D’où sont venus les mots que mon âme sans cesse
Recherche dans l’ailleurs, dans le feu, dans les femmes,
Dans les plaisirs brumeux, la vertu, les bassesses ;
Où sont-ils nés, ces sens aux vérités infâmes ?
N’est-ce donc que folie d’écouter les prophètes
Murmurant leur amour dans les replis lointains
Du drap de notre histoire emmêlé de défaites,
Où vient s’emmitoufler, aux lueurs du matin
Une foi imbibée des excès de nos fêtes
Oubliées aussitôt que mon esprit s’éteint ?
Nous faut-il renoncer à l’ultime envolée
D’un être que destine aux buchers son envie,
Pour souffrir un peu plus et maintenir voilés
Les brusques mouvements, éternels et ravis,
D’un univers au creux de nos cœurs enrôlés
Par l’auteur inconscient qui tragédie sa vie ?
Comment, de l’alphabet, retrouver les tracés,
Quand ses lettres usées ne savent plus écrire
Ni le bas ni le haut de mon esprit lassé
Ni son milieu ; dis-moi comment enfin décrire
L’absolu qui m’aspire hors d’un monde encrassé
Par la peur de survivre autant que de mourir ?
Pourquoi l’œil s’éteint-il devant l’extrême éclat
Suspendu dans la nuit sans limite et sans âge
Du vide sans présence et qui pourtant est là
Où sont mêlés, toujours, le dément et le sage ?