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Pensées oubliées


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12 réponses à ce sujet

#1 Ernestine Artner

Ernestine Artner

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Posté 26 avril 2007 - 05:57


Une maxime, pour être bien faite, ne demande pas à être corrigée. Elle demande à être développée.




Avertissement

Cet ouvrage est une œuvre anonyme, signée d’un nom factice comme tout nom d’auteur véritable. Que personne ne s’en arroge la propriété, tant sont répugnantes les confessions gluantes d’ersatz d’écrivains télévisés de notre fade époque. L’esprit où a germé ces pensées oubliées n’est celui de personne. Il est celui de tout ceux qui, par nécessité, gloire ou plaisir pervers, ont remarqué dans un demi sourire ou un clignement de paupières que ce qu’on nous apprend à aimer depuis l’Aube des temps n’est que bourbe infâme ou répugnante utilité. Elles sont celles des animaux grégaires qui s’éclipsent doucement du troupeau, non en plein jour pour aller pavaner aux yeux de tous à quelques centimètres, mais qui de nuit, sans que personne ne le sache, s’élèvent à une hauteur infinie et font scintiller en cachette le rayon de leurs yeux remplis de larmes sur les humains malades. Elles sont la voix de tous et de personne. Elles sont toute la poésie occidentale qui reste encore avant d’agoniser dans un spasme ultime.


Prologue

Il est par les dédales de mes pensées confuses des chemins qui mènent plus sûrement à vous ; tous les professeurs ne sont-ils pas des John Egine ? Me rappelant le jour où je fus tant surprise du frôlement si réel de vos doigts sur ma peau, moi qui vous croyais un de ces êtres qui ne doivent leur existence qu’aux rayons de mes yeux sur le monde, j’ai souvent rencontré des êtres qui, pour avoir un sourire un peu semblable au vôtre m’ont semblé pouvoir être une partie de moi. Nous sommes dans ce monde en l’an 2002 d’une ère grégorienne, j’efface lâchement de mes pensées le nom d’Anne au souvenir de mon serment trahi ; je jure quoiqu’il advienne de n’oublier jamais les théories que vous m’avez apprises, je vous tiens pour mon maître et espère n’aimer toujours que des êtres qui sont à vous semblables.

#2 Ernestine Artner

Ernestine Artner

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Posté 26 avril 2007 - 05:58

Premier mouvement

C’était par une nuit, et le vent faisait voler mon ample manteau noir. J’avançais à pas mesurés dans une rue pavée, contrôlant la cadence régulière de mes pas sur l’asphalte, les mains agrippées à la doublure déchirée. Une voix résonna du monde extérieur, une voix masculine au timbre étouffé qui disait quelque chose ressemblant à mon nom. Ma concentration faiblit et ma marche dévia. Je détachai les yeux de ma trajectoire, scrutant alentour sous mes paupières mi-closes. Je connaissais le type, je ne savais plus d’où : genre de rampant social dont je me méfiais. C’est en m’avançant prudemment que je remarquai, fondu dans l’ombre, l’être qui se tenait près de lui. Il portait le même manteau que moi et son nom m’échappa quand on nous présenta. Un salut social s’échappa de mes lèvres, mes pupilles étaient braquées sur les siennes qu’il couvrit prudemment de ses paupières. C’est lui que je suivis dans le bistrot bondé où on nous invita. J’étais assise en face de lui, les épaules en arrière et les jambes croisées, si serrées l’une contre l’autre que mes muscles s’engourdissaient, suspendue à son demi-sourire hypnotique, incapable de saisir le sens du discours fluide qui suintait des tréfonds de sa maigre silhouette au sternum contracté. Le niveau du vin âcre devant moi oscillait sous le choc régulier de mes ongles bordeaux, faisant vibrer l’étrange reflet sur la table. Sa jambe gauche tremblait. Mes yeux brûlaient de chercher trop ardemment son regard vide. Nos doigts s’effleurèrent quant à sa demande je lui offrit une clope, je fus surprise par le contact matériel de sa peau, et ma main se retira d’elle-même dans un geste trop brusque pour paraître naturel. Je balbutiai un « au revoir » inaudible, et chancelante je me sauvai, me frayant un passage vers le froid rassurant de la ville humide à travers le ramassis opaque d’humains malades entassés dans le bar. A grandes enjambées au milieu des façades je tentai d’effacer le visage osseux de ma réalité.

Toi plus moi moins moi fois toi sur toi au carré qui m’observe en silence.

L’amour, l’agrégation et l’existence ne sont que de vastes supercheries, c’est entendu. Les humains malades de notre ère d’analystes confessés laïcs en manque de transcendance, sont répugnants. Comme moi et même davantage, ils se sont retranchés dans une fade apathie. Que meurent leurs enfants, files insipides de teufeurs maladifs. Que soit engloutie leur génération et celles qui pourraient suivre. La politique est une supercherie, parce qu’elle doit proposer des idéaux communs, donc répugnants. La communauté est une chose répugnante. La démocratie est un concept odieux, son application est visqueuse. Je relis Tocqueville. Son style est fort joli. Aujourd’hui, le ton est à l’aplatissement, c’est étrange. Quant aux idéaux, ils se font normatifs, c’en est insupportable.
J’appelle encore le démon qui fut celui de mes rêves lorsque certains soirs le vin a le goût âpre de celui que j’ai avec lui partagé, un soir où la lune donnait à ma peau des éclats de candeur psychédélique. J’appelle le démon qui fut celui de mes rêves lorsque mes modèles s’évanouissent dans les vapeurs du doute, lorsque mes références s’évaporent dans la brume d’un manque indéfini. J’appelle le démon qui fut celui de mes rêves pour savoir qui je suis, accuser la distance analogique qui sépare chacun de mes appels à l’aide. Je suis la plus laide des femmes.

L’année 2006 s’annonce comme un retour au même, et la vanité de cette fade existence tend à me peser lourdement. Nous passâmes avec C la symbolique saint Sylvestre de cette année maudite chez une foule d’êtres humains visqueux de joie factice. J’observe comme je suis laide et vulgaire sur les photos. J’embrasse C sur une première photo, et je ne semble pas me rendre compte du ridicule qui s’attache à cette situation burlesque ; comme un fait du Hasard, ma robe noire est mal mise et quelque chose dépasse. Je suis à l’extrême bord, avec l’air avachi des apathiques de notre temps. Et sur d’autres photos j’embrasse encore C. Que la honte me dévore.

Rien n’existe, parce que vous êtes mort.

Le RER A étire sa ligne rouge dans les recoins perdus d’une banlieue sordide ; et le bruit languissant du wagon sur les rails bercera cette année mes rêves dérisoires, moi perdue dans un temps matériel. Les enfants des banlieues sont des racailles ou bien des arrivistes ; le rêve est banni de leurs esprits perdus, une fade ambition les dévore, motivée par la crainte de lendemains précaires. Je regarde ébahie le monde étriqué de mes fades élèves, et ma vie qui s’enfuit, se perd en insolubles conjectures.

Je suis la plus laide des femmes, et je voudrais que ma laideur pétrifie les humains, aient pour eux les réminiscences de leurs pires cauchemars ; je voudrais que jamais C ne m’oublie, hanté par la monstruosité sordide de ma difformité, et qu’il meure étouffé de remords. Je voudrais tuer sur mon passage tous les êtres alentours, ou leur donner éternellement le regret d’être nés. Je veux ne faire que des choses sales, méchantes et gratuites. Je veux donner encore beaucoup de rendez vous où je ne me rends pas, submergée de désinvolture devant la réalité dérisoire que je vais rencontrer. Je veux mourir d’amour pour une image de moi reflétée dans les yeux d’un démon. Je veux mourir de haine pour tout ce que je suis, agoniser d’amour pour ce que je veux être. Je suis ce dieu qui meurt si on ne l’aime pas.

Vous n’avez pas compris ce que j’ai voulu dire. Vous n’avez pas senti tout l’égal surgissement d’une torpeur sans nom, frappée au rythme de mes pas dans le couloir trop propre d’un lycée de banlieue. Vous n’avez pas compris à quel point je désespère de pouvoir vous changer contre des êtres informes. Vous n’avez pas compris que c’est vous et vous seul qui réapparaissiez chaque fois différent sous des traits toujours insupportablement plus approximatifs. Vous n’avez pas compris que je ne peux plus choisir, il me faut toute la force de mes phantasmes pour vous pouvoir voir, encore, de loin, dans la silhouette d’un autre. Vous n’avez pas compris ce que j’ai voulu dire. Vous ne comprendrez pas ce que je dis ensuite, encore, pour pouvoir parler une dernière fois. Encore.

Développé sur huit temps, ma jambe se tend mes muscles me font mal, exquisément mal, je me rappelle avoir été cette droite tendue vers l’infini.

Le métier de professeur est le plus laid du monde, et les temps actuels le rendent plus laid encore ; j’ écrirai un livre qui dénoncera l’avachissement de notre monde. J’ai essayé de dire à mes élèves la beauté de l’inutile. Ils ne m’ont pas comprise.

La vie forme une boucle semblable aux sinuosités des cheveux blonds de Cédric.

Ma tristesse croit sur le rythme languissant d’un air de Schubert. Mes pensées se perdent et ma vie est déchue ; je stagne dans une torpeur moite, ma haine des humains me semble insurmontable et je me sens disparaître un peu plus à mesure que mes démons s’éloignent, me laissant seule et sans rêve, exilée dans la matière la plus crasse qui soit. Que je revienne au même une seule fois encore et j’en mourrai sans doute ; ces histoires me lassent, les théories s’effacent de mon esprit je n’aspire plus à rien. Les affres du sommeil ne soignent plus la fatigue qui m’accable, ne reposent plus mon corps sali par le désir, je n’ose plus rêver de peur de mal le faire, je meurs de soif auprès de la fontaine. Je n’ose pas vivre de peur de le faire lâchement.

Je meurs de C auprès de C.

De mémoire en mémoire j’ai rencontré Marius. Mémoire de Marius écrit dans un instant de détresse, mémoire de Marius, moments manqués, demi-sourires et pacte démoniaque sur la place des Vosges.

Ce qui est créé par l’esprit est plus vivant que la matière.

#3 Ernestine Artner

Ernestine Artner

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Posté 26 avril 2007 - 05:59

Deuxième mouvement

Et puis ce fut un soir, je marchais dans la nuit, protégée par l’ombre de mon manteau obscur. Les rayons réfractés du soleil sur la terre donnaient à ma peau une candeur plus pâle que nature. C’était une rue à l’aspect familier, une rue déserte où se traînait la nuit, une rue aux pavés bruyants, où j’entendis les mouvements discrets de quelqu’un derrière moi. Il arriva à ma hauteur et marcha un instant à mes côtés, pavanant à mon goût trop près de mon image, et je remarquai qu’il portait le même manteau que moi. Ma peur grimpait en pic, je me sentis liée, mes mouvements se rétrécirent sous l’emprise de la voix de l’inconnu à la large démarche. C’était moi maintenant qui me maintenais tant bien que mal à sa hauteur, tandis que ses pas se faisaient de plus en plus immenses, je le suivis dans cette course folle jusqu’à ce qu’il s’arrête devant un bistrot glauque où grouillaient des humains. D’un accord tacite nous franchîmes la porte, et sa maigre silhouette se fondit dans la foule, et moi, sous l’emprise d’un tressaillement inidentifiable, je n’osais le quitter des yeux de peur de le voir disparaître. Son corps voûté avançait à grands pas, il s’assit posément à une table isolée, et me signifia dans un parfait mutisme que je fisse de même. C’est ainsi que je me suis retrouvée face à lui. Et mes yeux se baignaient dans son demi-sourire, remontant lentement son visage jusqu’au reflet des siens, qu’il tenait précautionneusement fixés plus bas que mon regard. Sa tête s’inclina légèrement vers son épaule gauche, et comme un reflet je suivis son mouvement. Alors son sourire se fit plus ambigu encore et ses lèvres s’entrouvrirent, modelant ce nom qui devait être le sien. Cette nuit là, je soutins l’intensité de son discours sans faiblir, luttant contre la fascination de contempler ses mouvements épars plutôt que de saisir le sens de ses paroles. Il parlait d’une réalité future qui transcenderait le monde, d’un événement issu du passé historique de la terre qu’il allait entreprendre de créer au péril de ma vie. Je lui promis intérieurement une croyance totale. Il semblait regarder à travers moi tandis qu’il se tu, et moi, rongée de ses pensées, je ne su déceler la part que j’avais dans ses propos magiques, et le malaise s’empara de moi. Sa main aux doigts courbs s’empara de la mienne pour me dire au revoir, et tandis qu’il s’enfuyait prestement sans que je n’ose rien faire pour le retenir, je m’aperçus que ses cheveux luisaient d’une façon peu naturelle.

A howling wind is whistling in the night

Fadeur exquise maintenant d’une terne rupture. Seuls mon propre amour et ma peur de rester seule avec le vide de mon désir peuvent motiver ma tristesse infinie. Il n’est rien de plus triste que de pleurer ce qu’on ne regrette pas, rien de plus délétère que de verser des larmes sur un ersatz. Fadeur d’un désir sans transcendance aucune, relégué faute de mieux au seul amour charnel. Je garde de cette histoire l’impression d’avoir cherché dans la putréfaction et la crasse un semblant de plénitude à mon vide béant sans avoir trouvé l’ombre d’une satisfaction. Et le fade être humain qui s’endormait dans mes bras les rêvant ceux d’une autre n’avait pas même une once de diaphanéité fantasmatique. Il restait là, immonde, suintant de puante réalité, satisfait de ses pensées terrestres. Je le relègue, navrée, dans le monde virtuel des t’chateurs d’Internet d’où je l’avais issu. Qu’ais-je dévoyé à ses côtés mon désir d’abstraction ? Le monde d’Internet me semblait beau parce que virtuel, je su qu’il était fréquenté par des êtres autrement plus matériels que mes démons réels, je su qu’un support électronique ne pouvait remplacer la beauté d’un fantasme. Aussi je me remis à chercher en silence un objet que je puisse appeler vous, encore.

Nous y trouverons leur poussière et la trace de leur vertu

Toujours je vivrai seule, je ne serai jamais heureuse. « Je déteste les poètes. Si le bonheur existe, je veux l’avoir pour moi, asociale de nature et de conviction », écrivais-je une nuit lycéenne. J’ai méprisé avec un rire cynique tout ce qui me semblait relever de la fadeur humaine et des mesquineries adolescentes. Maintenant je regrette, et j’avoue me penser parfois l’amie de certains de mes élèves. Cédric ressemble à Raphaël, c’est un fait, à un de ces êtres que j’aurais pu aimer si ma réalité admettait un amour. Tout est fini, il est trop tard, c’est vous, mon éternel absent, qui occuperez pour toujours mes pensées oubliées. Les autres sont des ersatz, croyez que je vous aime.

Il faut écrire relire et réécrire encore ces pensées oubliées jusqu’à n’en plus pouvoir. Il faut supprimer relire et supprimer encore celles des pensées qui n’ont pas la beauté épurée d’une pensée fugitive.
Ecrire pour être lu est une chose vile et mercantile. Œuvre synthétique de mon existence, ces pensées montreront en silence ce dont je me souviens, ce que je pense et aurait dû exister. Je montre ma vie telle qu’elle n’aurait pas dû être ; par perversité masochiste.
La production est une chose atroce. Il faut détruire, détruire jusqu’à la lassitude. Il ne faut rien faire qui ne soit inutile.
Ne jamais céder, jamais à accepter une vie sans transcendance. Ne surtout plus faire confiance aux compliments gluants des humains, qui ne valorisent que l’utile. N’être pas utile. Ne plus réussir, surtout, se souvenir que toute réussite est analogue à cette hypocrisie d’agrégation. Ne pas s’empêcher de penser afin de pouvoir être dupe de leurs aspirations douceâtres. Apprendre à faire semblant.

J’ai longtemps pensé trouver un jour un être avec qui me fondre, qui ne tenterait pas de toute la force de ses machinations sociales de me rendre gaie, aveuglée par la brume des petits et vulgaires plaisirs dont les humains ne pensent pas pouvoir se passer. Ce n’est pas sans douleur que l’on suit une pensée profonde, pensée qui émane des apparences les plus laides de l’être, qu’a priori il eût mieux valu laisser de coté. Cette douleur intolérable qui conduit quelquefois à deux pas de l’abîme est pourtant la chose la plus aimable au monde : pour un instant éphémère elle octroie le droit de ne rien accomplir qui ait un but.
Et l’aplatissement sans borne de mon existence, l’ennui délétère qui m’envahissait encore me donna une raison pour vouloir revoir C, comme on espère retrouver ses anciennes torpeurs.


Saches que mielz vaut ma nerté qu’autrui blanchor ne fait

Je ne veux rien faire qui ne soit délétère ; et pourtant j’aspire à une plénitude parfaite, une grandeur sans limite qui m’élèverait par delà les humains malades de notre ère d’analystes. Il y a un certain charme à la décrépitude, l’oisiveté totale. Il y a un certain charme, délétère mais tenace, à regarder mourir, sitôt imaginé, toute sorte de désir.

#4 Ernestine Artner

Ernestine Artner

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Posté 26 avril 2007 - 06:01

Troisième mouvement

C’était par une nuit glaciale, et la pluie transperçante alourdissait mon ample manteau noir. Je marchais à grandes enjambées sans savoir où j’allais, quand soudain mes pas cessèrent de marteler l’asphalte. Et je me tenais droite, perchée sur mes talons au milieu du trottoir, la hâte que me procurait une attente sans objet me nouait l’estomac. Je fis mon visage aussi impassible que celui d’un teufeur, sous la pluie incessante je scrutai les visages des rares piétons, cherchant avidement un signe inconnu de reconnaissance. C’est alors que je vis s’avancer un être qui cachait son corps maigre sous un manteau étrangement semblable au mien.
Arrivé à ma hauteur, d’un pas sûr sur le béton glissant, il s’arrêta et me fixa à la lueur amère des lampadaires jaunâtres. Et sa bouche aux lèvres sèches se crispa insensiblement. Je sentais la carapace de ma désinvolture se faire trop transparente, et j’eus peur qu’il ne devine l’intérêt démesuré que je prenais à contempler ses yeux noirs délicieusement cernés de rouge, et le reflet électrique de ses cheveux qui n’absorbaient pas l’eau. Son nom sans que je su s’il l’avait prononcé me revint en mémoire, lisiblement inscrit en caractères diaphanes sur mes confuses angoisses ; et mes lèvres brûlaient d’articuler ces sons enfouis dans mon souffle empreint d’une âcre odeur de désir. Le nommer eut été un aveu de défaite et je voulais gagner, aussi je me retins, mais de justesse, d’articuler ces sons aux formes démoniaques. Et je le contemplais tandis que son discours s’étiolait dans le néant de l’espace. Nous nous mîmes en route d’un pas égal vers un lieu éclairé par des néons stridents. Il s’assit en face de moi à une table étroite, et moi en face d’une source de lumière aveuglante qui brouillait ma perception du monde. Il parla d’une force extra-humaine qui pourrait sauver tous les êtres sociaux qui vivaient sur la terre. Moi qui ne pensais pas pouvoir être sauvée je humais ces paroles échappées de sa bouche, odeur mêlée au flou des gestes scandés de ses phalanges osseuses sur l’air dense de la pièce enfumée. Son discours était scandé par le rythme oppressant des syllabes de son nom dans mon esprit perdu, et les ombres de son visage osseux sous l’éclairage-scanner formaient des lignes inquiétantes, semblables aux labyrinthes des circuits imprimés. Je contemplais avidement les atomes de sa peau tandis qu’il parlait, les pupilles dans le vide et l’air désabusé.

Tous mes rêves sont issus d’un unique fantasme, image gravée dans ma mémoire qu’inlassablement je projette sur le monde au prix d’une intense déception renouvelée chaque fois. Des amours je n’aime que l’absence, le vide. Devenus trop humains, les humains qui me touchent me répugnent car leur réalité m’empêche de les faire miroir de mon désir.
Pour un serrement de gorge et quelques larmes retenues à la lecture du nom d’un être redevenu virtuel je donnerais toutes les fades histoires que j’ai vécues. J’adore cette tristesse irrationnelle qui me noue la gorge en pensant que cet être que je n’aime pas pourrait être un réceptacle de mon manque immense. J’aime l’acedia dans laquelle me plonge une jalousie proustienne dépouillée de toute forme d’affection. J’aime mes cicatrices d’amour propre, la douleur de sentir disparaître une partie de moi. J’aime n’aimer que ce qui m’échappe, se fait abstrait, insaisissable, distant. La diaphanéité douloureuse où se meuvent mes amours déchues m’est mille fois plus belle que les histoires banales qui les ont précédées. Tout cela est dit, et le plaisir que j’éprouve à répéter sans cesse des choses ressassées est quelque peu pervers. Pleure, petite, pense que l’être qui t’a appris l’amour et les mathématiques est mort, qu’il t’a trahie comme te trahiront tous les humains malades qui lui succèderont et qui te semblent n’être que de fades ersatz ; retrouve dans leur perte à jamais cette première déchéance, cicatrice béante, éternelle impuissance. Parte en fumée tout espoir, dans ton esprit confus d’enfant traumatisée, de pouvoir être sauvée un jour de tes fades angoisses.

Aux objets répugnants nous trouvons des appas
Chaque jour vers l’Enfer nous descendons d’un pas
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent


J’ai marché, et j’ai marché encore. J’ai marché dans la nuit matinale vers le RER, j’ai marché parce qu’il fallait avancer un peu plus. Lorsque je suis arrivée chez Noé, j’ai vu qu’il y avait toutes les affaires d’Anne. J’ai compris que j’aimais Anne plus que cet homme. J’ai compris ce que je savais déjà. Anne est pure et belle, je ne la corromprai pas au contact de C. C est un homme répugnant, tout ce que ma vie a de laid.

Et même si quelque chose existait, il serait inaccessible à la pensée humaine, puisque vous n’êtes pas là pour m’en montrer le sens.

C est un homme vulgaire, et je rêve d’abstraction. Une autre fois, j’ai couru dans les couloirs rectilignes, il faisait nuit, je courais dans les couloirs qui relient les lignes 8 et 3. J’allais chez C pour assouvir mes envies de débauche, et il m’avait promis d’inviter une autre femme. Dans la rue glauque qui mène jusqu’à son immeuble sordide, une voix issue du fond de l’air glacial s’éleva doucement, et j’en fus troublée beaucoup plus que de raison ; en feignant de ne connaître pas mon nom, l’être que semblait posséder cette voix me dit pour me séduire « vous êtes magnifique », et je me suis arrêtée, sachant que j’avais tort. Je le regardais tandis qu’il me parlait, et sa silhouette osseuse raviva un désir d’absolu enfoui dans ma mémoire. Il me donna un numéro ou le joindre, et son nom sarrasin ; il doit rire à présent en pensant que je ne pourrais malgré toute ma défiance m’empêcher de l’appeler. Et l’ascenseur montait tandis que je me sentais tomber dans les affres de la déchéance. M’imposant sa silhouette trapue C m’ouvrit la porte sur l’image répugnante d’une femme molle au vernis écaillé qui fumait de la drogue sous forme de mégot pourri. Ravalant mon dégoût j’ai caressé la tumeur proéminente que formait son bas ventre, piquée dans le nombril d’une pacotille de mauvais goût. J’ai léché son sexe approximativement rasé, dont les poils naissants semblaient une barbe négligée et la couleur sombre de la crasse. J’ai frotté ma peau blanche encore fraîche du contact des rayons de la lune à sa peau marronâtre, et, parce que j’avais soif surtout de jalousie, j’ai consciencieusement regardé C, sexe dressé, s’affaler lourdement sur elle, j’ai écouté, en tailleur sur le lit qui grinçait, blanche sur le drap clair, son rire niais se transformer en gémissement bestial. Une douleur jouissive proche du vomissement me nouait l’estomac. Et ce fut le matin, je me sentais sale, je me suis silencieusement enfuie non sans un dernier regard à leurs masses épaisses et ronflantes dans le lit souillé, pensant amèrement avoir gît dans ces mêmes bras. La haine de moi-même au fond de moi me pris.

Onirique dégoût des formes imprécises. Dégoût du langage et des pensées humaines. De tout ce qui peut lier une Ernestine Artner à la terre et au monde.
Le beau n’est pas le bien. Le beau diffère du bien comme le démon diffère de son image. Ce qui est beau est l’écart entre ces deux concepts fantasmatiques de bien et de mal. Ce qui est beau est l’écartèlement que subissent les humains entre deux fruits de leur unique imaginaire.

Les gémissements poétiques de ce siècle ne sont que des sophismes.
Mais qu’y a-t-il, se demandait à part soi Ernestine, de plus beau qu’un sophisme ? La vérité n’est que ce qu’on veut bien qu’elle soit, et devant le regard vide de mes fades élèves, j’ai, je l’avoue parfois la nostalgie des dissertations…
Un jour, parce que vos fades élèves sont devenus les miens, j’ai voulu prendre votre place, désespérant de ne pouvoir jamais plus occuper la mienne. Et regardant dans la cour du lycée par la porte vitrée, je contemple un être à l’air trop angélique pour ne pas se pouvoir remarquer parmi les humains alentour. Son regard qu’il détourne pudiquement lorsqu’il croise le mien efface dans ma mémoire le souvenir de celui de Raphaël, jusqu’à ce que ces êtres phantasmatiques atteignent une parfaite Unité. Il me prend parfois l’envie insoutenable de frôler de mes doigts la diaphanéité de ses cheveux bouclés, de refermer la main jusqu’à ce que la douleur l’oblige à incliner la tête et d’aspirer son souffle raphaëlique.

#5 Ernestine Artner

Ernestine Artner

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Posté 26 avril 2007 - 06:03

Quatrième mouvement

Un soir où mes talons claquaient sur le trottoir humide, j’aperçus mon enfer marchant à mes côtés. Depuis combien de temps est-ce qu’il se pavanait si près de mon image ? Je reconnu en lui l’être que j’aurais aimé si ma réalité admettait un amour. Et je baissai les yeux de peur de l’immense pouvoir qu’en le nommant ainsi je lui attribuais. Cet être expatrié du fond de l’univers s’était pour l’occasion revêtu du même manteau que moi pour paraître mon égal, et nous marchions tous deux à pas mesurés, enveloppés de nuit, absorbant par notre obscurité les rares rayons de lune. Son nom me courrait sur les lèvres et brûlait mes pensées, le dire eut été un aveu de défaite et je voulais gagner, aussi me contentais-je de marcher en silence, mon regard braqué sur l’asphalte délabré. Mais mes yeux me piquaient sous mes paupières mi-closes, impatients qu’ils étaient de pouvoir se mirer dans le reflet des siens. D’un accord commun, d’un pas égal et sûr, nous pénétrâmes dans un café chauffé par des humains malades, sa silhouette voûtée se détachait parmi celles des gens, éperdument je le suivis de peur de le voir disparaître, et nous nous assîmes face à face à une table étroite. Là, il me regarda du haut de son implacable assurance, et il tira devant moi le fil de notre histoire future. Cette nuit j’ai soutenu l’intensité de son discours sans faiblir.
Je su dès cet instant que souvent je serai amenée à le voir, et il ne manqua pas d’apparaître sous les traits d’un humain chaque fois différent, et pourtant si semblable. Ses trompeuses apparences ne m’abusèrent jamais, je pu reconnaître sous des traits empruntés tous les demi-mensonges dont il usait pour se faire comprendre, courbes vaporeuses dans le monde alentour. Je voulais le voir mort, haletant pour survivre et expirant enfin dans un dernier sursaut, et dans ce souffle ultime j’aurais trouvé la force de l’aimer sans remord. Mais il se dressait là, surgissant de nulle part ou d’un virage serré, au croisement de deux mondes, enveloppé chaque fois d’une beauté répugnante.
Parfois, la nuit, dans nos grands manteaux noirs, nous parlons d’une réalité future qui transcendera le monde. Alors j’écarquille mes pupilles brûlantes pour observer encore ses prunelles exaltées qui soigneusement évitent mon regard. Et je le suis, aveugle, dans ses froides réflexions qui méthodiquement décortiquent le réel présent et à venir. Dans le silence pesant d’une seconde éternelle il se tait parfois, et moi, percée d’un rayon X, je me sens incapable de lire dans ses pensées, et je me décompose, furieuse qu’un être ait sur moi tant de force, infiniment heureuse de sa seule présence.

Jamais je n’ai été si amoureuse de C que ce jour où je donnais rendez-vous à un homme pour le tromper. Je voulais tromper C non par rancune mais par narcissisme, je voulais élever mon image déchue à mes propres yeux. Aussi, afin de me faire unique et importante, je choisis un jeune homme de 18 ans dont je serais la première femme. Afin de marquer d’un lien analogique le rapport que cette rencontre devait avoir avec C, je choisis un être humain qui étudiait les sciences politiques. Le jeune sarrasin m’attendait sous un porche de la place des Vosges. Il neigeait et j’avançais péniblement sur le sol verglacé, j’étais fort mécontente que ma peau prît une teinte rouge sous l’effet du froid et de cette abominable lumière hivernale. Je remarquai tout de suite sa laideur disgracieuse d’adolescent malhabile. Nous avons marché et je glissais sans cesse. Je trouvais ma démarche insupportablement irrégulière. Nous parlions de ces choses plus superficielles que le silence. Je ne pensais rien et les mots s’étiolaient parfois sous le poids d’une apathie grandissante. Nous marchâmes longuement. Parce que j’avais froid et peut-être par un nouvel et cynique analogisme, j’emmenai l’adolescent dans un café chauffé par des humains malades. Je ne bus pas de vin et mes ongles étaient clairs. Je voulais à présent partir et je pensais à C, je sentais une affection grandissante envahir mon esprit égaré ; parce qu’il n’est définitivement pas dans ma nature de pouvoir me sauver, je finis par rester et emmener chez moi l’horrible être maladroit qui se tenait à mes côtés. Après quelques formalités d’usage que je le laissai accomplir sarcastiquement, il pu connaître pour la première fois les affres de l’amour sans issue ; et il ne comprit pas le sens du demi sourire s’inscrivant sur mes lèvres.

Les circonvolutions de mes pensées confuses ne me laissent aujourd’hui pas de trêve, je suis infiniment triste. Il n’est rien de plus triste qu’une Ernestine Artner abandonnée seule devant sa destinée et ses angoisses innombrables. Il n’est rien de plus triste qu’une Ernestine Artner jouant toutes sortes de rôles qui ne sont pas les siens, devant une classe d’élèves ou une web cam sordide. Et je sens les regards des humains effleurer une image qu’ils pensent être la mienne, qui pourtant fuit toujours et s’étiole au contact de l’air diaphane de décembre.

Alons quiere ce que nos ne trovrons ja

Il faudrait une vie ascétique pour rattraper toute cette décadence, tout cet avachissement. J’ai été infiniment heureuse de danser à nouveau. J’ai fait le plus rigoureusement possible tous les mouvements, et j’ai senti mon corps se laver quelque peu de la crasse qu’il avait accumulé dans les bras de C. C est un homme vil, immonde, répugnant. Je suis un être vil, immonde, répugnant. La politique est à la pensée pure ce que le sexe est à l’amour : du pragmatique et un orgasme éphémère. Les personnes – comme C – qui ne pensent qu’à l’aspect pragmatique des choses sont vouées à l’éphémère vulgarité du monde. L’absolu n’est rien, mais le rien est une des plus belle chose au monde, une chose sublime, le point le plus élevé de ce qui est en bas.
J’ai terni l’image de Raphaël en imaginant des choses répugnantes : même mes phantasmes ont un goût âcre de fade puanteur.

J’errai sur le globe, changeant de place sans changer d’être, cherchant toujours et ne trouvant rien.

Et pourtant, qu’il est doux et lâche de retrouver dans les bras de n’importe quel autre la chaleur des vôtres…

Plus beau que jamais, Cédric, les yeux dans le vague, pensait et semblait suivre le sens caché des choses, tandis que j’expliquais ou tentais de le faire Le Bateau ivre. Je me perdais dans la contemplation de ses cheveux d’enfant, de la ligne cassée de son nez, de sa peau diaphane, son air androgyne légèrement impassible. Parce que je poursuivais l’envie enivrante de sentir les rayons de son regard maritime se tourner vers le mien j’ai prononcé son nom ; lorsqu’il m’a regardé j’ai résisté, non sans peine, à couvrir mes pupilles de mes paupières fardées de noir. Et je me rappelai à cet instant précis mes périples avignonnais, dans les sombres ruelles de cette ville état d’âme, scandés au rythme humide des vers de cette poésie, lorsqu’un mardi matin j’allais, un nœud dans l’estomac, présenter son commentaire à un être qu’alors j’appelais « vous », qui pourtant n’avait rien ou si peu en commun avec vous, mais qui pendant un an a su peupler mes fantasmes adolescents. Et j’exerce à présent le rôle de cette créature vêtue de noir ; le phoenix me semble être des animaux le plus triste.
Plus beau que jamais, Cédric me regardait, et je pensais à la saveur sure de ses lèvres d’enfant, aux frissons de sa langue sur la mienne, lorsque, dans un élan inconsidéré, j’ai franchi suavement l’infranchissable ligne qui séparait nos places, parce que je poursuivais l’envie de goûter un élève comme vous m’avez goûtée, sur le praticable de la salle de gym.
Plus beau que jamais, Cédric baissa les yeux vers le bureau, avec l’air désinvolte des anges. Un frisson électrique tandis que je parlais de panthères à peau d’hommes parcourait les tréfonds de mon corps ravagé du désir d’une mystique étreinte. Je pensais sentir encore le baiser transcendant, et je me pris à regretter de n’avoir pas mené plus avant cette expérience épiphanique. J’imaginais, à l’image de celle de Raphaël, une blonde pilosité sur le bas ventre de cet homme-enfant, je rêvais au demi-regard mêlé de gêne qu’il aurait eu sans doute, si, n’étant pas retenue par la crainte de voir se dissoudre à nouveau un phantasme, mes mains étaient descendues plus bas, suivant la ligne droite de ses vertèbres. Aurais-je dû alors effleurer de mes doigts cette protubérance qui le dissociait inexorablement de l’ange et que je sentais poindre sous ses jeans lors de mon baiser passé ? Aurais-je dû clore les rideaux de la salle 207 et, dans la peine ombre du lycée désert, humer de plus près une parcelle de sa nudité ? Aurais-je dû lui laisser toucher une partie de la mienne, au risque qu’il sentît à quel point elle s’était corrompue au contact de C ? J’aurais voulu alors que ma peau blanche n’eut jamais connu d’autre frôlement que ceux de ses doigts juvéniles. La rancœur de m’être dévoyée dans les bras visqueux que ces ersatz sordides me donna l’idée d’arracher des larmes de douleur plutôt que des gémissements de plaisir à cet être trop pur, et l’espace d’un clignement de paupières je le vis… Ô que ma quille éclate, ô que j’aille à la mer ! J’ai laissé mon ange après le cours s’évader vers un univers qui devait, selon tout principe moral, me rester inconnu ; mais j’ai imaginé que ce soir là notre regard échangé lui reviendrait en mémoire. J’ai espéré qu’il s’adonnât en y pensant à des rêves déchus dont je fisse partie.

L’horrible soif qui me déchire


Et même si l’homme pouvait le comprendre, il serait incapable de le communiquer, puisque j’efface vos paroles par les miennes.

Je n’oublierai jamais l’ultime image de C. Son torse nu rendu plus trapu par l’inactivité émergeait mollement de la couette, sa position voûtée lui donnait presque l’air adipeux d’un humain hébété. Ses yeux qui me fixaient sans pudeur reflétaient mon départ, qui les plongeaient dans une morne apathie ; on eût dit l’air d’incompréhension stupide que prennent parfois mes ternes élèves devant des propos trop abstraits. J’ai voulu dire cette fois-ci à C que je l’avais trompé de façon répugnante pour ne pas avoir à être encore l’exutoire sexuel de ses désirs grossiers. J’ai voulu en finir avec cet être enveloppé de chair, cet être qui se ramollissait de jour en jour, aussi cette fois-ci lui ais-je fait part de mes tentatives sexuelles avec le démon d’Anne. Je n’oublierai jamais son image ultime, car il est devenu soudainement beaucoup plus gros qu’avant, beaucoup plus avachi, beaucoup plus adipeux. Un demi sourire se dessina malgré moi sur mes lèvres au moment de partir. Je disparu. Comble de l’avachissement, il m’envoie deux messages virtuels pour que je le pardonne ; je ne pardonne aucun amour trop pragmatique. Qu’il me soit en revanche pardonné d’avoir voulu faire beau quelque chose d’aussi laid que les amours de C.

#6 Ernestine Artner

Ernestine Artner

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Posté 26 avril 2007 - 06:03

Epilogue

Tout comme vous, peut-être que ces êtres se fondront aux rayons réfractés du soleil qui les ont vu naître, ne laissant de leur réalité diaphane que ce demi-sourire au fond de ma mémoire, si semblable à celui que m’adresse dans les glaces mon reflet sarcastique. Peut-être les chercherai-je encore longtemps après dans un autre réel, ou peut-être à l’instar de celle d’Anne tenterai-je d’effacer les bribes de leur image, en équilibre instable sur un rythme à huit temps, dans une salle tapissée de miroirs. Et mes reflets riront de mes peurs dérisoires, de ma confiance aveugle dans des êtres qui comme vous ne font semblant de parler mon langage que pour rendre leur absence plus amère. C’est avec le plus grand respect pour vous que je me noierai dans la contemplation de cette image, ersatz cachant mal combien ma vie s’étiole au rythme de vos silences, du désir insoutenable de vous revoir, encore.

#7 Baptiste

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Posté 27 avril 2007 - 12:24

salut!

#8 l'iconoclaste

l'iconoclaste

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Posté 27 avril 2007 - 03:06

Epilogue

Tout comme vous, peut-être que ces êtres se fondront aux rayons réfractés du soleil qui les ont vu naître, ne laissant de leur réalité diaphane que ce demi-sourire au fond de ma mémoire, si semblable à celui que m’adresse dans les glaces mon reflet sarcastique. Peut-être les chercherai-je encore longtemps après dans un autre réel, ou peut-être à l’instar de celle d’Anne tenterai-je d’effacer les bribes de leur image, en équilibre instable sur un rythme à huit temps, dans une salle tapissée de miroirs. Et mes reflets riront de mes peurs dérisoires, de ma confiance aveugle dans des êtres qui comme vous ne font semblant de parler mon langage que pour rendre leur absence plus amère. C’est avec le plus grand respect pour vous que je me noierai dans la contemplation de cette image, ersatz cachant mal combien ma vie s’étiole au rythme de vos silences, du désir insoutenable de vous revoir, encore.



preambule ou testament, en tout cas evasion ambigue et dissecation de la complexite de l'esprit humain - j'aime cette abnormalite
l'iconoclaste

#9 l'iconoclaste

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Posté 27 avril 2007 - 03:24

preambule ou testament, en tout cas evasion ambigue et dissecation de la complexite de l'esprit humain - j'aime cette abnormalite qui s'exprime dans l'acedie. vous demontrez bien que la fille de l'acedie est l'evasion vers les choses defendues car personne ne peut rester longtemps sans plaisir en compagnie de la tristesse.
l'iconoclaste



#10 Ernestine Artner

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Posté 27 avril 2007 - 08:17

Merci infiniment de m'avoir répondu. Il n'a pas été facile pour moi de faire figurer ce texte sur un site internet. Je ressens le malaise ambigu d'un exhibitionniste.

#11 ornithorynque

ornithorynque

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Posté 27 avril 2007 - 10:31

Merci infiniment de m'avoir répondu. Il n'a pas été facile pour moi de faire figurer ce texte sur un site internet. Je ressens le malaise ambigu d'un exhibitionniste.



Ernestine,

A vous qui parlez de mourir "de soif auprès de la fontaine", je leve mon verre-plume, a vous ainsi qu'aux innombrables perles lyriques partagees ici, dans cette fascinante translucidite...

Orni

#12 Invité_Tyi_*

Invité_Tyi_*
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Posté 28 avril 2007 - 12:41

Pensez à lire Le Moine de Lewis traduit par Antonin Artaud sinon je relève de votre texte une répétitive autôlatrie - lassive peut-être, poncive. L'idée y est pourtant.

#13 Ernestine Artner

Ernestine Artner

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Posté 11 décembre 2007 - 05:23

Pensez à lire Le Moine de Lewis traduit par Antonin Artaud sinon je relève de votre texte une répétitive autôlatrie - lassive peut-être, poncive. L'idée y est pourtant.


Je l'ai lu sans voir le rapport
auto idolâtrie... mais quel écrivain sincère ne l'est pas? A quoi penser si ce n'est qu'à soi, et que pense-t-on du monde si ce n'est au travers de son propre regard?
Poncif, j'accepte, je suis contre l'originalité comme critère artistique exclusif qui règne à notre étrange époque.