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Le sein de la terre »


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Posté 16 janvier 2019 - 04:37

« Nous avons toujours à connaitre plus loin où rien n'a d'histoire. Si nous nous unissons à l'infini de la mer nous donnons corps à cet autre au-delà. » Les horizons sont ouverts dans ce beau recueil de Marilyse Leroux illustré par Véronique Durruty. Les chemins qui y mènent sont d'amour et de voyage.

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Les Parisiens connaissent bien la librairie La Lucarne des Ecrivains (115 rue de l'Ourcq, 75019 Paris) où Armel Louis accueille régulièrement depuis des années de nombreux auteurs pour des rencontres et des lectures, sans oublier les expositions. La librairie a fait récemment un pas de plus au service de la littérature en créant une maison d'édition. La nouvelliste et poète Marilyse Leroux et la plasticienne et photographe Véronique Durruty viennent d'y publier un recueil d'une remarquable facture, dont chaque poème est illustré en regard par une peinture, un dessin ou une aquarelle, « Le sein de la terre ».
Le livre a obtenu le prix Maram-al-Masri, décerné pour la première fois.

Outre le dialogue par lequel les mots et les images légères se font échos, l'auteure emprunte (ou invente) deux voix, celle d'une femme et celle d'un homme â tous deux s'exprimant à la première personne â qui s'y croisent et s'y mêlent, dont celle de la femme imprimée en italique. Mais peu importe au fond qui est qui : l'auteure sait prendre la place de l'autre et il s'agit moins ici d'un dialogue que d'une partition où les chants se fondent et s'épaulent.
L'amour et le voyage en sont les deux thèmes principaux et y brodent ainsi une sorte de « voyage vers l'autre » empruntant tous les chemins du couple, du désir à la séparation, à la solitude, de la sensualité à la distance liée aux différences et peut-être aux malentendus. L'écriture de Marilyse Leroux, elliptique, à la fois abstraite et appuyée sur les références concrètes au monde réel, est en somme en quête de « ce lieu secret / où ne plus chercher / qui de l'amour ou du voyage / nous fait avancer ».
Elle prend parfois l'allure de maximes : « Il est des rencontres possibles au sein de l'adieu », nous confie la poète, ou encore, joliment, elle nous dit : « les lieux d'arrivée / sont ceux d'où l'on peut repartir ». On le voit, la justesse et l'élégance sont au rendez-vous.
Amour perdu ? Retrouvé ? Les deux peut-être. Jamais éteint en tout cas : « il faut partir / sans se détourner du feu / qui consuma nos corps ». On n'en saura pas plus, sinon que « notre amour voyage / au plus haut de nous ». Mais là encore, l'anecdote importe peu, l'essentiel tient au chant que trament ces vers fluides et lourds parfois de souffrance (« aujourd'hui je ne sais plus si tu es ma vie ou bien ma mort », ou encore : « je naviguais sur trop de larmes »), comme ils savent être lumineux dans la joie, l'évocation du plaisir. Reste que l'amour, comme l'autre, n'est jamais acquis : « nous nous aimons comme des noyés », confie le poème.
Certaines images, certains moments d'une écriture qui cherche et trouve souvent « la brèche où se glisser » dans nos intimes intuitions du monde restent parfois un peu énigmatiques. Sans cesser pour autant d'envoûter et d'éveiller des polysémies, comme ici : « Va / ne crains rien des jeux de la mer / aimer a dû naître dans les vagues / entre deux destinations ». Ou encore : « Ne t'étonne pas / ton regard dans la nuit / sera plus grand que ce qu'il voit ». C'est que « les mots les images / respirent un amour / plus fort que nous ».
Enfin les exhortations sont d'une belle vitalité comme celle qui recommande d'« aimer le temps où tu es », ou cette autre : « Ne coupe pas ton âme / au tranchant des monnaies ». Elles ouvrent l'appétit car « la vie commence / où tu la regardes / grain de raisin sur la grappe / promesse d'eau sur la langue ».
Et puisqu'il s'agit du thème du Printemps des poètes de cette année, terminons par une évocation de la beauté, d'une énergie vitale :

« Va ne crains rien
La beauté te rattrapera
Le long de la route
A la lisière d'un bois
D'une prairie ou d'un lac ».

Un recueil à ne pas rater !

(208 pages. 19.90 euros. La Lucarne des Ecrivains, 115 rue de l'Ourcq, 75019 Paris)

Michel Baglin

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