
Parce que l'orange.
#1
Posté 16 juin 2015 - 10:21
que tu dénoues ta robe
comme j'épluche une orange...
Entre mes doigts sa peau, fine et douce,
l'iridescence juteuse et collante,
sucrée.
acide.
amère.
Eloquence de la salive -
tremblé dans la chaleur nocturne -
chevilles de sable sanguines,
sous tes huit ans assise
parmi les décombres. J'en rêve encore
chaque nuit,
de ce crachat sur mes mains
(sur mes mains d'homme je crois peut-être
insignifiant )
et de ce hurlement inaudible
qui arrêta mes pas vers toi.
Et puis plus rien. Figée. Silence d'opossum :
plus personne
sous le regard vitreux,
dans les os sarcophage d'où suintent
l'angoisse immense, le reproche écoeuré
à ces relents immondes d'enfance
auxquels j'osais encore prétendre.
Comprendre fut comme un glaive
et le savoir, sans rémission,
cancer de chaque nuit.
Et je voudrais te dire que l'aube se lèvera
que le monde sera beau sous ce premier soleil,
orange éblouissante d'où gicle la rosée
carmine... mais qui y croirait ?
Et je voudrais que tu prennes ma main
mais les mots harmattan m'étouffent
(insignifiants)
comme la peau d'un quartier d'orange
amère
avalé de travers :
indécence de la salive
qui jamais n'efface les décombres de la nuit,
même pas en rêve.
#2
Posté 17 juin 2015 - 06:09
l'orange au goût d'amère jouvence.....
fruit déliquescence gorgé de latence
qui fait d'onirisme
le vêtement du sinistre, peau
porte-à-faux de l'innocence
- Cyraknow, M. de Saint-Michel, Anwen et 1 autre aiment ceci
#3
Posté 17 juin 2015 - 07:25
Une orange en forme d'anti-madeleine-de-Proust, dont l'amertume ressasse sans fin les errements de la vie. Une orange en coulis de vers si suggestifs qu'on les croirait écrit de son jus perlant comme des gouttes de sang à la surface d'un souvenir où l'âme n'ose se voir. Merci Anwen pour ce poème admirable tant pour la richesse de sa forme que son immense pouvoir suggestif !
- Cyraknow, M. de Saint-Michel, Anwen et 1 autre aiment ceci
#6
Posté 19 juin 2015 - 01:27
Je crois que je vais voir les oranges tout autrement .
une belle lecture qui nous met le jus à la bouche.
#7
Posté 19 juin 2015 - 08:13
J'espère bien mille fois que NON.
#8
Posté 30 juin 2015 - 08:18
Une science humaine, la poésie ? Oui, sans doute, qui cherche loin dans les replis de la conscience.
Humain, est-ce qu'on n'essaie pas tous de l'être ? Plus ou moins bien et à tâtons. Ce n'est pas ce qu'il y a de plus facile, je suppose. Les murs s'élèvent malheureusement plus vite qu'ils ne se détruisent.
#9
Posté 30 juin 2015 - 09:04

#10
Posté 30 juin 2015 - 10:40
Très beau, Anwen. Je crois que, comme Omillou, je ne regarderai plus les oranges de la même façon...
#11
Posté 01 juillet 2015 - 06:15
Mais surtout, garde les oranges telles qu'elles devraient être !
#13
Posté 14 juillet 2015 - 04:27
Merci
Un souvenir mêlé au début du poème,
celui de la Sanguine de Prévert
puis d'autres images, que j'aime
#14
Posté 16 juillet 2015 - 12:21
Bon, je vais mettre ce bon vieux Jacques dans mon sac : c'est pas la première fois que je constate un manque sur TLP. ^