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Publications sur Toute La Poésie

autodafé

14 février 2024 - 03:16

Autodafé.

 

Un jour il brûla ses 300 livres,

sa chair de papier .

Le matin s'attardait au solstice,

le bûcher fumait de vieil encens,

et âcre parchemin sacrifié

le vélin sentait la bruyère ,

Ailleurs les runes brisées par l'airain

faisaient table rase du passé ;

le savoir vivait son funeste destin,

l'encyclopédie transmutée en lumière,

les pages du Larousse en perdaient leur latin.

 

Dans cet excès d'ivresse l'érudit chassaient ses vieux démons ;

le bon vin n'avait pas réjoui son cœur d'homme .

mais bien aboli la Somme

qui, lente, assombrissait le ciel,

de ronds de fumée.

 

Le Temps s'arrête sur l'étagère ,vide de tout savoir .

Entre les artefacts flottait le parfum de fleurs fanées

et d'impressions premières.

 

Erasme,Diderot et Homère jetés en pâture aux flambeaux ,

la ferveur littéraire, les vers de Victor Hugo

mais aussi La Bruyère,Ronsard,Montaigne et Marot,

devant la foule sans remords.

 

Pas de regret après ce festin où ayant dévoré la tripe livresque,

la flamme rédemptrice fondait un monde nouveau.

 

 

----------------------------------------------------

 

Les plus belles pages avaient un parfum d'exil .

 

sans doute aurais-je dû rester en mon village,

près de l'âtre,

ou bien revenir comme Ulysse après un beau voyage,

 

Pourquoi tant d'efforts

si lire en nous mêmes

nous épargne le voyage sans cesse recommencé,

où s'épuise le corps,où s'enlise l'esprit..

 

Plus j'apprenais et moins je savais

et un jour vint le verdict de l'insignifiance ;

le colosse aux pieds d'argile s'effondrait emportant avec lui

jusqu'au savoir d'Alexandrie,

les tablettes de Mésopotamie,

les cartouches du Nil

les runes de Scandinavie,

les cunéiformes vestiges des passions humaines ;

 

 

La grammaire Kechwa me renvoyait aux Andes,

le Maori aux antipodes

le Breton se perdait dans la brume des landes

le Thai ou le Nepali dans l'encens des pagodes ;

 

Déjà sur ma tombe fleurissaient les kanji

au temp des cerisiers sur le mont Fuji,

Confucius et Mao me traitaient d'idéogramme,

Cyrille près du samovar ,de trop faible femme ;

 

les autres langues coupées gisaient dans un cratère,

avec le grec déchu au cœur des ruines de Rome ;

le Suédois ancien gisait sous la neige,

Pourquoi Shakespeare en son mal-être

augmenta-t-il mon ire,je ne saurais dire,

je me reportais sur le Magyar et peut-être pire,

le Hindi,le Basque,l'Italien en Bergamasque,

la Lusitanie ,au Portugais mettait le masque

et , traduit en gothique,le chant wagnérien ,

enfin dans un port ibérique j'étanchais ma faim .

 

Je voyageais par le truchement des portulans,

des colonnes d'Hercule jusqu'au Groenland

et poussant l'aventure aux indes occidentales

dans le sillage de Colomb,les rives tropicales

m'ouvraient leurs bras dans tous les récits ;

 

Vasco de Gama,Magalhaes, les conquérants

gonflaient la toile de mes voiliers blancs

qui à bâbord amure longeaient les rives vertes

d'un nouvel Eden peuplé d'Eves offertes

à la concupiscence de l'ancien monde ;

 

L'imagination lançait mes chevaux

vers des cultures dont je démêlais l'écheveau,

des paysages où l'horizon fuyait sans cesse

des pays où l'on célèbre la paresse

dans un hamac près de l'autel ;

là où les filles si belles

roulant des hanches retiennent le marin

par un collier de coquillage de l''atoll corallien .

 

les plus belles pages avaient un parfum d'exil .

Rêves et illusions perdues

tristes tropiques,civilisations en déclin,

toutes pages lues,

à l'aune du voyage que reste-t-il

de nos amours et aventures vécues ;

le souvenir futile

de belles couleurs,le parfum et

une photo des îles ;

 

 

A quoi bon la connaissance

si depuis ta prime naissance

la fuite en avant te livre

derrière le paravent du livre

aux plus grands tourments,

au savoir de la fin, sans en connaître le moment

mais dans la pleine certitude qu'elle advient .

 

Et voilà presque la fin

et ce dernier matin

en autodafé

je brûle un peu de moi 

gardez votre émoi

ce n'est presque rien.

 

Août20 jf

 

romancero andino

09 février 2024 - 01:48

Le père ,impassible ,sculpté dans la pierre,
jette un regard anxieux vers chaque soleil ;
il courbe sa douleur, prie l'astre en éveil
puis mâche la coca toujours plus amère .
-
Il va au grand lac blanc qui épouse l'azur ;
rejoint sa chakra,une terre de misère
que le gel a couvert de sa mante claire ;
le ciel est de sel ,le froid un cristal pur.
-
Il marche vite ,oubliant sa faim ;
et porte aux Apus près d'un rocher sacré,
l'offrande de coca et le maïs violet
que la Pacha Mama  accueille en son sein ;
-
La montagne déverse ses larmes d'étain
dans le matin des Andes à l'aube minérale,
où croissent des fleurs aux rutilants pétales
sueur et sang versés sous le joug hautain,
-
dans la mémoire cristallisée des nuits de Potosi,
sous les cimes où la terre se déplace et meurt,
dans l'or qui la couvre il court une rumeur,,
de noirs pénitents, au ciel, implorent le sursis.

la montagne se ravine et Yungay pleure ;
les palmiers arrachés par la furie des eaux
noyant de boue la plaine et ses roseaux,
et l'Indien surpris en sa dernière demeure ;
-
Pachacuti redonnait au temps sa vigueur de pierre;
sur le sentier royal dans le jour naissant,
la nature embaumait son pas retentissant;
l'indien ,en silence , écoutait son mystère.
-
Au Machu Picchu, cœur de granit figé ;
il étreint le soleil, son père ,et le jour paraît
au cœur du trapèze  ouvert sur la forêt
une moisson d'or tombe sur la pierre érigée .
-
aux quatre horizons il adresse une prière 
qui se perd dans le vent et le ciel vide ; 
le condor esquisse une danse morbide
puis fond sur un agneau qu'il broie dans ses serres.
-
L’Inca s'est éteint un soir sous l'astre mort ;
il fallait le voir lutter dans la brise altérée
sa lance contre le feu des centaures enivrés
les yeux injectés de sang et de pépites d'or .;
-
sur le chemin impérial découvrant sa solitude,
l'Indien contemple le majestueux décor
où la voix divine de l'Inca résonne  encor 
sa lignée épuisée par des combats trop rudes.
-
 Le cycle du soleil finira bien avant
que ne revienne le règne de Pachacuti ;
et l'oracle antique dont l'écho assourdi
porte la rumeur de la fin des temps.

Atahualpa dans un dernier soupir,
exhalait son âme surprise
une fleur de sang que le soleil irise,
un rubis éclatant sous le froid désir ;
-
le ciel ,parfois, devenait lumineux
baignant l'eau bleue des cascades,
recouvrant les forêts de cette odeur fade
qu'avait le mystère dans le vert précieux ;
-
la terre fait entendre sa voix profonde,
la montagne résonne comme un tambour
écho de la nuit qui vient dans le jour
porté par le vent,jusqu'au cœur de l'onde ;
-
elle parle des temps indiens,du Tawantinsuyu
de Manco conquérant érigeant Cuzco,
des hommes de pierre à Tiahuanaco,
qu'Inkarri fait revivre au cœur de l'ayllu ;
-
quand Pachacuti commandait aux forces obscures,
Inti engendrait le temps, les montagnes et toutes choses
et Ayar Kachi offrant au soleil sa métamorphose,
figé en statue de pierre pour sa foi impure .
-
14/3/2020 corr jff

Indes

05 février 2024 - 09:07

Je contemplais l'Histoire ,du haut de ma tour,
les splendeurs des palais que dévoilait  l'aurore,
l'Orient dans ses brumes ,où il flottait encore,
le mystérieux parfum des nuits d'Udaipour ;

le Muezzin, lançait son impérieux appel,
dont l'écho frappait les murs du Fort Rouge
dédale de ruelles où rien encor ne bouge,
sauf une vieille femme mâchant le bétel;

au cœur des fumées bleues qui voilent l'Orient,
dans l'azur poussiéreux ,un lourd disque de feu
embrase l'horizon et le lac tremble un peu,
rose sous le marbre blanc, de Bouddha souriant,

dans les vapeurs d'encens ,qu'un essaim exaspère;
Puis tout devient chaos ,c'est le matin bruyant,
la foule fourmille et le désordre se répand,
comme  l'âcre senteur d'épices  dans l'air;

les clacksons  dispersent  la foule bariolée,
les dromadaires, sous brancards, se déhanchent ;
les pick-up surchargés de prédicateurs penchent ,
entre deux processions ,femmes nues ou voilées;

regards charbonneux de vrais mendiants du Gange;
le turban guerrier et la barbe des Sikhs,
prise dans un filet ;un saddhou sur ses piques
qui laisse sa planche à clous, en échange

d'un sourire ;et la vache sacrée chemine
dans son maigre silence, la foule, en délire,
l'entraîne dans un tourbillon, provoquant l'ire
de quelque sage Hindou dont la peau parchemine.

La nuit tombe, d'ombres aux yeux de braise,
d'étranges et âcres bûchers vont se consumer,
et, au bord de l'eau, les bruits du le fleuve et l'ascèse,
de la foule qui vient, dans le flot se plonger.

Sur le fleuve  glissait une longue barque
avec des chants, des saris orange et vert,
et dressée sur son lit d'or, une lascive Parque,
entourée de fidèles ,nus, les bras ouverts.

Les fleurs, les couleurs ,les senteurs,
le feu à demi-éteint, aux fumées délétères,
tout me sembla  soudain empreint d'horreur,
et le bétel même avait un goût de terre;

je remontais aux sources du  Fleuve Sacré,
pris d'un élan mystique  pour y trouver la foi,
la lenteur du temps, entendre le cri de la Vérité,
sorti de la bouche d'or, d'un ineffable Bouddha.

toujours plus haut vers les cimes, je rencontrai
figé dans un sourire ,là où l'ombre est safran, 
le Bhoditsava que d'autres foules venaient adorer
sur un pic  vermeil ,face au soleil levant,

qui embrasait les stupas , inondait les rizières;
entre les montagnes parées de liquides miroirs bleus;
je discernais dans quelque fumée l'éclat du mystère,
et mon cœur s'extasiait au sort des bienheureux;

dans l'ombre des cimes des fleurs blanches mirent
leurs rêves présomptueux de pâles immortelles 
et moi, pris dans ce doux et vain délire,
j'oubliais mon bourdon et mes vœux de Compostelle.

Jf corr mar 2020

Retour au Pérou

26 janvier 2024 - 08:21

Retour au Pérou

La Cordillère franchie et le corps en ruine
j'arrivais à Lima au cœur de la nuit,
la vapeur s'échappait du capot d'un taxi,
la lune  brillait d'une blancheur opaline.

L'église San Francisco, au musée des tortures,
ombrageait ma chambre, cellule sale et  grise ;
sur le parvis, un peintre en chemise,
peignait un Christ nu au milieu des ordures.

Dans le sanctuaire où brûlaient  quelques cierges
un indien édenté priait d'anciens dieux,
les momies ranimaient ce regard déjà vieux
qui  s''illumina devant la jeune vierge.

Avenue Abancay flottait l'odeur de pourriture,
les reliefs du marché encombré d'ambulants,
les fumées de friture apportées par le vent
venu de la mer au parfum d'aventure .

Un désert de dunes noires encerclait la ville
tentaculaire,  nappée d'une brume grise ;
le trafic infernal résistait à la crise
qui ravageait le pays et le cœur des familles.

Mes rêves d'Eldorado n'y pouvaient survivre ;
alors fuyant la pollution , je partis un matin,
buvant l'aube pâle dans fumée du train ;
rêvant de Machu Picchu ,encore un peu ivre.

L'écume de la nuit , bière des cervecerias
faisait tanguer devant mes yeux
les ruines de temples aux rites mystérieux,
le mythe des merveilleuses cités incas.

Dans le canyon de l'Urubamba
un serpent d'argent fuyait en eaux vives,
pénétrant  au cœur de la forêt lascive,
nid de verdeur où le temps ne s'écoule pas ;

Au royaume de l'anaconda, porte d'Amazone,
où règne l'aquatique et végétal mystère,
passe le souffle de flûtes guerrières
entre les cris d'étrange faune .

Dans la splendeur du vert je noyais mes rêves,
je suivais la piste d'aventuriers
et, un jour, dans l'ombre d'un frangipanier,
près d'une armure , je trouvai un glaive,

une croix, puis un crâne blanchi,
un sceptre et sur la pierre ,le serment froid,
les symboles de la science et de la foi
que la mousse avait verdis.

Un Chasqui marchait sur le lumineux sentier.


Il portait les quipus sacrés à l'Inca
en ce jour de solstice chlorophyllien ;
la cité en deuil, attendait l'Indien
sur les terrasses de l'Intiwatana

là où le soleil, attaché à la pierre,
fait renaître un cycle nouveau,
marche des étoiles et rites ancestraux,
la promesse de moissons pour la terre .

Le grand prêtre ,immergé dans ses fumées ,
élève d'un geste auguste vers le ciel blême
un calice d'or, vidé du saint- chrême,
où le sang d'un llama achève de couler.

Castaneda , dans  mémoires d'un sorcier Yaqui,
avait dépeint le psychédélique voyage .
Sur l'autel , le sorcier qui semblait sans âge
avait bu le poison et, tranchant du Tumi

le cœur d'un llama  fumant ,
il le jette sur la foule d'où un cri jaillit :
la cordillère se fend !
Un rayon d'or perce alors la flaque de sang,
un ciel de neige rose coule
et, sur toutes les têtes se répand.

Alors, prodiguant sa manne aux portes du ciel,
le soleil généreux adoube au sanctuaire
l'indiens prosterné , qui se jette à terre,
Pachacutec jaillit de l'arc-en-ciel .
 

en vers et contre tout

23 janvier 2024 - 08:54

Vers qu’entends -tu dire
que déjà je ne sache
tends vers moi  ce fer
qui profond
un cri m’arrache
du coeur qu’il enserre

Tout de lumière irrigue
tout de ténèbres intrigue
âme sœur,mère Terre
dans la genèse du vers
surgit la fleur
de Rimbaud ou Beaudelaire
en mal des profondeurs
quand sourd l’enfer
au bout de ce voyage
dans le sacre du ver
otage de tendres verts
tendre vers quoi
vers ce rayon ultime
lune opaline
ou ardent mirage
de feux conquérants


vers que n’as-tu dit
ce à quoi mon coeur  s’attache
poursuit sans trêve ta noble tâche
et révèle pour moi l’Eden vainqueur
vers toi mes bras se tendent
en odes harmoniques
rêves
harpes célestes de vers diptiques
noir et blanc où s’étiole
la confusion des couleurs
saveurs qui effleurent ma bouche
césure entre deux douleurs
bois à la fontaine  une louche
de vert gisant
quand  molle la pensée s’émousse
relis Prévert
et te couches dans la mousse
de délice pervers.

J’attens qu’arpègent les mots
en  printanière aubade
de pluie fine et de frissons
de nature naissante
de vert et de sons
quand floraisons des coeurs
pensées et sentiments
se mêlent aux daffodils
à la lisière des cils
des bois et prés verts.

De la biche aux abois
épouser le drame
la tragédie du cerf
l’agonie du brame
entendre le ramage d’un corbeau disert 
au travers de mots
que la plume enchante
de nuit jusqu’au matin
où le premier coq chante
son cocorico

Puis l’été plagie  sur la plage
d’un éclat de lucidité
écrit sur les coquillages
l’écume des passions
marines et pastels  qui s’éternisent
en mer d’absurdité
la fournaise des  moissons
dans l’oeil fou du peintre
boisson et foutaises
débitées à foison
qui délivrent un éther
à faire pleurer les chiens
je laisse  en dune lasse
chagrins et regrets
que la marée efface
comme mes vains sonnets.

Emène-moi  saison sentimentale
en tes mots de rousseur et de mûr végétal
la muse alanguie se réveille en moi
long vers témoin de maint émoi
que je viens déposer aux pieds de ma vestale
il pleut des pleurs la fin des fleurs
aux rivières vient cette rumeur
des eaux profondes du coeur
mêlées de boues létales

Puis encore aux vers vient la saison atone
le coeur saignant s’abandonne
aux serres du destin
quand la cloche fêlée résonne
au clocher éteint
la froidure tient en son carcan frileux
ton corps et les saints
dont les mains se tendent vers Dieu

est-ce déjà la fin
non car la rime se joue du temps
et dans son perpétuel mouvement
ressucite la vie en alexandrins
faisant de toute chose
du coeur  à la rose
sur pierre ou parchemin
un objet de désir au coeurs des pires tourments.


dire vers délire  désert
page vide   désespère

vienne  l’envie  sonne l’heure
mes vers s’en vont, je- deux- meurs 

jf janv 24