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(Note de lecture) Mathieu Nuss, "Ainsi ces crochets X", par Bruno Fern


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Posté 22 septembre 2017 - 09:17

 

6a00d8345238fe69e201b8d2ad2bec970c-75wiAuteur de plusieurs ouvrages et critique (il participe activement au Cahier Critique de Poésie1), Mathieu Nuss dirige par ailleurs larevue*2. Dans ce livret à la facture sobrement soignée, il présente une succession de brèves proses étroitement mêlées aux dessins de lâartiste Petr Herel3, constitués de lignes reliant des traces de brûlures du papier. Ces deux Åuvres ont en commun dâassurer une continuité tout en révélant ses points de rupture et le caractère à la fois affirmé et instable de ces formes â rejoignant en cela lâune des définitions que Jude Stéfan donnait des poèmes comme « ruines de mots résistant à la Ruine »4 â est régulièrement évoqué au long du texte : « Langue épluchée dans sa course au dénivelé, qui est aussi sa faillite. » ou « Par quoi tenus à distance ? les insectes muets et xylophages sont bien visibles dans les poutres de lâécrit. » En effet, ainsi que lâindique le titre, lâauteur tente de faire tenir ensemble des fragments de ce qui échappe pourtant fondamentalement à la fixité, en particulier à celle dâun sens qui se prétendrait univoque : « Des crochets X habitent mes murs, qui nâaccrochent rien dâautre que leur maigreur, nul souvenir, nulle représentation, nul nul, filament dâampoule grillé net. »

Si lâon en croit la citation dâHenri Michaux mise en exergue (« Le toucan, dans sa cage, depuis des mois, le problème de sa cage il lâa débattu dans sa tête. Mais nous, quâest-ce quâon sait ? »), ce quâessaie de fixer Mathieu Nuss comporte indéniablement une dimension existentielle qui est dâailleurs sensible dans le fait que certaines notations pourraient être issues du journal intime dâun individu attentif à tout ce qui lâentoure dans les moindres détails : « Mouche dont la symétrie du corps se trouve lavée de lumière â plus agréable pour lâÅil-légiste. » ou « Présent plat, calme plat â à lâexception de la petite galaxie spirale soulevée par la baignoire qui se vide. » En outre, ces observations et sensations diverses sont parfois entremêlées avec des considérations dâordre réflexif. Cela dit, les échos et les nombreuses reprises témoignent du travail de composition de ces différentes notes â terme qui sâimpose dâautant plus que les références musicales, comme câest souvent le cas chez cet auteur, ne manquent pas : « Attendant de trouver oasis ou chaussures à leurs pieds, les notes de Webern errent exemplaires. » ;  « Le violoncelle de la 1ère suite de Britten (lâopus 72), tout en courbes, en soleils agiles, tout en clairvoyance malgré la cosse qui enserre la déclamation, déplace avec lui les déplacements de lâanonymat. » ; « Dégoûtée et même renonçant à ses intentions, une langue peut être musique. Grande Ourse du plein août. Quand filent les particules du TGV, les têtes des passagers en glissandi. » ; « Lâaigu des tablas. Les ardeurs douchées, comme un spasme de lucidité entre deux cymbales. » Il sâagit donc bien ici dâune véritable suite aux multiples tonalités.

Bruno Fern


P.S. : On peut commander ce livre en adressant un chèque à lâordre de lâéditeur : julien nègre éditeur 57-59 rue Ramey 75018 Paris

1.http://cahiercritiquedepoesie.fr/
2 http://larevueasterisque.tumblr.com/
3 https://en.wikipedia...wiki/Petr_Herel
4 Stances : ou 52 contre-haï-ku, Le Temps quâil fait, 1991.

Mathieu Nuss, Ainsi ces crochets X, dessins de Petr Herel, julien nègre éditeur, juin 2017, 24 pages, 15 â¬

 

 

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