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LA PLUIE


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#1 Alain LE GRATIET

Alain LE GRATIET

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Posté 07 décembre 2007 - 04:07

LA PLUIE

Que j'aime cette pluie qui tue enfin les bruits

Son doux ronronnement étouffe les clameurs

Répercutées d'échos montant des profondeurs

Que j'aime cette pluie qui tue enfin les bruits !

Plus de boum-boum enfin noyés dans l'eau tombante,

Pénétrant en jouant les membranes fumantes :

Les circuits ont grillé, mis hors d'état de nuire

Vive la pluie qui tue tout ce qu'on doit maudire !

Les coqs ne peuvent plus, comme poules mouillées,

Les ailes repliées, pousser leurs cris d'orfraie ;

Époumonés, penauds, ils penchent bas leur crête

Comme une ouïe blessée sur leur stupide tête.

Que j'aime cette pluie tombant en rangs serrés

Interdisant aux chiens de venir déféquer

Jusque devant ma porte pourtant protégée

D'engins malins censés pouvoir les refouler.

Que j'aime cette pluie qui les empêche aussi,

Les repoussant au fond d'un jardin déserté,

D'aboyer, dératés, comme rats détrempés,

Frileux, amers, floués, parfaitement transis.

De toute la journée de ce vingt-huit janvier

Je n'ai pas entendu un seul chien aboyer

Zeus, en qualité de Chtonios, dieu de la pluie,

Tant de fois imploré, que je te remercie !

Même tous ces fruits mûrs accrochés au figuier

Ont pu se préserver du merle si vorace,

D'ordinaire moqueur mais tant désemparé

Qu'il ne put y goûter malgré sa grande audace

Pascal affirmait bien : "De l'homme le malheur

Vient de ce qu'il ne sait rester seul en sa chambre".

Puisse tomber la pluie de janvier à décembre

Afin qu'il s'y tienne et y trouve son bonheur !

En averse furieuse elle cloue aux abris

Tous ces petits soldats des manifestations

Qui sans elle eussent fait – faut-il donc qu'on l'oublie ? –

Une grève appelant quelque révolution.

A vaincre sans péril on triomphe sans gloire

Mais je savoure là une grande victoire

Et tout comme Moïse sauvé par les eaux,

Je me vois en de Gaulle prononcer ces mots :

"Tahiti outragée, ô, Tahiti brisée !

Île martyrisée mais enfin libérée"

L'ennemi aux abois (!) est-il enfin battu ?

Ou faudra-t-il ailleurs chercher notre salut ?