Le refuge des rimes
Mes poèmes sont mes cabanes d'autrefois.
Tout jeune je m'y réfugiais au fond des bois.
Bien moins jeune dans les rimes je me retranche.
Les mots sont les planches, les calembours des branches,
Le toit à claire-voie m'emporte au firmament
Dans l'arche de silence, murmure du vent.
Comme mes cabanons mes œuvres sont royaumes
Dans lesquels je retrouve mon âme de môme.
Comme autant de lianes je tresse des vers
Qui dessinent les remparts de mon univers.
Ce ne sont que de désuètes forteresses
Mais elles sont retraites où mes idées se pressent
Pudiques, Ã l'abri des regards malicieux,
Des sourires goguenards, des grimaces de ceux
Qui ne comprendraient pas que l'on peut trouver belle
Une cascade de mots jetés pêle-mêle.
Dans mes huttes de quatrains de peu de vertus
Puristes et artistes ne sont bienvenus.
Ils n'y trouveraient que des déplaisirs du reste
Tant l'idiome est brut et la lyre modeste.
J'y tolère mes amis, ceux qui, comme moi,
Remercient la nature de ses présents de roi,
Frissonnent devant un somptueux paysage
Et regrettent ces jeux campagnards d'un autre âge.
Se laisser bercer par des souvenirs d'enfant
Transcende les infimes plaisirs du présent.
Coucher dans la poésie ses amours précoces
Teinte l'avenir de l'insouciance du gosse.
Mes poèmes sont mes cabanes d'autrefois.
L'alexandrin remplace les morceaux de bois.
Dans les sonnets et les triolets je m'évade
Comme au temps où le merle me donnait l'aubade.
J-P M