misstinguette

Ma tête légèrement penchée en arrière, je suis totalement nu.

J’apparais entre le rouge le noir, Nu devant ce miroir aux dorures torsadées,

J’ai toujours aimé ce que est faussement précieux.

Soigneusement, je maquille,

je dessine le visage d’une femme et estompe pour un temps mes douleurs masculines.

La cigarette entre mes doigts se consume, je l’ai déjà oublié car il faut être minutieux, si la beauté est éphémère la mienne dépasse rarement le levée du jour

Tout à l’heure j’enfilerai ma robe rouge satinée qui jouera adroitement

entre les ombres et la lumière artificielle de la nuit

« Suis-je à ton gout ? »

Désillusionné,

je m’efforce d’oublier ma voix si peu accordée à mon âme

et ironise avec humour mon sort, si mon existence est une mauvaise blague,

je serais le premier à en rire

La maisonnette, calme, s'endort,

Chaque fleur, chaque bibelot, chaque souvenir a trouvé sa place depuis longtemps.

Ses murs ridés, craquelés, gavés de moment passé, digèrent.

Au travers de la seule fenêtre,

La vielle dame sur son rocking-chair, regarde passée les secondes,

Elle bascule d'avant en arrière, au rythme du tic-tac de la trotteuse.

Son cher mari l'admire, fidèle, dans son cadre en bois d'ébène.

Soudain, sa main frêle serre les accoudoirs,

Elle l'aperçoit…un songe. Un rêve ? Une mélodie ?

L'odeur de la réglisse l'enivre, la douceur de ses mains rugueuses sur sa joue, la belle montre couleur caramel, la cicatrice sur son poignet, la chemise aux rayures bleu clair, les promenades salées, sucrées, le désir, l'envie, l'excitation, le cœur au bord des lèvres

« Magda… ».

Le piano retient son souffle et glisse, l'accordéon s'emballe.

Belle, fraîche, sa robe légère tourne, « Magda… »,

Le rideau tombe. La foule gonfle, tourne avec elle et s'envole.

La maisonnette chancelle, elle vient de perdre son meilleur allié, Magda.

La trotteuse n'a rien retenu … tant pis que la valse l'emporte !