Je relis les histoires désobligeantes de Léon Bloy (de très courtes nouvelles) et ce sont des textes vraiment fabuleux, très drôles et infiniment profonds. Je relirais le Désespéré ensuite. Voici un extrait de La Denière cuite, nous sommes dans la tête d'un bourgeois qui a fait fortune dans la vente de cercueils et qui a pris sa retraite pour se consacrer à "de chères études":
-Qui pense, disait-il, aux douleurs des riches ? Moi seul, peut-être, avec le divin Bourget dont ma clientèle raffole. Parce qu'ils accomplissent leur mission, qui consiste à s'amuser pour faire aller le commerce, on les suppose trop facilement heureux, oubliant qu'ils ont un cœur. On a le toupet de leur opposer les grossières tribulations des indigents dont c'est le devoir de souffrir, après tout, comme si les guenilles et le manque de nourriture pouvaient être mis en balance avec l'angoisse de mourir. Car telle est la loi. On ne meurt véritablement qu'à la condition de posséder. Il est indispensable d'avoir des capitaux pour rendre l'âme, et voilà ce qu'on ne veut pas comprendre. La mort n'est que la séparation d'avec l'Argent. Ceux qui n'en ont pas n'ont pas la vie, et, dès lors ne sauraient mourir.