La surface est donnée comme point de départ : celle du lieu dâécriture : la maison, lâatelier, la prairie, le verger est-il précisé en note liminaire. Et cet espace suffit pour le poète pour vivre et écrire ou écrire et vivre, les deux actions se confondant intimement. Chaque pièce étonne par son envoi. Il peut sâagir dâune expression entendue, dâune citation retenue, et le poème déroule son chemin sinueux et fastueux ; il peut sâagir du bruit dâun oiseau, dâune fleur, pic vert, merle ou violette ; il peut sâagir encore dâune phrase apparemment anodine, qui prend soudain une valeur inattendue, lorsque la page aura partagé et décortiqué tout son sens, ainsi : 
Aucun homme ne passera indifférent devant un tas de bois⦠
ça laisse dâabord un peu pantois, ou bien : 
Une surface aquatique révèle lâesprit qui est dans lâair. 
où lâon devine déjà une autre charge. Le sujet peut être le futur proche soudain personnifié ou un infinitif sarcler qui renvoie le lecteur à la terre et au jardin. Il y a le temps et les graines, ce qui passe et ce qui pousse 
Beaucoup de journées comme celle-là. 
Dâautomne. ⦠
Ou bien 
Un de ces après-midis qui sâétendent 
longs fraternellement longs devant nous, 
de cette longueur qui touche lâinfini⦠
Et aussi 
En quelques jours les herbes ont pris le dessus⦠
Et puis au cÅur de ces observations et de ces réflexions, entre ce qui se noue dehors et ce qui se joue dedans, ce qui fait le lien entre regard et pensée : lâécriture, omniprésente. Délicate, déliée, ramifiée dans les limbes de la nature et dans les clairières du cerveau. 
â¦les mots viennent de loin 
sans vraiment obéir à la surface des lèvres. 
Ils ont parcouru les zones les plus oubliées du corps résonnent depuis sa profondeur.
Jacques Morin
Jean-Luc Steinmetz, 28 Ares de vivre, encres de Pierre Zanzucchi, Le Castor Astral, 2019, 152 p., 13 â¬
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