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Sextant Triomphal


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3 réponses ŕ ce sujet

#1 bine

bine

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Posté 25 juillet 2007 - 12:27

1.
Je ne suis plus que ce que j’avais

Ne reste que l’âme impure et consumée par les feux du temps

L’âpre conscience possédée des choses révolues
Le sang damné et le cœur ahuri

Des recollections de souvenirs
Ne jaunissants plus nulle part
Sauf quelquefois
Dans des entrechats incertains des synapses

Fatigués

Tellement las

2.
Comme résonnent
Seules et solitaires
Les peines muettes de la terre
Les vents qui soufflent
Inconsolables
Sur la pierre

Brûlée

3.
LĂ 
L’être en déroute
Replié en sa dernière redoute
Attend sereinement
Et le coup
Et la grâce

Avec la lenteur élégante
D’un métronome arrêté

4.
Un jour s’entend
Le vagissement de mercuriales insensées
Des lunes premières
Communiant nues ardentes
Sourires gris argent
Votives rieuses
Voltigeant
Innocentes et insoucieuses

Entrecoupé de feints cris d’effroi
Amusés stridulements espiègles

5.
Dans l’hyperbole sélénistique
D’un tardif après-midi du soir

Dans ces bras alanguis
Les torpeurs de l’air devenu solide
Les embruns frondeurs et puérils
Ricanements écumeux ou blêmes
Les bruines océanes
Lascives et obliques fantaisies
Furtives dilettantes
Comme une pluie de vigueur
Resplendissant
Tempétueux désir

6.
Lascive parfois
Il y a
L’antique fêlure d’une antique destinée
Déesse spectrale
Allongée luxuriante
Sous les ombres bienveillantes
Ce front aimant soucieux de mauvais sommeil
Ces bras aveugles
Et ce corps transparent
Embrasant souplement cette chair
A la rendre feu follet huant
Eclat dionysiaque
S’éparpillonnant
Flammèches de joie
Irrattrapables dans la nuit

7.
Et après la transe et l’orgie
Elle retombe abrutie
Auprès de ses esclaves vicieuses
Et de leurs siestes tardives
Carthage ivre
Sinistre et vaincue

Violée

Les barbares triomphants

8.
Dehors
Il n’y avait que le vent
Agitant les arbres
Ou les laissant aller
Reposant
Ci et lĂ 
Qui rappelait
Désuètement
Une poésie
Logogriphique et archaĂŻsantesque

9.
Tard au fond des forĂŞts de mensonges
Le feulement souffreteux
D’un rideau empourpré
Arraché
Navire nive époupée
Un orphelin pétrifié
De son si soyeux magistère
César tombant abasourdi
Mystérieusement
Démasqué miracle prétentieux

Sa pitoyable foi inflexible

10.
Alors
Le ciel furibard
S’est enflammé d’étoiles aguicheuses
Et de songes caverneux
Dans l’odeur herbeuse
Du printemps humide
- Etranger ! –
VoilĂ  ton nom
VoilĂ  ton visage

Car tu as pour nom

Multitude

11.
D’autrefois
J’entrevis les sépulcres noirs éparpillés parmi
Les incomptables champs anonymes de la mémoire

Sans honneur

En silence j’ai pleuré longuement accompagné seulement
De fantĂ´mes rabougris et de la brise triste du soir

Encerclé par tous les barbelés de l’esprit

Epuisé

Il fallait bien finir par se rendre

12.
Ce n’est là qu’une vie éphémère et amère
Que l’on se forge
A quitter
Sans regret

Juste une pointe infinie
De tristesse
Et de mélancolie

13.
Je n’ai fini par n’être plus
Que la part obscène
De mon malin génie

Tout autre futurible cauchemar

14.
Il n’y a pas d’histoire
Pas de récit
Qu’une insatiable
Parabole
Insoumise

Portée par le fond des âges

15.
Dans l’obscurité
Incandescente
Sa respiration saccadée et rauque
Craque dans le pli du soir
Les chairs compressées
Se mettent Ă  trembler
Et Ă  voir
Dans tous les ciels
De toutes les latitudes aveugles
De tous les cris du nord
D’éblouissantes
Averses de lucioles
Stellaires

16.
Souvent
J’ai la tentation
De l’invisible
Celle de me taire

J’ai creusé creusé
Des galeries toutes effondrées

Tout au fond
De ces souterrains caverneux
De mon âme
Son antre moisie
Et lĂ 
Entouré dans les tréfonds de la terre creuse
J’ai hurlé des ondes de silence
Et jeté de toutes mes forces des glaives de papier
Vains lancements
Contre les pierreuses inébranlables murailles

17.
La carrure ancienne
D’une carène venue d’outre océan
La cambrure érotique des reins de la terre
Fertile fortune

18.
Il a presque neigé
Dirait-on
Et ta peau
Sous mes lèvres
A le goût du sel

19.
Et puis

Les rivages désolés s’en retournent
Charriant leurs flots débordant de charognes
La page se termine
Et le poète fatigué
S’arrête
De lui-mĂŞme

20.
Dans un rĂŞve inavouable
J’ai cru voir mourir ma race
Et l’arbre lourd qui la porte
Se consumer
Crachant son règne gâché
A l’autan excédé

Soupir !

21.
Ils n’ont déjà plus faim
Ceux qui sont morts
L’âme pleine d’après le festin
Se couche et s’endort

Longue longue sieste crapuleuse de la nuit
Dans le pli du moindre son suspect
L’horizon lumineux de l’est
Bruissant mondainement sa marche lente
Défroissée malgré la bise
Sa respiration leste

C’est là que se résument
Toutes les danses
Les moindres gesticulations
Les plus retranchés soupirs
Les pénultièmes vérités
Des derniers échos sanglotants des corps

Barbe grise
La cendre revient Ă  la cendre
L’œuvre accomplie inachevée
Nichée
Dans le flanc blessé
De la terre

22.
D’abord
Il y eut
La main qui effleure
Caresse
Lit et inscrit soigneusement
Le temps subtil de s’écrire
Les lois immuables
Et cruelles
De la chair
Ses formules
Les vertiges irrésistibles
De ses explorations
Furtives

Sirènes

23.
Dans un grimoire parcheminé
On a découvert discrètement
Des lignes endormies
Des poèmes inactuels
Et orphelins
Enfouis dans le sable fin

24.
Le grain la rugosité le lissé
De la feuille derrière l’arbre épais et tendu
Son odeur enfiévrante de poussières
De dizaines de décades

25.
Des flèches
Des danses
Des ondoiements
Flambuleuses et chamarrées
Narration
Des tout premiers
Commencements
Seins océaniques
Et dedans les millions de périls
De l’inépuisable imagination

26.
Sensuel
Le secret le plus secret
Des mythiques légendes alchimiques
Le code intime
Intimidant de la vie
Son nom expiré
Dans le silence insomniaque
De l’éternité interminée

27.
Le roman inachevé s’achève pourtant
Sur un torchon ridé à peine délivré
Taché
On aperçoit subrepticement griffonnés
Quelques mots
Nébuleux
Illisibles et tremblotants

28.
Ce qui importe
N’est pas ce qu’il s’écrie
Mais ce qui ne s’écrit pas
La rage mystique
Qui fane jusqu’au papier même
Les apocryphes maudits
Les injurieux et les traîtres
Nageant fugitivement
Dans leur sang
Corrompu

Les conjurés
Enfin absous

29.
On recense ça et là des traces
Des vomissures camouflées
Les cicatrices voilées
Recouvertes d’inscriptions brodées
Et énigmatiques inspirées
De continents anciens et de rîtes abolis

L’annonciation

30.
Nos armées sont de fantômes
Nos prêtres plus secs encore que leurs chapelets usés
Par les siècles des siècles

Nos hurlements sont aphones et noirs de silence
Ils ruminent le murmure des slogans insensés
De nos jeunesses irréparables
Un oracle d’été, le ciel décimé
Fin août vieillissant

31.
Dix mille années ne sont pas passées
Que déjà les messagers casqués viennent frapper à nos portes
Annoncer les larmes de béton et les gémissements souffreteux de l’acier
L’atroce et inaudible symphonie du désespoir

32.
Ployer les genoux
Et une fois au sol
Gémir prier et implorer
Remercier et s’accuser
Réclamer la sentence
Et encore l’attendre avec
Envie et impatience

33.
Jamais nos yeux ne sauront regarder
L’horreur à venir
Ni nos molles cervelles imaginer
La terreur annoncée qui s’avance
Reptiliennement

34.
Mon corps est de feu
Et mon âme est de pierre

Sans cap
L’être dérive
Et se perd

35.
Dans le bras de la nuit
Surgit le monde
Du fleuve océan pensif
Comme un épuisant
Ventre volcanique
Et iconoclaste

36.
La voici donc
Cette inexpugnablement tendre tristesse
Cette triste et chagrineuse forteresse
Que protège un infatigable dédale
Fil d’Ariane orchidéal poussé
Des labours des morts
L’art
Et la manière
Des « Notre Père » et des Kaddish
Car il y en a autant que d’hommes

37.
Sans aucune signification
Si ce n’est une chanson douce murmurée
Dans le calme contemplatif
Du cloître de l’âme
Son chœur où résonne l’esprit
Et son cœur

38.
Cette journée perpétuellement rejouée
La recherche éprouvée de l’imperfectible fréquence
L’harmonie et la transmission
L’autre
Se regardant dans le creux de ses yeux

Ce jour
Recommence-le

39.
C’était la dernière tour du destin
Et il avait bien fallu Ă  la fin
Que s’en mêle le Diable
Car c’était son temps
Et il était à la fête

40.
Et quelle belle fĂŞte !
Il y avait lĂ  des homme-troncs et des femmes Ă  barbe
Des mutants des mutilés de guerre et des retournés des enfers
On a bu et on a ri et on a bu encore
- Jusqu’à n’en plus pouvoir être malade –
Puis dans le sang à peine répandu
Et les entrailles encore bouillonnantes
On s’est enfin endormi

Quelle belle fête ce fût !

41.
Nous fĂŞtions digneusement nos fols avant-guerres

Ce si doux ce grivois ce si beau troisième millénaire

Et il nous fallait bien du courage
Pour continuer de sourire malgré l’orage
Tous nos naufrages annoncés

42.
Il n’y eut pas de sacrifice
Trop tard
Cela aurait été vain

Depuis longtemps les Dieux bafoués et vexés
Ne voulaient plus rien de nous
Ils nous avaient oubliés
Trouvant crânement leur joie ailleurs

Il n’y eut ni renoncement ni prière
Depuis longtemps les voix de l’espoir s’étaient tues
Et la raison avait refoulé les mystères

43.
Il fallait bien
Qu’un jour nous payions

Pour ce qu’ils firent
Ce que nous sommes

La mémoire
Celle de l’espèce née du crime
La chair
Le corps blessé
De la charogne terrestre

Macabre planète
Dessous : les morts et la merde

44.
Combien étions-nous ?
Combien auront survécu ?
La guerre perpétuelle
Pendule de la mort
Inexorable
OĂą que nous cherchions Ă  fuir

45.
La folie guette
En embuscade
Dans un bus un cinéma une rue
Anodine
Terreur muette

Nous portons
Au fond de nos âmes embarbelées
Tous les camps
Tous les martyrs
Toutes les passions et les damnations

Quel juge sinon l’œil qui te regarde ?

46.
Les nuages s’amoncellent
L’été encore

Tonnerre !

L’orage s’éclate
Sa rage
Foudroie tout

47.
Juste après
Il n’y eut plus rien
Que des ruines des carcasses des tombeaux
Un ciel noir-marron comme un jouisseur juste pendu
Des volcans des mers des plafonds de nuages de sang
Des continents hostiles
Peuplés de scorpions et de rats
Et des derniers des hommes

Le lendemain
Personne ne pouvait plus dormir

48.
Nous n’étions plus que quelques-uns
Et nous avions déjà oublié
Combien nous avons été
Combien nous sommes
Combien resteront

Encore une fois
Il fallait bien tout recommencer

Pénélope : idiote vie !

49.
Il nous fallait tout rebâtir
Du désert

L’Arche
Carcasse éventrée

Sans plus rien que le rien
Pas même l’humble souvenir
Du plus humble humilié

Que des scorpions et des rats
Les derniers des derniers hommes

50.
VoilĂ 
Il se posait lĂ 
Ce dernier des humains
Insulaire

Seul insubmersible
Au milieu
De la
Multitude

51.
Et il n’y aura personne
Pour voir ce que nous serons devenus
Ce que nous avons été

Que quelques rochers décrochés
Dissous par les acides du temps

Méconnaissable visage
De toutes les répétitions
Archivées classieusement

Dans un lamentable bûcher

52.
Un écrin mortuaire

De cette urne baroque pleine de sable gris
Renversée en un tango gracieux
Dans le sillon incandescent
Fleuriront grassement
Après de rudes et inénarrables épreuves

Les nouveaux émois grasseyants
De la vie

53.
Ceux-lĂ 
Ils ne baisent plus par amour
Ni celui d’eux-mêmes
Ni celui d’un jour

Ils n’aiment plus
Nos belles filles aguicheuses et légères
Frivoles cruelles
Pleines de sève de rire de pleurs salés
Et des entêtantes senteurs des foins coupés et de la rosée sauvage

Eux n’avaient d’yeux
Que pour les catins défraîchies de la foule

Abjects troupeaux de porcs

54.
Mal nés d’un ventre harassé
Nous sommes les enfants bâtards de la
Catastrophe

On nous donnera pour noms
Désolation
Famine
Meurtre
Désespérance

Nous avons aboli toutes les croyances

55.
Nous ne connaîtrons pas la peur
Car elle nous aura engendré

Nous porterons sur nos fronts effarés
Son sceau écarlate
La marque marbrée
Du visage de la trahison

Le rictus débile de la bête humaine
Jouisseuse et repue

A mort !

56.
Ermitique
Il subsiste quelque part
Dit-on
Un vieux singe qui jadis fut sage
Pleurant désormais sans fin
Sa lanterne aujourd’hui éteinte
Fatigué fanal

Il s’est laissé dévorer par les chiens
Rongeurs
D’os arides

57.
Mais vrai !
J’ai trop pleuré

Le carnage commence Ă  peine
Alors qu’à l’est
Le rouge coulant comme une larme
Sur la pommette ronde du monde
N’est encore que celui
Du placenta de la bĂŞte

Elle arrive
Entendez-vous !

Il est temps
Grand temps
De penser
A se compter

58.
Cité écorchée
Le corps écartelé
L’esprit dispersé

Eloquent comme une tornade

On entend par-delĂ  les crĂŞtes
Monter en rugissant
Les grondements stridents
Des Furies

59.
Comme dans le filet stranguleux
D’un pêcheur de pêcheurs
Les ultimes soubresauts
Spasmodiques
De l’envie

Frénétique
Le mouvement
De la substance
Compassionnée

Assassinée

60.
Je suis l’ombre le froid la glace
Et je suis l’en feu
Tapi au fond
Des soupières primales

Venez, venez
Cerceaux de foudre

Et vous
Huez hurlez hululez
Généraux sans armée
Puérils
Pâles figures trespastorales

L’un tend l’autre joue
L’autre lève son glaive justicier

Et fend le corps souillé
De l’ogre dément
Golem prétorien
Des hommes dieux
Idoles carnées
Reniant leur source ventrale
Planète interdite
Epuisée
Tarie

Aimantation

Alors
Notre temps viendra

Nous nous ferons appeler

Vengeance
Et
Décapitation

#2 J.P

J.P

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  • PipPipPip
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Posté 25 juillet 2007 - 06:32

Quel régal de te lire.

#3 bine

bine

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  • Membre
  • PipPipPip
  • 74 messages

Posté 25 juillet 2007 - 11:33

C'est de l'humour, ça ?

#4 hasia

hasia

    Tlpsien +++

  • Membre
  • PipPipPipPip
  • 1 774 messages

Posté 25 juillet 2007 - 01:07

Très beau, très noble souffle de poésie.

Sur les chemins de pure poésie,
ce long "voyage" au tréfonds du respir des mondes
est très émouvant de profondeur sensible.
Vision singulière,
éclair sublime à l'éventail des significations
qui, en un mĂŞme mouvement,
saisit la page blanche
soulève tous les savoirs
et y rassemble tous les accords subtils
de notre vulnérable humanité.