Tom Tranquille

Tom emmena les deux brigands s'asseoir autour d'un verre, au bar du cul-de-sac. Ils lui racontèrent durant des heures leur bonheur, leur menu bonheur dans cette partie-ci de la ville, du monde. Tom écoutait et comprenait. Il paya une deuxième tournée et perça la fraternelle amitié unissant ces êtres. Dès lors, il revendit des pneus, avant que la police ne se réveille. Puis il allait lire des romans policiers, s'instruisant. Le milieu le pris en son sein rapidement. Tom put dénicher les pièces détachées manquantes à son grand oeuvre...

merci mademoizelle.

Quel âge a-t-elle ? 15 ans ? 16 ans? 17 ans ? Des boucles noires s’écoulent harmonieusement sur sa taille parfaite. C’est une vraie chevelure de beauté italienne. Son petit visage fin semble n’en plus finir d’adoucir les angles alentours. Il suffit que ses lèvres bougent d’un courant d’air pour faire chavirer le cœur des hommes, ces rapaces ivres. Et de ses yeux elle frotte doucement la corde raide de la vie, des yeux si bleus que personne ne peut y croire ; si bleu que Tom n’en pouvait qu’être passionné, tout de suite, sauvagement. Ines, Ines, apparition tardive, ange du coin ouest des bordels.
-Sois ma femme et donne moi l’amour et prend donc l’amour autant que tu veux, je suis Tom, nous sommes fait l’un pour l’autre, sans doute possible, et il n’y a jamais eu de doute possible quand à notre rencontre claire et dingue.
-Tom, tu es étrange, tu me plais, tu me fais rire, emmène-moi, je veux être heureuse,

(Le texte semble s'interrompre brutalement ici, l'auteur laissant simplement une note en marge:
Ines, Tom, je voudrais tant que vous exisitiez.)

(Tom dans la vieille ville)

C’était un rêve depuis toujours, un travail répété dans des sous-sols secrets… Des heures, des journées de labeur suant et crevant et transcendant. Tom avait commencé son grand œuvre voilà deux ans. Il lisait alors peu, trop peu pour dépasser les grands, Dostoïevski, Céline…Désemparé devant le volume titanesque d’ouvrages qui l’attendaient l’œil menaçant, il avait eu cette idée lumineuse…une machine à lire. Une machine à lire ! Rien de moins… Et le voici parti frappé par la grâce, dénicher un atelier dans un sous-sol délabré de la vieille ville. La nuit même, il installait ses premiers outils, la stéréo, les disques nécessaires à l’inspiration de l’artiste, et il commençait sa petite création divine. Deux ans de folie, de nuits blanches, d’avis de scientifiques ou de confrères de bureau. Des piles de livres de SF inclassables jonchaient les paillasses de l’atelier. Des catalogues de pièces détachées loufoques, de drogues diverses, excitants puissants, des magazines d’organismes de recherche reconnus ou non, des rapports de la CIA volés des soirs d’ébènes… Tout était là. Et Tom avait alors appris à connaître la vieille ville, ses rendez-vous louches, ses coins perdus, les petites affaires de prostitution de mineures ou de marchands de rêve. Notre histoire ne s’arrête point là, pour une fois…