
Anaïs
Les arêtes de l'hôpital
leurs flous reliquats
leurs évagations
Anaïs devient archane
les pas
qu'il lui reste
traversent l'hémi-nuit
alors s'étendre
et jusqu'aux entrailles
la recouvre la cendre du linge
qui eût à tierce recommencé à sécher son corps
le bestiaire sparsile de l'orée lui est un sommeil
luire entre les fûts insoupçonnables
et rayonner converge vers la témérité du myocarde
non plus se lever... translater
en orient le dernier aplomb humain
à la branche
qui la passe d'une fasce d'éclat
elle append le tissu des exécutions
afin que la seule cloison de sa sépulture infinitive
fût cette aube turquoise
Clarisse
D'albes fils, imperceptibles coulures d'oreilles, instillaient en mon esprit le premier mouvement d'une sonate.
Clair de lune.
Et la musique allait ailant mes pensées, au lieu que je fusse convaincue de traverser une ville.
Elle avait de plus en plus d'empire sur les constructions qui épaississaient jusques aux amauroses le connu de ma déambulation - immeubles, maisons, boutiques, tavernes, cathédrale -
De même qu'un métal peut être porté à incandescence par une chaleur intense, de même le ravissement de la musique les portait à diaphanéité.
Les portes et les fenêtres s'étaient évaporées. Les façades se décontenançaient par degrés pour se muer en de très minces feuilles hyalines. Les arêtes et les angles maintenaient des lignes minimales, ennuagées d'une indéfinissable couleur où toutefois se filigranait le cyan.
Et je pouvais percevoir une lumière, étrangère à l'étoile aussi bien qu'à la lampe, infiniment émerveillante et véritable de son désir de chemin, tout grain cardinal compromis, tout horizon transgressé.
Chaque note du piano virtuose faisait ondoyer les lignes en proportion de son ampleur. Il devint manifeste qu'à partir d'un certain volume sonore elles se seraient évanouies...
Mieux encore, il était clair, il était incoercible que la musique, émouvant, éclatant, exaltant relais des géométries fourbues, irait subrogeant la ville tout entière où, dès lors, le pas subtil, la cheville étincelée, j'aurais, affranchie des saturnales harasseuses, des vieux spleens, des repères qui étriquent, et de la destination inexorablement recommençante, atteint à l'absolu des escapades.
Arielle pentapétale
l
pour lacuner la route
d'une inlassable étoile vitesses
et passages annuler
luit la trouée soudaine du connu
ces six pas
dardés par le trottoir
cet agenouillement
parmi l'exponentielle avanie
main et rupture
convergent vers l'éclat
où du rose ira en précisant du verre
ll
qu'importe le circonvoisinant
jeux brisés et fades effrois
quand désapparié
impuissant à sombrer son oblique dans les herbes
paraît un soulier d'enfant
son injonction de laine à saisir
la couleur progressive
lll
la cache
aux confins des absences d'eau
dans un presque clos
il reste une aube
et c'est gésir
et c'est allumer anguleuse
de la paume se levant
toute cette façon de gemme
soit atteint le sang
lV
derrière la robe de la fille qui
lente approche
déjà l'effusion
a nuancé le rouge
à sa fixité
puise l'agonie
les yeux s'échangent
V
il n'est qu'un geste
recueillir le fragment
un corollaire du geste
essuyer
puisqu'il déroge à la meurtrissure
et comme elle réunit désormais son regard à cette optique
six pas sont légués
à son éloignement
au travers un monde est trouvé
où rosir a supplanté la larme
Stéphanie
Il lui est encore accordé
un pampre de pouls
accourcissant l'errance
alors que les secouements de sa chevelure flavescent
elle pénètre un village
jusqu'à ce que cette chambre d'hôtel l'enclose
une oblique poudroie
afin que la clef se dissolve
elle abhorre les truismes des voilages
dont elle effondre les fuseaux
pour les suppléer
elle s'empare du linge
un quadrangle
parmi les étoiles liliales du couvre-lit
au déploiement apothéotique
il apparaît que leur lymphe parme effuse
l'album de sa vie réunirait les photographies
qu'inféode cette lumière-là
cette source
qui ne peut plus être visitée
dans le battement limbique
qu'il reste
le mélodique charme de se dénuder
telle une veine d'or
le bracelet s'enfuit
à travers la lenteur
Stéphanie effleure du visage la thermie informe
puis à gésir
s'offre parmi les étoiles légères
à l'instant du systaltique finale
glisse la fenêtre improvisée
et le corps
jusques au sein tu
devient gisant d'albâtre
Cassandra
enfin
sur la table transparente
elle a déchiré le filet mince
regardé rouler
s'alentir
se figer les oranges
son dernier semis de perles
gravé sur les carreaux
la pluie se tait
calmée
l'haleine
filigrane
la pénombre
hurlée de la lampe
son jour qui bluffe
elle attend les mains moins disparues
calligraphes des partages de jadis
encres broyées sur la source du poème
pour écorcer les fruits d'ombre
qui parsèment le tapis couleur de paille
après le sommeil et ses saccades
allumement des oranges
avec l'or qui nomme les florilèges
les jus cèdent aux aurores
le tranchant
qui rayonne l'arôme descellé
s'irréalise à ces soleils propices
et ce n'est pas s'éteindre
ce continu sillage du luire
océan du mur
récif de l'angle
périssoire de l'aquarelle
où se rose encore ta jeunesse
et cette heure
qui fiche des aiguilles coureuses
dans la mire de l'éternité
réfléchissement des oranges
dans le profond de la table
spectrale cueillette
pour le sang devenu spéculaire
ce qui repose comme demain
à l'intérieur des paniers tressés
sur les sommets inatteignables des armoires muséales
oiseaux des premiers ciels
échos des blés d'enfants
baies à même l'émeraude plurielle des évadés
gestes parmi la vigueur dévouée
aux gibiers du jardin
sur ces passerelles exquisément arquées
en lesquelles se sont muées leurs anses
voyez-la traverseresse de ses dernières faims
Roseline
le souffle oiseleur des pensées
quelle autorité échoit à la lucarne !
ses angles regorgent d'évocations
le frappeur et la minute
en opportunes maladresses afin de tout épandre
ces voyages d'encre à même le cyan
leurs subtiles rencontres
ont favorisé la façon rameuse
preste une croyance
sait désemparer les yeux
cette créature de vêpre
où se quintessencient les robustesses
décache l'agent des rayons
à une distance si heureuse
du verre qui n'eût qu'étanché
et encore promu l'approximation
le rose allumé considère
Marianne
À ce point de l'épilogue de la flânerie bucolique
Marianne a fixé les yeux sur l'ombre
du drapeau qui est la proie du vent
c'est au pied de la fontaine léonine
dont l'ocre de la pierre
laisse sourdre un clair arqué
à maintes reprises
elle en emplit la conjointure de ses mains
et s'en délouve
à peine la porte de la chambre franchie
on la gourmande
de ce qu'elle module de la sorte le temps
elle a ri en s'élançant vers le bain
où lyser les dernières heures strictes
nue et mouillée
son émaciation s'est figée devant la fenêtre
étrangère aux métaboles du jour
c'est juste toute la ville qui arde
alors que l'on déploie un linge vaste
à travers lequel la consomption
se mue en bleu pastel qui flamboie
elle ne veut pas d'autre vêture
ni aucune autre contingence d'aube
et la voici
dans les rhombes dédaléens du tapis
souffle et systole en exil qui poudroie
une diagonale de sang née de ses lèvres
se tait dans la gorge de lys
puis va rutilant d'un pli
à l'autre de son emmaillotement
Annabelle
distributive et bleu de nuit
couleur des chronométries anémiées
et ce lent évanouissement
qui safrane la sentinelle
parfois tout à cette définition
qui sacre le bibelot
des silhouettes tutélaires
gracient le tamaya
du poids des ailes
s'effeuille le navrant vitalisme
lignes et bandes par myriades
vivier de la verticale et de l'horizontale
des insistances comme des sources
de sa luneuse angéiologie
le sang s'exile
pour se relier au noir
par-delà folklore et symbole
je suis ce legs à
sa métamorphose en l'encre
qui carrelle les transparences incunables
Raphaëlle
En fauve
en flavescence où par intermittence
paraît l'irisage errant
la lumière de la nette après-midi
cascatelle sur les mirabelles
qui dans leurs consécrations de vannière
adorent le rassasiement
depuis de longues minutes
les yeux clos
la saillie des genoux
oedématiée par les poings
Raphaëlle est assise sur le lit
à côté du linge qu'a déposé
l'infirmière numineuse des aurores
le rose pâle colore toutes ses images de vaillance
avec une foi de boîte fée
ses mains l'ont saisi
pour le déplier
pour qu'il aoûte devant la croisée
que son coeur grandissant soit limbé par des allumements
le soupir pour la nudité
aux fins d'en emmitoufler
les amoindriements médullaires
Le triptyque de Xiaoyuli
1️⃣
d'aquarelle
ou d'éprouvé faisceau d'aurore
ses portraits enceignent la chambre
cette bouche où se neutralisent
le sourire et la nostalgie
ces gemmes noires et fluides du voir
cette dentelle des épaules sable
sous les cheveux de jais prodigue
et titubée la décision
parmi le dégradé de ses âges
elle va de l'enfant
à la femme
de la femme
à l'enfant
toute machinale inculcation du temps
égarée
ses lèvres parfois frémissent
de la syllabe d'un sortilège
fabuleux un paysage de cire encore
dévoue une flamme
à son voyageant regard
ses doigts effleurent les cadres
soupirent après la poussière
son toucher flâne aux angles
la pulpe déférée à l'écorchure
2️⃣
après le sûr transpercement
du diaphane de la peau
la lame ira longuement
s'éloignant du poignet
malgré l'incandescent fardeau
de son dernier reflet
ainsi bifurqué le bleu des vaisseaux
mêle l'abandon à l'effusion
le poids pourpre du sang qui s'enfuit
délivre
et déferle les tentures du soir
et les images se brouillent
atteignent au fourmillement
muettes explosions des contingences de cendre
nulle considération sélénienne
nulle jouvence de safran
d'une source de ciel ou de rue
ne sait plus s'y réfléchir
mais dans l'exhalaison de la chandelle épuisée
s'inscrit un souffle encore
la silhouette bruie qui prénomme
un rire de créeur sous le loup des minuits
3️⃣
avec son allant de principe
ce matin-là
au tamis des voilages
l'ennui visqueux du sang
et s'épand la transparence d'une lumière rose
un sommeil qu'a bercé la meurtrissure
jusqu'à la carnation des clairvoyances
porte la plume veinulée des paupières
et sur les murs
les visages d'une vie humaine
indéfiniment balancent
entre la chimère
de leur suspension
et la galactique candeur
des rayons qui transhument l'infime
Vanessa
la poignée
en dépit de son brandissement lacté
dissoute
dans l'ombre téméraire
une liqueur de bleu diaphane
gorge les carreaux
ramures du reverdir orpailleur
ivresse des dehors
et ne demeure au verre
que le malingre embuement
de la désenchanteresse
qu'un vieux noir de cadre
ses lignes se croisant
ses angles démultipliés
pour sa prétention au terme
puisqu'il arrive que le vent
et la pause de l'oiseau de moire
concernent le tamaya
qui visite l'aquarelle
et qu'arque la sanguine
prestidigitatrice détresse
et la transparence est ce va-et-vient
d'un sentiment de ciel
Daphnée
foudre platine
sur le fol hyalin
pour muer la brisure
en dendrite noëlle
versicolore anthologie du jour métabolique
sa capillarité émonde la contemplation
et congédie le porphyrocyané lacis des vaisseaux
outreretour et transapôtre
le myocarde chemineau
et le liquide désapprend la viscosité
en compliciant l'ulysse leuçalgique
à même la jachère des alcools
des chemins germinent leur pas lucide
là où la soif émancipée de l'araire
afin qu'abonde-aure le saisonneur
disjoignit de pellucide en pellucide
ses commissures jusqu'à la transparence
Extrait de « Leucémique errance & Autres Poèmes de Loup-de-lune 月狼 » par LIU Bizheng 劉 碧峥, Éditions d'Autre Part & Leukaima, Fribourg, Neuchâtel, Genève (Suisse), Zhoushan Zhejiang 舟山 浙江 (Chine 中国), 2022 二千〇二十二 (printemps 春天). Tous droits réservés.