Je n'ai pas du travail, enduré la souffrance,
Je n'ai pas patienté les trois quart d'une année,
A sentir, chaque mois, changer mon apparence
Et bien que radieux, me savoir condamné,
Mon ventre n'a jamais été votre repère.
Je suis père.
Je n'ai pas partagé mes signes indigènes,
Le contours de mes yeux, la couleur de ma peau.
Tous ces échantillons bien cachés dans mes gènes,
Qui restent confinés dans leurs vieux entrepôts.
Mon patrimoine intime oscille et désespère.
Et pourtant, je suis père.
Mais ceci, voyez-vous, n'a que peu d'importance.
Nous avons, croyez-moi, bien plus à partager
Que l'accumulation de vagues ressemblances,
Qui font que je suis "vous", en beaucoup plus âgé:
Ces longues années à guetter votre présence.
J'ai maudit votre absence, à présent je l'avoue.
Devant l'orphelinat, cette ultime impatience
Et l'intime évidence au premier rendez-vous.
Ces nuits à dissiper vos profondes angoisses,
Le sanglot qui s'efface au baiser confortant,
Ce "papa" laconique en guise de préface,
Et pour guider vos pas, ma paume qui se tend.
Ces moments singuliers qu'impuissant on espère,
Et qui me font clamer : "c'est certain, je suis père".