Les derniers poèmes que j'ai écrits n'étaient vraiment pas bons. Ils suppuraient, laissant couler de mes doigts comme de la graisse l'ennui et la dégradation de mes neurones. Cela dit, je ne regrette pas de les avoir produits car ils m'ont permis de me rendre compte que les poèmes précédents étaient assez mauvais aussi, car ils étaient "du même tonneau", comme on dit.
J'ai essayé de remonter dans le temps. Plus jeune aussi, j'avais improvisé des vers que j'avais gardé dans un sac de plastique vert. Les feuilles étaient froissées et les vers excécrables. Je me suis rendu compte que tout cela tournait autour d'une même chose, qu'on pourrait dire une ironie sérielle. Ironie, parce que c'était vraiment affreux. Sérielle parce que c'était atroce. Or, j'avais bien eu la velléité d'écrire des choses, en amont de cette malheureuse obsession, en un temps où j'étais comme qui dirait libre de ma pensée. Mais j'avais tout détruit.
Qu'importe ! Cela devait être médiocre, franchement médiocre. Car il est aussi absurde de s'enfermer dans les dédales d'une idée fixe que de croire à la volubilité immodérée de ses esprits.
Heureusement, un commerce d'éponges a ouvert non loin de chez moi et je crois bien qu'on y cherche de bons vendeurs, des gens qui ont du bagout. Je me garderai bien de leur montrer mes poèmes, cela dit. D'autant qu'ils ont pris l'eau. Enfin, je ne sais pas si c'est de l'eau.
En fait, ça suppure toujours.