Il frappa donc à la porte de son camarade lors d'un bel après-midi du mois de juillet et il se vit installé dans le salon de jardin, il y était à ses aises. Après les diverses salutations et après s'être enquit de la santé du sage, l'ami lui proposa un rafraîchissement. L'invité, curieux de par sa nature, demanda à son cher hôte ce qu'il pouvait bien lui offrir et, ce dernier, heureux de la question posée, s'empressa d'ouvrir son bar majestueux et luxueux et dit fièrement qu'il possédait toutes les boissons du monde, caféinées ou non caféinées, théinées ou non théinées, alcoolisées ou non alcoolisées, sucrées ou salées, chaudes ou fraîches, et tandis qu'il élaborait l'interminable inventaire de son incalculable stock de liquides extrêmement variés, son ami le sage contemplait les bouteilles et autres récipients que contenait l'immense bar, il ne fut guère étonné de n'en reconnaître aucun. Soudainement, il eut un genre d'étincelle qui traversa ses yeux, son ami, ayant aperçu cette lueur, s'arrêta de parler et crut qu'il avait impressionné, avec toutes ses boissons du monde, son convive le sage.
"-Es-tu parvenu à repérer un breuvage qui te ferait plaisir, mon doux ami?"
Et le sage, qui venait d'étouffer cet éclair dans ses yeux, répondit avec une malice non tue :
"-Je veux bien un verre d'eau."
Mais l'ami, celui qui n'était pas sage, était tellement riche de tous les nectars de la Terre qu'il en avait oublié le seul et unique qui fut jamais fondamental, celui que l'on appelle eau.
Voyez ces fous qui, sous l'emprise du monde et de ses futilités, oublient l'essentiel.
Tavulartiste
