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Lettre posthume


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7 réponses à ce sujet

#1 Brumes1

Brumes1

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  • Une phrase ::"Laissez-moi seule juger de ce qui m'aide à vivre" - Paul Eluard

Posté 12 octobre 2007 - 07:21

On croit qu'avec le temps, on oublie tout. C'est faux. Tout est resté dans ma mémoire, gravé à jamais, tel un vieux disque dur rempli jusqu'à la lie de souvenirs. Il ne sera jamais formaté. Le seul virus qu'il ait à craindre est l'Alzheimer.
Quand je ferme les yeux le soir pour trouver cette paix fugace mais régénératrice que me procure le sommeil trompeur, il me revient par bribes ton image, puis tes gestes et ton visage.
Je te vois bouger dans une gestuelle familière. Je te vois gai. Je te vois grave et inquiet.
J'entends ton rire et tes silences…Je sens la souffrance qui te mord. La mort rode en silence…
Elle a bien fait son chemin, puisque aujourd'hui tu n'es plus là.
Je nous imagine parler des heures entières de choses, de la Vie, du Cinéma. L'étole s'est levée pour moi sur la Toile lorsque tu es parti. Trop tard pour en parler. Mais il n'est pas un film talentueux que je n'ai pas rêvé de partager avec toi. Tu aurais alors été animé d'une telle fougue, d'un tel engouement ! Oh, je sais trop bien comment tu aurais été, mon petit frère chéri

Adieu, jours heureux enfouis à jamais. Je n'ai pas su vous retenir et tu es parti avec eux, emportant tes secrets dans ton Pavillon aux Pivoines. Là-bas sont tes amours déchus et toutes tes espérances. Ta jeunesse aussi, flétrie à jamais par l'angoisse et la peur de la Vie.

Je ne t'ai pas bien écouté. Je n'ai fait que t'entendre.
J'ai essayé, je te le jure, de te comprendre
Et je t'ai aimé, comme je t'aime et t'aimerai à tout jamais.

N'ai jamais honte, petit frère ! Tu étais un soleil !

Ce n'était que l'absence des tiens qui figeait tes ardeurs joyeuses ! Comme les miennes le sont quand je pense à eux ! Héritage maudit niché dans ton cœur pur, tu n'as pas su l'apprivoiser.

Il t'a rongé jusqu'au dernier départ !

Il n'y a plus de cauchemars. La liberté ultime, tu as su la trouver. La fleur du fusil a ouvert les murs de ta prison sur son champ de verdure. Cours, Jean-Christophe, cours, bel évadé !

La Raison n'exclut par l'Amour. L'Amour n'exclut pas la Raison. Esprit égaré, torturé de souffrance, nous étions là ! Mais perdus dans nos brumes coutumières, le rendez-vous n'a pas eu lieu laissant place aux « Vestiges du Jour ».

Petit frère, onze ans bientôt, mais présent comme au dernier jour. Tu me manques.


Brumes1


#2 Maurice Oreste

Maurice Oreste

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Posté 17 novembre 2007 - 10:59

On croit qu'avec le temps, on oublie tout. C'est faux. Tout est resté dans ma mémoire, gravé à jamais, tel un vieux disque dur rempli jusqu'à la lie de souvenirs. Il ne sera jamais formaté. Le seul virus qu'il ait à craindre est l'Alzheimer.
Quand je ferme les yeux le soir pour trouver cette paix fugace mais régénératrice que me procure le sommeil trompeur, il me revient par bribes ton image, puis tes gestes et ton visage.
Je te vois bouger dans une gestuelle familière. Je te vois gai. Je te vois grave et inquiet.
J'entends ton rire et tes silences…Je sens la souffrance qui te mord. La mort rode en silence…
Elle a bien fait son chemin, puisque aujourd'hui tu n'es plus là.
Je nous imagine parler des heures entières de choses, de la Vie, du Cinéma. L'étole s'est levée pour moi sur la Toile lorsque tu es parti. Trop tard pour en parler. Mais il n'est pas un film talentueux que je n'ai pas rêvé de partager avec toi. Tu aurais alors été animé d'une telle fougue, d'un tel engouement ! Oh, je sais trop bien comment tu aurais été, mon petit frère chéri

Adieu, jours heureux enfouis à jamais. Je n'ai pas su vous retenir et tu es parti avec eux, emportant tes secrets dans ton Pavillon aux Pivoines. Là-bas sont tes amours déchus et toutes tes espérances. Ta jeunesse aussi, flétrie à jamais par l'angoisse et la peur de la Vie.

Je ne t'ai pas bien écouté. Je n'ai fait que t'entendre.
J'ai essayé, je te le jure, de te comprendre
Et je t'ai aimé, comme je t'aime et t'aimerai à tout jamais.

N'ai jamais honte, petit frère ! Tu étais un soleil !

Ce n'était que l'absence des tiens qui figeait tes ardeurs joyeuses ! Comme les miennes le sont quand je pense à eux ! Héritage maudit niché dans ton cœur pur, tu n'as pas su l'apprivoiser.

Il t'a rongé jusqu'au dernier départ !

Il n'y a plus de cauchemars. La liberté ultime, tu as su la trouver. La fleur du fusil a ouvert les murs de ta prison sur son champ de verdure. Cours, Jean-Christophe, cours, bel évadé !

La Raison n'exclut par l'Amour. L'Amour n'exclut pas la Raison. Esprit égaré, torturé de souffrance, nous étions là ! Mais perdus dans nos brumes coutumières, le rendez-vous n'a pas eu lieu laissant place aux « Vestiges du Jour ».

Petit frère, neuf années bientôt, mais présent comme au dernier jour. Tu me manques.


Brumes1


Tu es sans doute triste à mourir, puisque tu publies ta lettre avant ta mort. Es-tu déjà morte, pourquoi ce titre de Lettre posthume? Très beau texte! Amitiés

Maurice

#3 Brumes1

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  • Une phrase ::"Laissez-moi seule juger de ce qui m'aide à vivre" - Paul Eluard

Posté 18 novembre 2007 - 09:01

"Tu es sans doute triste à mourir, puisque tu publies ta lettre avant ta mort. Es-tu déjà morte, pourquoi ce titre de Lettre posthume? Très beau texte! Amitiés

Maurice"

Lis attentivement, Maurice. Cette lettre est adressée à mon frère qui s'est donné la mort il y a 9 ans.
Merci pour ton commentaire.

Brumes1

#4 Aloyse

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Posté 18 novembre 2007 - 11:05

Ce poème m'émeut beaucoup. J'ai perdu un ami de la même façon il y a vingt-huit ans.
Tes mots font revivre la tristesse de la séparation qui reste toujours là, malgré les années qui passent.

#5 Maurice Oreste

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Posté 18 novembre 2007 - 05:19

"Tu es sans doute triste à mourir, puisque tu publies ta lettre avant ta mort. Es-tu déjà morte, pourquoi ce titre de Lettre posthume? Très beau texte! Amitiés

Maurice"

Lis attentivement, Maurice. Cette lettre est adressée à mon frère qui s'est donné la mort il y a 9 ans.
Merci pour ton commentaire.

Brumes1


J'ai eu tort de prendre la définition du terme posthume à la lettre bien que je ne sois pas un puriste. Mais pour moi une oeuvre posthume est une oeuvre publiée après la mort de l'auteur. Puisque la lettre est adressée à ton frère décédé... je croyais que ce serait "In Memoriam" sans pour autant vouloir faire des critiques ascerbes car ce n'est pas de mon genre surtout quand le texte est très bien écrit. L'essentiel c'est que je l'aime, merci d'avoir éclairci mes esprits. Amitiés!

Maurice

#6 Brumes1

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  • Une phrase ::"Laissez-moi seule juger de ce qui m'aide à vivre" - Paul Eluard

Posté 18 novembre 2007 - 06:27

J'ai eu tort de prendre la définition du terme posthume à la lettre bien que je ne sois pas un puriste. Mais pour moi une oeuvre posthume est une oeuvre publiée après la mort de l'auteur. Puisque la lettre est adressée à ton frère décédé... je croyais que ce serait "In Memoriam" sans pour autant vouloir faire des critiques ascerbes car ce n'est pas de mon genre surtout quand le texte est très bien écrit. L'essentiel c'est que je l'aime, merci d'avoir éclairci mes esprits. Amitiés!

Maurice


Plutôt que "In Memoriam", j'ai choisi "Lettre posthume" car c'est une lettre qui répond à une autre, celle qu'il a laissée avant son acte. Mais "In Memoriam" serait le bienvenu.

#7 Maurice Oreste

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Posté 18 novembre 2007 - 08:17

Plutôt que "In Memoriam", j'ai choisi "Lettre posthume" car c'est une lettre qui répond à une autre, celle qu'il a laissée avant son acte. Mais "In Memoriam" serait le bienvenu.


Merci Brumes1! Ton texte touche les fibres les plus sensibles de mon coeur; nous sommes en quelque sorte liés par la douleur en signant le pacte avec le malheur. Des larmes d'or s'égouttent de mon coeur dans "Tristesse" poème dans lequel je confesse mon malheur face à la disparition de ma mère:

Avec l'épée dans l'âme j'ai vu mourir ma mère
L'être le plus cher de toute mon existence
Cette perte cruelle, oh! ce coup fatal
A causé mon malheur et ma tristesse profonde.

Tout comme toi, Brumes1, je connais des nuits sombres et mortelles, le trépas de mon plus jeune frère dans mes bras tremblants est durant toute ma vie un coup de poignard.
On ne peut se passer des souvenirs macabres
Qui engendrent l'affliction et le désarroi,
Des bains de larmes, des souffrances amères,
Du remords, de l'effroi et des jours de malheur.

Il n'y a pas longtemps, l'unique frère âgé de 23 ans, traversant l'atlantique vers les rives étastsuniennes, périt en mer avec tout l'équipage et mon poème "Regrets" en dit long. Ma soeur, les choses qu'on n'a pas prononçées sont les secrets du coeur. Je compatis à ta douleur...Amitiés!


Maurice

#8 Brumes1

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  • Une phrase ::"Laissez-moi seule juger de ce qui m'aide à vivre" - Paul Eluard

Posté 27 janvier 2008 - 01:56

Merci Brumes1! Ton texte touche les fibres les plus sensibles de mon coeur; nous sommes en quelque sorte liés par la douleur en signant le pacte avec le malheur. Des larmes d'or s'égouttent de mon coeur dans "Tristesse" poème dans lequel je confesse mon malheur face à la disparition de ma mère:

Avec l'épée dans l'âme j'ai vu mourir ma mère
L'être le plus cher de toute mon existence
Cette perte cruelle, oh! ce coup fatal
A causé mon malheur et ma tristesse profonde.

Tout comme toi, Brumes1, je connais des nuits sombres et mortelles, le trépas de mon plus jeune frère dans mes bras tremblants est durant toute ma vie un coup de poignard.
On ne peut se passer des souvenirs macabres
Qui engendrent l'affliction et le désarroi,
Des bains de larmes, des souffrances amères,
Du remords, de l'effroi et des jours de malheur.

Il n'y a pas longtemps, l'unique frère âgé de 23 ans, traversant l'atlantique vers les rives étastsuniennes, périt en mer avec tout l'équipage et mon poème "Regrets" en dit long. Ma soeur, les choses qu'on n'a pas prononçées sont les secrets du coeur. Je compatis à ta douleur...Amitiés!


Maurice


Je comprends ta douleur, Maurice. Plaie béante qui, même protégée, ne se refermera jamais.

Bien amicalement

Brumes1