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(Anthologie permanente), Le Bouquet inutile, de Jean Pellerin


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Posté 17 février 2020 - 10:16


6a00d8345238fe69e20240a50ce921200b-100wiLire cette présentation de Jean Pellerin (1885-1921)

Sonnet

Je veux courir en Bièvre et je boucle mes guêtres
Mais, quand je poursuivrai lâase ou la perdrix grise,
Viendrez-vous pas ici chasser la Peine, assise
Au seuil empoussiéré de la maison sans maîtres ?

Je vous réserverai â vous connaissez les aîtres â
Cette chambre carrée où vous plaît une frise
Multipliant la nymphe hostile à lâentreprise
â Où le rosier grimpant a cerné la fenêtre.

Vous aurez le miroir qui sait votre visage
Depuis longtemps déjà, le lit, le paysage
Et le jardin noyé, ce soir, de brume basse.

Vous aurez le verger, les raisins de septembre.
Et la maison, le parc, la cueilleuse, la chambre
Enchanteront mon rêve aux loisirs de la chasse.

*

Quotidiennes

            À Tristan Derème.

Câest vrai, jâaurais pu devenir
            Fabricant dâélégiesâ¦
Je ne sais que me souvenir
            De notoires orgies.

Mais je veux écrire â à Paris,
            Un roman exotique.
â ? â Certes, vous aurez des houris
            Dansant sous le portique !

Je peindrai lâeau, le ciel, le port
            Et le désert « immense »
À lâheure grise où lâon commence
            À crier Paris-Sport.

*

Veneris Dies

Femme de deuil et dâopprobre,
Je veux tes mains pour mes fièvres,
Tu sauras mâouvrir les lèvres,
Comme tu mâouvres ta robe.

Que nous ont-ils dit là-bas ?
Il pleuvait de la lumière,
Et câétait la coutumière
Fête. Mais notre sabbat

À nous câest la lampe jaune,
Déesse de cette alcôve,
Et câest ton corps frais et fauve,
Et câest ta royale aumône.

Câest ce rectangle noir
Que découpe la fenêtre,
Et câest ce que jâai fait naître
De douleur â pour moi â ce soir.

*

Bohême

IV


Tu veux un bouquet de jonquilles,
      On te lâaccorde et lâon
 Danse autour de lâaccordéon.
       Famuche joue aux quilles.

Dodo cessant dâêtre rétif
      Tend la peau de son rable
Afin quâun tatouage admirable
      Azure un cÅur votif.

Ce cÅur quâà droite de la flamme
      Un trait vient de percer
Réponds, Dodo, quel nom de femme
      Y feras-tu tracer ?

Veux-tu Méloche, la Sans-Honte,
      La Rose du Poteau,
Et devrais-je, sous ton couteau ?â¦
      Dansons. Lâaurore monteâ¦

*

Octobre !


Octobre ! Une chambre dâhôtelâ¦
Sur la douteuse courtepointe,
De quels baisers mâas-tu pas ointe,
Ô Douce ? Je le vois bien tel,

Ce garni⦠Le désir mâaccointe
De votre corps, brumeux pastel,
Près du mien, suc brun de bétel,
De ma bouche à la vôtre jointe.

Un jour⦠et ce nous fut assez.
Mais, de ces souvenirs tassés,
Des joies que nous avons connues,

Ne gardez-vous que le décor,
Dites ? Jouerons-nous pas, encor,
À Mesdames-les-Toutes-Nues ?


Jean Pellerin, Le Bouquet inutile (1923), recueil poétique mis en forme par Francis Carco, réédition en 1954 avec des notes d'Yves-Gérard Le Dantec.



Victor Hugo

Le vieillard parle

(Légende des Siècles)

Vous voici réunis, souverains dâItalie,
Ducs, papes, assassins, monarques de folie
Et de crimes, soudards efféminés et bas.
Fiers dans les trahisons, lâches dans les combats !
Te voilà, Quésacco, baron de frittomiste,
Qui nâayant pas su prendre Orgone à lâimproviste
As fui piteusement devant quatre bâtons.
Mes maîtres, vos palais qui portent aux frontons
Des devises dâorgueil, soulevant les huées,
Sont remplis de gitons et de prostituées.

(â¦)

(Première strophe dâun pastiche de la Légende des Siècles, Le copiste indiscret de Hugo, Vigny, Barbey d'Aurevilly, Albert Samain, Rimbaud, Jules Renard, Anatole France,... etc., pastiches (1919). Paris : A. Michel, [1919].)

Choix et présentation de Chantal Bizzini



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