Françoise Ascal publie Variations-prairie, suivi de Mille Étangs, Lettre à Adèle et Colomban aux éditions Tipaza, avec des peintures de Pascal Geyre. Lire cette note de lecture.
Après trop de jours sans éclat, la lumière est revenue. Une lumière de fin d'été. Basculement sensible bien que difficile à cerner. Ce sont d'imperceptibles signes, une blondeur sur les fougères, des variations dans les masses des arbres couvrant les collines alentour, une fraîcheur nouvelle.
Aujourd'hui il y a dans l'air quelque chose d'un bleu mythique. Un bleu de myosotis, un bleu adorable rêvé par Hölderlin avant qu'il ne sombre dans sa nuit.
Fugace, la joie.
Née d'un accord soudain.
Ne plus être séparé.
Appartenir.
Une vitre me sépare de la prairie. Le froid m'a contrainte au repli. Voir derrière une vitre est une manière différente de voir ce qu'on croit connaître. Privée de ses odeurs la prairie se désincarne. Elle flotte comme une image de prairie, sans attache. Elle et moi sommes séparées. Mon corps entre en solitude.
Le monde est plus petit lorsque la plante du pied
n'est pas nue
lorsque la joie ne monte pas depuis les racines
surchauffées
lorsque l'herbe n'est qu'un tableau
miroir du désir inassouvi.
Deux cent vingt kilomètres carrés de terre où affleure
le grès rose
huit cent cinquante étangs, plus peut-être
lourd de son histoire
lourd de ses blocs erratiques, de ses noyés, de ses
insoumis
les itinéraires tracés n'y pourront rien
sous les eaux vives les eaux dormantes
sous les fougères genêts épicéas
le plateau résiste
tour à tour noir, gris, bleu, brun cendré, vert ocre rose
rose des crépuscules
versant lentement dans la nuit de l'origine.
Françoise Ascal, Variations-prairie, suivi de Mille Étangs, Lettre à Adèle et Colomban aux éditions Tipaza, avec des peintures de Pascal Geyre, éditions Tipaza 2020, 136 pages. Format : 21,5 x 22,5. Tirage : 200 exemplaires sur papier Rusticus 120 gr, dont dix exemplaires de tête enrichis dâune Åuvre originale du peintre, pp. 28, 34 et 67.
Voir l'article complet