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Jean-Paul Raffel

Inscrit(e) : 24 sept. 2011
Hors-ligne Dernière activité : déc. 31 2011 09:36

Publications sur Toute La Poésie

L'homme paisible

18 décembre 2011 - 10:49

Maintenant c'est la nuit

Le long des voies

Les lignes d'acier glissent

Sous la lumière

J'attends la Seine, des lueurs

J'attends la Seine des lueurs

Attirance d'enfant toujours

Et le frisson sous la lumière

Et le gouffre entre deux rives

Savoir nager du regard

Dans les reflets de Paris

Craindre la noyade

Si du clair à l'obscur

L'eau s'ouvre et t'engloutit

Un homme paisible s'endort

En longeant Paris, les faubourgs

Gardien de nuit sans emploi

Il garde la chambre le jour

La nuit il garde un œil

Dans son sommeil sur les offres de la veille

J'attends la Seine

A Houilles-Carrières,

Un salaud pisse devant la gare

Demain sur sa trace il y aura

Un immeuble de plus

L'homme paisible s'éveille

Mais Houilles l'épuise

Quelques uns comme moi

Poursuivent vers l'Ouest

Hantés de demain ou qu'hier retient

Passé la ville j'attends la Seine toujours

Pour plonger en ses creux

Que bordent inversés et tremblants

Les réverbères de banlieue

Je reviens vers toi en portant ces images

Vois-tu ce vent de nuit derrière mon regard ?

Voici un homme seul

16 novembre 2011 - 11:11

Voici un homme seul
Sa femme est morte avant-hier
Il était seul avant
Un homme seul absolument

Voici un homme vide
Il a vendu son appartement vide
Hier, justement
Il n'a gardé que le miroir
De son épouse décédée

Il la regarde dans la glace
Aussitôt certain, à ce qu'il voit
Qu'elle l'observe

Il retrouve ce sentiment
Plein de ressentiment
Depuis vingt ans
Elle l'observe, elle le guette

L'homme s'en va en regardant dans le miroir
Tout plein de gêne, tout plein de haine
Un peu moins seul, finalement.

Voyages

12 novembre 2011 - 09:40

Voyages

Je suis entré dans cette vie

Suivi par un jeune homme à l’allure gauche

Bien vite il m’a quitté pour devenir lui-même

Marin sans voilier

Rejeté loin de la mer

J’ai longtemps guetté son retour

Contraint par raison à cultiver la terre

Je voyais les mouettes au sillon

Elles suivaient mon pas

Muettes compagnes

Jamais leur cri ne se fit entendre

Loin de Brighton, de Tampico

Loin, perdu de Jack London

Les sages n’invitent plus au voyage

Sur le pas de leur porte

Ils saluent le passant

Je ne sais désormais où se trouve ma place

Ou d’un bâton de marche

Ou d’un siège sur le seuil.


JPR septembre 2011 G. http://jeanpaulraffel.canalblog.com/

J'écris ce blues pour qu'une fille aux pieds nus le chante

09 novembre 2011 - 11:53

J'écris ce blues pour qu'une fille aux pieds nus le chante
D'abord j'ai voulu qu'il ne raconte rien
Mais comment aurait-elle fait vibrer sa belle voix
Juste sur un skat de circonstance ?
Alors c'est l'histoire d'une jolie brune tendant la main
A l'entrée du métro elle tend la main
Pour la première fois, je croise ses yeux, je vois sa main
Mais elle ne mendie pas comme tu le crois
Elle attend que quelqu'un lui dise en passant
Il n'y a pas que du bleu dans la rue, pas que des sirènes
Il n'y a pas que des types en cavale inquiets et tristes
Des types comme Louis la Mandale
Toujours poursuivi jamais rattrapé
Toujours en fuite et traqué
Bourré de tics, Louis la Mandale
Le dernier petit gars pour toi
Sors-le de ta vie

J'écris ce blues pour qu'une fille aux pieds nus le chante
J'ai voulu qu'il ne raconte rien d'abord
Mais comment faire vibrer sa voix
Le blues dit qu'elle est en marche
Sur un trottoir forcément noir de pluie satin
Vers vingt heures du matin elle te sourit vraiment
Oui, Toi
Elle te tend la main
Il n'y a pas que du bleu dans la rue, des sirènes
Il n'y a pas que des types en cavale inquiets et tristes
Il y a Toi qui lis ce texte
Sens-tu la fraîcheur de sa main dans la tienne ?
As-tu envie d'entendre sa voix ou l'entends-tu
Déjà ?


J'écris ce blues pour qu'une fille te le chante
Une fois dans ta vie, monsieur, madame
En pressant sa main fraîche contre Toi
Tu vibres d'envie de sentir aussi son parfum
Ce qui te rapproche d'elle, c'est la curiosité
Le désir d'en finir avec le Gris
La passion d'être enfin en retard quelque part
En retard, mais près d'elle

J'écris ce blues pour qu'une fille te prenne
Le visage à deux mains
En pensant si fort «Je t'aime »
Que Tu lui souris aussitôt
Que tu marches près d'elle
Sur le trottoir satin de pluie


Et Louis la Mandale ?
On s'en fout.
Il n'est pas dans le blues
Il fuit au loin
Poursuivi par les bleus
Sirène.


JPR 09.11.2011. G.

Poème sur un tempo de 120 battements par minute

07 novembre 2011 - 06:58

Poème sur un tempo de 120 battements par minute

Je commencerai à chanter longtemps après que la musique aura posé le décor
Ceci pourrait sonner désagréablement à bien des oreilles
Les plus accoutumées aux concerts classiques regretteront les romantiques
J'en suis certain, mais bien convaincu que cet air appartient à notre siècle

Il ne raconte rien, son tempo s'accélère et emporte les danseurs avec excitation
Il les laisse dans un coin sur un filet sonore minable venant des coulisses
De la valse il reste trois temps frappés à l'instant sur la table
Deux temps d'un doigt, un temps du poing fermé
Deux temps d'un doigt, un temps du poing fermé
Le temps fort rejoint le sol et résonne dans le corps tel un regret

L'auditeur, et ici, le lecteur, entraîné sur ce rythme aussitôt s'exaspère
Je lui conseille de poursuivre sa lecture du doigt et du poing
Un, deux, trois
Ce monde bat de l'aile
Un, deux, trois
Je vois des foules en marche
Un, deux, trois
Elles passent des portes en verre
Un, deux, trois
Toujours plus vite
Un, deux, trois
Pour être premier aux soldes
Un, deux, trois
Bousculade
Un, deux, trois
Misère, stupidité, vanité

Je commencerai à chanter longtemps après que la musique de verre pilé
Aura cessé de jouer
Dans le silence, bouchant mes oreilles, je hurlerai le texte des réclames
Un, deux, trois
Ce monde lave blanc
Un, deux, trois
Le contrat de violence
Un, deux, trois
A tout petit pour cent.

La valse N°2 de Dmtri Shostakovitch tournée jusqu'à l'absurde
Les images de force imprimées sur la rétine
Matt Elliott , joue-nous « The failing song » ou « The seance »
Nous regarderons sur ce soir de Novembre
Les enseignes lumineuses décrire l'avenir
Qui, à Paris, borde le périphérique.



JPR. 07 novembre. MLJ.