La potion
Sans plus savoir ce que l'on fête,
Il inonde son verre de champagne,
Le cœur à l’ivresse,
Et le corps tout à son service.
Des yeux il dévore sa coupe,
Étourdi d'être déjà moins seul,
Le ridicule n'est même pas dissimulé,
Aucun apparat ne résiste au vertige.
Seulement il y a trop d'espoir dans ce verre,
Aucune proportion,
Cela ne pourra pas fonctionner.
Les vertiges feront vaciller sa légèreté,
Sa chute est évidente.
Il n'ignore pas cela,
Mais déjà ivre,
Il vois double ou parfois,
Oublie qu'il voit.
C'en est pour lui la preuve,
La réalité n'a aucune importance.
Après ce verre et quelques autres,
Il avait encore perdu la partie.
Mais soyons certains qu'il retentera sa chance,
Comme on lance des dés,
Sans même être sûr d'y croire.
Il versera d'autres fois,
Dans d'autres verres,
Toujours trop d'espoir,
Happé par la même volupté éphémère.
Alors il boit,
Jusqu'à s'en noyer les os,
S'en couper enfin le souffle.
Son horloge est passée de l'or au plomb,
Par l'alchimie des nuits blanches,
Et des jours effacés.