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(Note de lecture), Gérard Haller, Menschen, par Isabelle Baladine Howald


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#1 tim

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Posté 13 novembre 2020 - 10:08

<p class="blockquote MsoNormal" style="line-height: 125%; margin-left: 40px; margin-right: 40px; text-align: center;"> </p>
<p class="blockquote MsoNormal" style="line-height: 125%; margin-left: 40px; margin-right: 40px; text-align: center;"><span style="font-size: 12pt; line-height: 125%; font-family: 'Garamond','serif';"><strong>Jusquâà Samuel</strong><em><br /></em><br /></span></p>
<p class="blockquote MsoNormal" style="line-height: 125%; margin-left: 40px; margin-right: 40px; text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; line-height: 125%; font-family: 'Garamond','serif';"> <a class="asset-img-link" href="https://poezibao.typ...6fa7c200b-popup" onclick="window.open( this.href, '_blank', 'width=640,height=480,scrollbars=no,resizable=no,toolbar=no,directories=no,location=no,menubar=no,status=no,left=0,top=0' ); return false" style="float: left;"><img alt="Gérard Haller" class="asset asset-image at-xid-6a00d8345238fe69e20263e976fa7c200b img-responsive" src="https://poezibao.typepad.com/.a/6a00d8345238fe69e20263e976fa7c200b-100wi" style="width: 100px; margin: 3px 15px 5px 5px; border: 1px solid #969696; box-shadow: 8px 8px 12px #aaa;" title="Gérard Haller" /></a>Déjà, comment oublier cette fin lancinante :<br /><em>« ossias/oskar/ossip/ossna /ottla /ottla /ottla/ottla â¦â¦. »</em> qui clôt <em>Menschen</em>, la seconde partie du livre éponyme de Gérard Haller qui paraît chez Galilée. Je le sais, je lâai lue à voix haute avec des amis et Gérard Haller lui-même. Avoir eu « <em>ossias/oskar/ossip/ossna/ottla/ottla/ottla/ottla » </em>dans sa bouche, câest inoubliable. On ne peut pas avoir la même bouche quand on a lu ces noms, cette mélopée de noms, tous juifs, tous déportés, tous appelés voire gueulés très tôt le matin dans le gel, appelés oui mais tous disparus, la bouche a essayé de dire dâune voix ferme mais nous finissions en murmure sur le nom dâOttla - la sÅur de Franz Kafka. La bouche se tordait de douleur en son for intérieur, les yeux refusaient les larmes, le cÅur se brisait tandis que nous nous tenions debout, ensemble, <em>zusammen</em>, comme dit F quand nous avons du chagrin, à lire, ces listes quâon avait pu voir déjà sur des mémoriaux (Paris, Yad Vashemâ¦) ou dans des livres (Sarah Kofman ou André Schwartz-Bart, sans parler de tous les <em>Memorbuch</em> (livres de la mémoire), tous les <em>Yisker-bikher </em>dont parle Robert Bober en yiddish qui ne traduisent quâune chose <em>: « puisse lâEternel se souvenirâ¦. »<br /></em><br /><em>Menschen</em> commence par <em>heim</em>, la première partie (<em>Heim</em> étant la maison, le chez soi, en langue allemande, tout près de là où vécut Gérard Haller enfant). Évocation des <em>images intranquilles du pays natal</em>, champs de lâenfance⦠La première photographie est une ligne de train et une clôture, et <em>Heimweh</em> (mal du pays, nostalgie) est inscrit dans la photographie.<br /><em>« On dirait lâimage se clôt/et lâimage se déclôt qui nous tenait/ensemble ».</em> Toute la thématique de la poésie de Gérard Haller est là, lâautre, la clôture (de dieu), lâenclos. Séparé de lâautre, dans ce qui autrefois lâintime. Lâeau du natal, lâeau maternelle vers laquelle toujours lâancien enfant veut retourner, appelant <em>Mutter</em> (la mère) avec la <em>Mutter</em>/<em>Sprache</em> (la langue maternelle). La mère et la terre sont en quelque sorte les mêmes, un perdu qui sâétend vers lâavenir, sous un ciel vide où lâabsence hölderlinienne du dieu nâen finit pas de résonner. « <em>Mes parents étaient encore en vie/câétait lâéternité/ils me racontaient »</em>, ce qui déjà était avant, toujours avant, eux aussi avaient leur <em>Heim</em> et leur <em>Heimweh</em>. Ils ont été jeunes, ils ont été nus dâamour lâun devant lâautre, eux aussi. Lâange présent dans tous les livres de Gérard Haller est un veilleur. La syntaxe allemande ou dialectale (du Nord de lâAlsace) défait constamment le propos, soutenant ce qui sâest perdu, mais aussi ce que lâon espère, le retourne constamment<br />On sent ici ce <em>commun des mortels</em> propre à Gérard Haller, sa recherche du <em>Mensch</em> (lâhomme comme lâespèce humaine, ainsi lâinoubliable livre de Robert Antelme).<br />La nudité amoureuse si belle soit-elle expose aussi la fragilité humaine de la nudité dans les camps, ce basculement toujours possible⦠Dans le village on évacue, on compte les morts, la guerre est là, on passe de lâunité dâune famille à celle de la communauté humaine qui ouvre sur le second texte <em>Menschen</em>.<br />Mélopée à nouveau, des noms, une liste de noms autour du mot <em>Mann</em>, homme ou <em>Gott, </em>Dieu, des prénoms, des humains, féminins, de toutes les nationalités pour arriver à Mensch, un nom de famille courant mais aussi le mot humain, entrecoupé de <em>Tot</em> mort, « <em>personne pour dire le mensch » </em>ou<em> nichts, </em>rien, toute la visée de la « solution finale », anéantir, anéantir, barrer les noms, tuer lâorigine, éradiquer un peuple, un Mandelstam Ossip ou un inconnu.<br /><br /><em>« mensch françois<br />mensch franz<br />mensch franziska<br /></em><em>mensch frayda<br />â¦<br />mensch geronimo<br /></em><em>mensch giacomo<br />mensch ginette<br />mensch gino<br /></em><em>⦠»<br /><br /></em>Une douzaine de pages de noms, câest à livre à lire à voix haute, impérativement.<br />Le nom meurt avec la personne appelée à être exterminée. Chaque nom est unique, comment nommer ensuite.<br /><em>Naam</em>, comme <em>Namme</em> en allemand, le nom, plusieurs pages de <em>Naam</em>, de noms, <em>exhommé </em>écrit Gérard Haller, même plus un homme, comment dire et redire les noms pour que lâoubli ne recouvre pas tout.<br />Lâessentiel est dit, dans la suite des noms, entrecoupés de tout ce qui est absent, le dieu, lâhumain, mais aussi la mère, et les paysages.<br />Très resserré, très sobre, le texte est bouleversant.<br />Je ne sais pas si lire à nouveau à voix haute serait supportable mais ce serait indispensable que dâautres le lisent, puisquâon dit et répète pour se souvenir le nom de celui quâon nâa pas non plus connu, Samuel Paty, mais qui figure dans la communauté des <em>Menschen</em>. Ne vous y trompez pas, je ne confonds pas, il sâagit au fond de la « même » chose.<br /><br /><em>« ossias<br />oskar<br />ossip<br />ossna <br />ottla<br />ottla<br />ottla<br />ottla<br />â¦â¦.. »<br /><br /></em>Samuel<br />Samuel<br />Samuel<br />Samuel<em><br /><br /><br /></em><strong>Isabelle Baladine Howald<br /></strong><br />Gérard Haller, <em>Menschen, </em>Galilée, 115 p 12â¬. <a href="https://poezibao.typepad.com/poezibao/2020/11/anthologie-permanente-g%C3%A9rard-haller-menschen.html" rel="noopener" target="_blank">Lire des extraits de ce livre</a>. <br /><br /><br /><br /><br /></span></p><img src="http://feeds.feedburner.com/~r/typepad/KEpI/~4/_V1Q9j-6VVw" height="1" width="1" alt=""/>

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