était endormie, un timide sourire sur les lèvres. Lui, il n’arrivait pas à trouver le sommeil. Comme sa peau laiteuse était belle dans cet éclairage ténu ! Il devinait chaque courbe de son corps. Ce qu’il préférait, c’était le méandre que formait sa hanche quand elle lui tournait le dos. Sa main redessinait toutes ses formes : l’épaule large, le bras mince et long, le galbe de sa fesse qui pouvait tenir dans une seule de ses paumes, sa jambe interminable. Il colla son corps contre le sien. Il avait encore envie d’elle, une envie animale. Sa respiration se fit plus courte. Il la voulait mais savait que c’était égoïste. Une légère transpiration recouvrait tout son corps. Il se leva à nouveau, alla prendre un verre d’eau et se recoucha près d’elle. Ses cheveux étaient en bataille et il aurait aimé se perdre dans ses yeux couleur d’absinthe. Il crevait de désir : croquer ses lèvres à les faire saigner, caresser ses seins pour sentir durcir ses têtons et entendre son soupir répondre à son appel. La parcourir du bout des doigts, lentement, et s’enfoncer au plus profond de ses secrets. Ecarter les portes de son antre humide et la pénétrer enfin, longuement, jusqu’à en avoir le souffle coupé. Danser en elle et l’écouter gémir et supplier. Bâillonner sa bouche un instant pour offrir la main à ses dents de jeune louve et puis se laisser assaillir par l’animal qu’il avait réveillé. Pourtant il ne bougea pas. Epuisé, la fatigue l’emporta et il sombra dans un sommeil agité. C’était ainsi presque toutes les nuits depuis qu’il vivait avec elle. Max savait pertinemment pourquoi il ne trouvait pas le repos à peine couché. Il avait au ventre la peur de la perdre. Elle était son seul trésor. Des femmes, il en avait connues, possédées le temps d’une nuit. Il ne partageait jamais deux fois la même couche avec la même fille. Il n’avait aucune envie de renouveler une triste expérience. Il n’était qu’une ombre de passage ; pas la peine qu’on se souvienne de lui. Surtout qu’on l’oublie, vite, comme s’il n’existait pas. Leurs prénoms dansaient parfois dans sa tête et leur visage aussi. Il se souvenait de tout. Il y avait eu cette brune, un vrai délice. Elle avait si bien su s’y prendre qu’ils avaient passé trois jours et trois nuits, ensemble dans une chambre sordide d’un motel tout aussi crade. Ils avaient bu, beaucoup, fumé, trop et franchi toutes les limites de la décence. Il l’avait possédée entièrement. Elle ne s’était privée de rien. Le matin du troisième jour, il avait emballé ses maigres effets et était parti sans bruit. Il laissa la ville derrière lui pour s’en aller plus loin encore. La direction importait peu. Il avait de l’argent, pas trop propre, mais nécessaire. Il jouait souvent pour assurer le lendemain. Quand il monta dans le bus, il sourit : adieu Maria !
Et des comme elle, il y en eut encore beaucoup.
Revenu au pays, dans les premiers mois, il se tint terré au fond de sa propriété, tentant de rétablir ses repères. Ses parents avaient déménagé pour un appartement en ville, plus pratique à leur âge et ne venait plus dans la maison de pierre que certains week-ends. Quand il était réapparu, en toute sagesse, ils n’avaient posé aucune question. On aurait dit qu’il n’était jamais parti. Il entreprit d’entretenir le jardin et de recoiffer les rosiers que sa mère aimait tant. C’est ainsi, un matin qu’il s’affairait dans les parterres, qu’il la vit. Il avait en main un sécateur ; elle le regardait en souriant. Max, lui, s’était pétrifié. Il y avait dans ces yeux-là un aimant auquel il ne parvenait pas à résister. Reprenant peu à peu ses esprits quand elle lui demanda s’il était nouveau dans le coin, il avança vers elle. Il n’avait jamais vu des iris d’un tel vert. Et ses cheveux, noirs, bouclés, si longs, si luisants sous le soleil matinal. Elle portait un jeans trop large de deux tailles et une chemise blanche trois fois trop grande pour elle.
Il ne parvenait pas à lui répondre. Elle éclata de rire et l’invita à essayer son thé au citron. Ce fut elle qui ouvrit la petite barrière qui séparait les deux jardins. Incertain, il franchit la limite. Aujourd’hui, il se rend compte que c’était la frontière du non-retour.
Bonjour je m’appelle Val, hoqueta-t-elle. Il devait être ridicule. Il se racla la gorge et parvint enfin à reprendre une contenance digne. Enchanté, moi c’est Maxence.
Connard, pensa-t-il. Dans quel merdier vas-tu fourrer les pieds ? Le passé ne t’a donc rien appris.
Val, quant Ă  elle, continuait son investigation :

Il y a longtemps que vous êtes ici ? J’ignorais que la maison avait été vendue. Des gens si charmants ces petits vieux.

Ma chère, ces petits vieux comme tu dis, ce sont mes vieux. Et tu as vraiment la curiosité de toutes les femmes.

Son caractère d’ours ressortait tout d’un coup. Ta gueule se dit-il tout bas. Sois poli ! Elle n’a rien fait ni dit de mal. Alors répond-lui gentiment.
Je m’appelle Maxence, bredouilla-t-il. Veuillez m’excuser, il m’arrive d’être un vrai goujat. Je suis le fils des propriétaires. J’étais à l’étranger depuis quelques années. Ce serait plutôt à moi de vous poser toutes ces questions. Vous n’êtes pas d’ici, n’est-ce pas ?


Non, il y a deux ans, j’ai acheté cette petite fermette. J’avais décroché mon master et je n’avais pas envie de travailler en ville. Alors j’ai cherché un emploi à domicile. Mes parents m’ont offert cette bicoque en cadeau de fin d’études. Depuis, j’ai pris plaisir à y vivre et je ne regrette en rien mon choix.

Vous savez ce que vous voulez, dirait-on !

En général oui ; je suis très directe aussi. Et là j’ai envie de vous dire que vous me plaisez. Vous êtes atypique pour la région. Rien que vos cheveux longs pourraient être tout le sujet de discussion d’une fin de semaine.

Maxence éclata d’un rire nerveux. Il détestait les clichés. Horripilé par le comportement libertin de la belle, il adopta la même tactique :

Dites, ce soir, chez moi, 20 heures, ça vous dit. N’apportez rien….enfin votre corps bien sûr sera le bienvenu.

Elle lui répondit par un : ok, à ce soir donc.

C’est ainsi que leur histoire a commencé. Bien évidemment, ils ne firent rien du tout ce soir-là si ce n’est de grignoter et boire une bonne bouteille de Saint-Emilion. Elle lui parla de ses hobbies, de ses rêves de peintre. Il lui dit ses galères, ses conneries et ses expériences aussi. Il lui parla des pays qu’il avait traversés. Il lui nomma des lieux dont elle ignorait l’existence. Le matin se leva. Il racontait son aventure avec un serpent en Australie quand il s’aperçût qu’elle dormait. Il se tut, ferma les yeux et sourit. Il sentit un pincement étrange dans sa poitrine. Il eut soudain l’impression d’être très vieux et prisonnier d’un sortilège inconnu. Enfin, il s’endormit.

Depuis, chaque nuit, il la regarde s’endormir et reste ainsi pendant des heures, comme si en perdant le contact avec la réalité, il allait la perdre elle aussi.

Val, si tu savais comme je t’aime, murmura-t-il