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(Note de lecture) Mathilde Vischer, Comme une étoile tombe dans la nuit, par Stéphane Lambion


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Posté 12 août 2020 - 09:49

 

6a00d8345238fe69e2026be407db3b200d-100wiUn livre est une forme qui prend naissance sans connaître à lâavance les contours qui seront les siens. Le texte se construit pièce par pièce, prend du volume ; enfin, il naît. Câest ce qui frappe en premier lorsquâon ouvre Comme une étoile tombe dans la nuit de Mathilde Vischer : câest un livre qui naît, qui est en gestation jusquâà la dernière page et qui ne sait pas qui il sera avant de voir le jour.

Ni poésie, ni roman, ni récit poétique dans le sens courant du terme, il sâagit plutôt dâune suite de fragments en prose plus ou moins liés entre eux, sans début ni fin, et où seul compte le temps de la création. Au fil des pages, des personnages apparaissent et tissent une toile dâarrière-fond où lâon doit se perdre ; les voix qui la composent se mêlent tant et si bien quâelles ne forment plus quâun chÅur unique : la voix de la naissance.

Il sâagit, dans ce livre, de reconstruire un espace intérieur, une identité fragile (celle de la voix principale du texte) tout en créant une seconde identité (celle de lâenfant de cette voix). Ces deux mouvements vont de pair et se fondent dans le tout quâest la création littéraire, donnant ainsi lieu à une triple naissance : celle du livre en tant quâobjet ; celle de la voix poétique en tant quâunifiée et solide malgré sa fragilité ; enfin, celle de lâenfant qui comme une étoile tombera dans la nuit.

À travers un lyrisme puissant et une écriture finement ciselée, le livre accède à cette triple naissance qui, tout en étant symbolique et métaphorique, sâancre dans un contexte social bien défini : celui dâun pays meurtri â le pays de Taman et de Jeiran â où la vie est pourtant encore possible. Derrière la douleur et la tristesse qui traverse certains fragments du livre, câest toujours lâespoir qui se cache et qui finit par lâemporter, comme lâouverture dâun futur dans le présent.

Stéphane Lambion

« Hier soir mon jardin était dense, profond, comme serti de noir et de désir. Je lâai regardé, jây suis entrée comme dans un lac tranquille. Jâai eu besoin de le voir encore, jâai besoin dây revenir chaque jour, même si je ne sens quâà peine ses odeurs et ne peux toucher ses arbres, ses pétales, ses murs. Il est lâhorizon que je respire et qui me ramène à cette trace intérieure. Jây reviens chaque jour et à chaque fois jâai besoin de le vérifier, de vérifier sa présence, son pouvoir sur moi, sa puissance changeante au fil des saisons. Je vérifie ainsi chaque lieu dans lequel je ne suis plus ; je le vois, il change mais il est toujours là, câest bien, il est là, alors je peux le réinscrire dans le présent, le recouvrir des couleurs et du temps que je suis. » (p. 11)


Mathilde Vischer, Comme une étoile tombe dans la nuit, Samizdat, 2019, 116 p., 25CHF
Sur le site de lâéditeur



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