La Retraite Studieuse
Bienvenu et adieu ecrivait le poète.
C'est par ces mots aussi que ma muse imparfaite
Vous dit merci et aurevoir.
Merci d'avoir même très tard le soir
Lu quelques fois mes rimes tardives
Que l'insomnie au sommeil rétive,
Désirait écrire avant de se coucher.
Il est un art difficile d'arriver à toucher
L'esprit du lecteur qui désireux d'un beau vers
Se voit servir un poème qui marche la tête à l'envers.
L'art est long et le talent si rare
Et ma plume distille plus de curare
Que de mots plaisants où la poésie se montre
Dans son plus touchant appareil; la montre,
Qui compte les heures à chacun,
A sonnait pour moi pour que de ce chant importun,
Je cesse enfin d'agacer le monde.
Il faut que je m'en retourne sur l'onde
Pour m'instruire plus profondement
Du chant de la sirène qui monte lentement
Dans les brumes qui reposent sur l'océan
Et distille dans l'oreille les charmes de leur péans.
Il me faut aller prés D'Eleusis
Où resplendissent en honneur à Thémis
Les voix belles et suâves des vestales,
Pour adoucir mon chant qui sonne comme un râle
Qui s'échappe du gosier du soldat mourrant.
Les sages poètes me disent assieds-toi et apprends
Avant de jeter tes vers dans cette fournaise
Où le métal vulgaire fond sous la braise;
Seul le vers que l'on a certi d'or et de jaspe,
Demeure intacte sous la flamme qui happe
Et met en cendre le vers taillé dans le bois.
Sur tes oeuvres mal polis on entrevoit
Que trop les coups de ciseau sur l'écorce,
Que tu travailles avec moins d'art que de force.
Je retourne donc à l'école de la poésie
Pour apprendre de ma plume à tempérer sa frénesie
Et d'un beau vers enfin ouvrager la forme.
J'aurais pour professeur un grand Orme
Au regard toujours encourageant
Aux efforts de ma muse en cet art surnageant.
Orphic