Le chant des rues (meurt)
Regarde, la rumeur est là,
Vive et frivole,
Preste et courant de ci, de là,
En ronde folle.
Aux lèvres des bavards, bruissant,
Elle circule.
Elle enfle et va, son chant croissant,
Nous manipule.
On la transmet en un murmure,
Bouche à oreille,
Comme une information bien sûre
Et sans pareille.
La rumeur tourne au gré des vents,
Véhiculée,
Prend de l’ampleur, grossit toujours,
Enjolivée.
De la liberté d’expression,
Rumeur abuse,
Donnant la très nette impression
Qu’elle s’amuse.
Rien n’est sacré pour la rumeur,
Qui s’en balance :
Faits privés, ou peines de cœur,
Amour, finance...
Un beau matin, soudainement,
O cataclysme !
Elle atteint précipitamment
Son paroxysme.
Dans le journal télévisé
Et dans la presse,
Elle décoche un trait visé
Avec justesse.
Le pauvre sujet, sans appui,
Y perd la face ;
Mis à mort, il reçoit sur lui
Honte et disgrâce.
Puis c’est un silence absolu
De cathédrale :
Le drame est enfin résolu.
Fin du scandale.