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Publications sur Toute La Poésie

mirliton

15 juin 2008 - 10:26

Couac
sérieusement
couac
très sérieusement
couac

mais pas Ă  l'infini
couac
en espérant
un marbre d'exception
quelque envolée dorique
couac
sur tous les tons

Insomnie mais Ly

21 mai 2008 - 11:08

Une nuit blanche
c'est pas grand-chose
car j'ai tes hanches
d'ébène rose
entre les mains
offerte fée
tu le sais bien
entre deux trains
de non-pensées
ton souffle aussi
pousse ses riens
entre les miens
pour m'étonner
et je m'étonne
de t'écouter
rêver démone
dormir amie
déesse aimée
de l'insomnie
qui me force Ă 
te contempler
toute jusqu'Ă 
l'oubli du noir
qui tant déplaît
l'oubli de voir
et d'oublier


Dans la pénombre tičde...

20 mai 2008 - 11:27

Dans la pénombre tiède
de l'avant-dernier instant
l'escargot vert de ses yeux
cherche la consolation d'un clin d'or.
Au pied de l'escalier pensif aussi
ses mains pendent mollement
le long d'une question qui sonne
en lui comme un serpent.
Il aime la peur fluette
l'inconnu facile
et le trotte-menu
du trop-penser
entre les doubles cloisons de son souffle.
Il aspire au plus grand nombre
de perfections possibles
mais il ignore à peu près tout
et sûrement l'art de desserrer
les poings quand la nuit
le rejoint câline
prĂŞte Ă  dissoudre
les cristaux aigus
de ce qu'il appelle
son devoir de fausse vie.
Il s'endormirait bien en bas de l'escalier
s'il était un mouton de poussière
ou une araignée
mais on l'a nommé responsable
de la combinaison du buffet
et il ne comprend plus grand-chose.

Lucifer

20 mai 2008 - 09:08

J’ai peur. L’écran de veille me renvoie un portrait de moi, profil gauche qui fait la gueule à Évora, et je me vois tel que j’apparais, tel que les autres me voient, ou plutôt me voyaient, car je ne me montrerai plus, je n’exhiberai plus ce corps ridicule affublé d’une tête triste au visage désolé : je ne veux plus m’offrir à la perception d’autrui, et si je pouvais me soustraire à la mienne, je n’en serais que moins malheureux. Mais qui est celui qui croit cela ? Le même qui l’écrit, le même qui, penché sur sa table de travail, pousse la plume ou devrait la pousser mais observe sa photo sur l’écran en se demandant pourquoi, mais pourquoi il est « tombé si bas ».

Tout est affaire de chute, de chute plus ou moins réussie. Les soucis s’entassent ; il ne se passe rien d’autre que cette foire aux claques : vous en redemandez, on vous en ressert, et vous en redemandez jusqu’à beaucoup plus loin que jusqu’à plus soif. La souffrance, disent les méchants, purifie. Et la chute, comme toute bonne souffrance, purifie : elle purifie en épluchant, en écorchant, en arasant, en ne laissant que le tronc. Puis le corps en chute, pur et lisse tronc en chute, finit par s’écraser sur la vérité, l’âpre vérité qui gît au fond de l’abîme, au fond de la chute. Les chutes réussies se terminent en purée ; les chutes manquées, en pureté. Voilà encore par où pèche la transcendance.

Je venais donc de grommeler à mon image, dégoûté par le spectacle de ma tempe étroite, de ma barbe mal rasée et de ces immondes pétéchies qui me servaient de rouflaquettes, que « pourquoi mais bondieu pourquoi toutes ces histoires de divinisation de l’homme m’excitent tant et autant me dégoûtent car il faut bien l’admettre ce ne sont que des histoires ? »
Je venais de grommeler et m’apprêtais à grommeler encore quand il se passa, quand il ne se passa rien que ce qui toujours se passe lorsqu’il ne se passe rien : il me sembla que sur l’écran mon image n’était plus la même. Elle me renvoyait toujours autant de laideur et de « dégoûtation », mais cette fois au dégoût s’était jointe la peur, une peur inhabituelle qui me donna envie de m’envoler au loin mais en fait me cloua à ma chaise et me paralysa en transportant ma pensée dans une espèce de sommeil où, chute réussie, j’eus l’impression pure et lisse de m’écraser.

Purée sans pensée, pensa la purée ; pureté garantie impossible. Je n’avais plus peur ; la purée ne craint rien. Je n’avais plus d’ordinateur ni d’écran, plus d’image, de dégoût, de pétéchies, mais j’écrivais. Comble d’impuissance, j’écrivais mes mémoires, ou plutôt cet A6G, l’un des chefs-d’œuvre de la matière, s’était décidé à décrire les édifiants et horrifiques détails de la Chute, la plus chute de toutes les chutes possibles, non parce qu’il s’agissait d’un exercice littéraire auquel tout écrivain doit sacrifier mais parce que la Matière avait expressément décidé qu’un programme auto-écrit en Perl se chargerait de « fictionner » tout ça pour la plus grande béatitude des curieux et des sages.

J’écris ces mémoires parce qu’on vient de m’offrir l’un des chefs-d’œuvre de la matière, un A6G argenté comme une lame de rasoir, tout ce qu’il y a de plus racé, et mon heureux donateur a bien précisé que, désormais, j’avais une nouvelle arme, un « miroir de la mémoire, rasoir à ébarber la pensée et toutes les perverses manifestations de l’esprit. » En fait j’écris parce que l’A6G me fait croire qu’il est là, posé devant moi à la place de mon ordinateur. Pour le dire autrement, l’un des fleurons de la matière se tient là, devant l’un des fleurons de l’esprit. Et si le fleuron de la matière est un ordinateur portable, le fleuron de l’esprit n’est autre que moi. Sans exagérer.

Je suis un pur esprit.

Longtemps – ce qui ne veut rien dire – je suis resté sans me languir de la matière, sans même la concevoir. En ces espaces-temps d’avant les espaces-temps – appelons-les « Dimension » –, alors que seule était la Dimension, la matière n’existait pas ; j’ignorais seulement qu’elle fleurissait déjà depuis toujours dans l’imagination du Grand Deuxième. Mais j’ignorais surtout que je prendrais part à sa réalisation en participant héroïquement à la malédiction qui s’ensuivrait.
Il faut comprendre que Dieu, le plus pur des purs esprits, est en quelque sorte l’absolu contraire de la matière. Dans votre langage psychologique vous diriez que « Dieu n’aime pas la matière ». Rien n’échappe à Dieu, mais le Big Bang c’est nous, je veux dire le « collectif des anges rebelles » : c’est le seul moyen que nous avons trouvé pour impliquer tout le monde dans la félicité suprême.

Voici donc la chronique de la célèbre « chute » de Lucifer, l’histoire non seulement des êtres animés et des mondes qu’ils animent, mais aussi un reportage inédit sur l’Absolu, l’Essence, la Vision de l’Essence…
Dans la Dimension, Dieu créa. Il créa un esprit différent du sien, un autre pur esprit, indépendant et réel, mais pas Dieu : l’autre esprit, le Grand Deuxième, le quasi-omniscient, était nécessairement conscient d’exister et il comprit que non seulement il n’était pas Dieu, mais qu’il ne le serait jamais. L’horreur advint : il se vit nécessairement inférieur à Dieu, inférieur à son seul autre. Il était l’Inférieur. Or être l’inférieur de quiconque, fût-ce de Dieu, ce n’était pas pour plaire à Lucifer, mon directeur. Alors, dans un accès de rage inconcevable, il nous créa, nous, les archanges.
Il y en a eu, des prodiges, avant le Big Bang : les prodiges que vous appelez « subtils », d’ordre « purement spirituel », puis des prodiges plus « grossiers », d’ordre disons « proto-matériel ». Oh, rien de chimique ou de particulaire. « Quelque chose de l’ordre de la lumière » dont l’idée éblouit le cœur de Lucifer et le força à « rompre » avec Dieu.
Si j’appelle Lucifer mon « directeur », c’est bien parce que je travaille pour lui – devrais-je dire « avec lui » ? Mon travail consiste justement à donner une forme pratique – spirituelle s’entend – à ses intuitions quasi infinies : en tant qu’archange, j’ai cette force et ce savoir, cette science et cette puissance. Nous autres archanges, nous sommes à Dieu ce que le chimpanzé est à l’homme, puisque nous sommes des créatures non de Dieu directement mais de son premier archange. Dieu n’a vraiment pas créé l’archange à son image !
Si Dieu crée – suivez le raisonnement ! –, il ne peut créer que Dieu, rien de moins ! Mais ce Dieu créé ne peut être Dieu du simple fait qu’il est créé : cette impossibilité d’être réellement Dieu, et à un tel niveau de sublimité, a un nom : le Mal.

(Ă€ suivre ?)

Počme sans paroles

18 mai 2008 - 08:50

Image IPB



Légende

Tout est affaire de chute, de chute plus ou moins rĂ©ussie. Les soucis s’entassent ; il ne se passe rien d’autre que cette foire aux claques : vous en redemandez, on vous en ressert, et vous en redemandez jusqu’Ă  beaucoup plus loin que jusqu’Ă  plus soif. La souffrance, disent les mĂ©chants, purifie. Et la chute, comme toute bonne souffrance, purifie : elle purifie en Ă©pluchant, en Ă©corchant, en arasant, en ne laissant que le tronc. Puis le corps en chute, pur et lisse tronc en chute, finit par s’Ă©craser sur la vĂ©ritĂ©, l’âpre vĂ©ritĂ© qui gĂ®t au fond de l’abĂ®me, au fond de la chute. Les chutes rĂ©ussies se terminent en purĂ©e ; les chutes manquĂ©es, en puretĂ©. VoilĂ  encore par oĂą pèche la transcendance.