Aller au contenu

François Debuiche

Inscrit(e) : 22 juil. 2017
Hors-ligne Dernière activité : oct. 05 2017 09:33

Publications sur Toute La Poésie

Les féeries de Pan

05 septembre 2017 - 05:30




 

Les féeries de PAN


 

J’herborise à tout va, dans les sous-bois du vers

Et me laisse guider par les papillons verts.

La dent-de-lion surtout aiguise mon instinct.

Je ne déteste point le laurier ou le thym.

La narine en alerte, il me plaît de sauter

À pieds joints sur l’humus ou de gaiement conter

Fleurette à la prairie qui pousse par chez moi,

Provoquant sur ma plume un friselis d’émoi.

L’achillée millefeuille est un gâteau de roi

Que je mange goulu, sans peur non plus qu’effroi.

 

Le botaniste en herbe a un amour secret

Pour le pistil farceur, au chatoiement discret ;

En satyre indécent, debout dans ses sabots,

Il nargue gentiment ma Vénus aux pieds bots.

Son œil émoustillé se gargarise, obscène,

De ce que la Nature a jeté sur la scène

De nappe de myrtille et de tablée florale.

On dirait que des fées entrent dans la chorale.

 

Oui : l’adonis d’été et le coquelicot

Dont le parfum céleste au ciel se fait l’écho

Avec grâce et bonté me tendent leur pétale

Que je baisote, ému, alors qu’au loin détale

Un lapin de garenne éveillé de sa sieste.

Mon âme à tire d’aile, empli de l’air agreste,

Se grise de son vol auprès de la gentiane

Qu’émerveillé d’amour, visite un noir lucane.

Verdissant le talus, la feuille d’agrimoine

Lance sa hampe jaune au cou de la cétoine

Qui bourdonne dedans avec des reflets d’or.

Or n’est-ce point là PAN ensommeillé qui dort ?

 

Dans mon herbier joli, je glisse quelques fleurs

Mais déjà regrettant leurs indicibles pleurs,

De remords je me mords la lèvre que j’ai bleue.

Puis oubliant ce mot, je cours toute une lieue

Humant tant que je puis les senteurs enivrantes

Aux pavois affolants des rouges amarantes,

De l’euphraise des bois ou du bugle des champs.

Sans mollir du talon, moi j’entonne des chants

Pour célébrer le Dieu qui fit la ciboulette.

Et c’est d’ailleurs ici que je place boulette

Qui rime élégamment avec sa sœur plus haut.

Mais pour faire bon poids, n’y faut-il un pavot ?

 

Le répons du colchique amène le sermon

Volatile de l’aïl, qui braille à plein poumon

Sa note symphonique, olfactive, épicée.

Satisfait de la messe à la ronde énoncée,

J’imprime en mon élan une cacabriole.

Le cabris de ma joie gambade et caracole

À n’en savoir que dire. Au hasard des sentiers

Qui serpentent en rond dans les bourgs forestiers,

On croise quelquefois du vulgaire chiendent,

Ou bien de l’herbe à chat, qui tiens ! s’y fait la dent.

 

Gare aux pieds-de-mouton et aux vesses-de-loup !

Il faut souvent chausser un microscope flou

En guise de lunette afin de voir la bête

Au milieu des bolets qui grimpe sur leur tête.

J’en ai pris mon parti : ma folie est au pré

Où gazouille un zoziau dont on s’est bien marré !...

Pourvu que la jonquille, en accord avec toi*

Ne détache sa quille, et qu’il me reste un toit

Pour abriter ma serre aux vulpins amoureux

D’une blanche pensée qui les rend bien heureux,

Pour rehausser son teint, j’y mettrai trois soucis

Avec du cerfeuil d’âne et des radis rassis !...

 

Le doux rhododendron, dans une jardinière,

Éclate de couleurs pour l’ode printanière.

Attisant mon désir de me ceindre de vigne,

Le long volubilis allonge en moi sa ligne.

Surplombant mon balcon, un cyclamen disert

Cause avec quel entrain des plantes du désert.

Je convoque la thyrse et le grand muflier,

L’aiglantine et l’églantine, le néflier,

La vraie bourse-à-pasteur, la bardane poilue,

Le myosotis si gai, ô fleur divine élue,

 

L’amourette commune et l’arroche couchée,

La fausse laiche aiguë et sa beauté cachée

Dans une herbe très simple ; ajoutons la bourrache

Qui de la vache aux yeux très pensifs s’amourache ;

Un cheval s’extasiant sur du crin végétal ;

La ciguë poétique et des choux à l’étal ;

La centaurée jacée, l’amère chicorée

Que dame création de fruits a décorée ;

Le cresson de rocher, le crépide de Nice

Qui de jaune se vêt sans le moindre artifice ;

 

Puis couronnons le tout d’un bouquet de pivoine

Égayée de quelques tiges de folle avoine,

D’une syrinx nue et de pois de senteur :

Et voilà mon tableau assez haut en couleur,

Quelque chose de snob, en plus d’être élitiste,

Pour la revue Revu. Si le ton fantaisiste

N’est pas pour vous déplaire et qu’il vous reste un coin

Où mettre en son sommeil, les féeries de PAN,

J’en serais fort heureux ! Bête à bouffer du foin,

Ma pastorale osée voit arriver Panpan

 

Qui lutine une fleur ; un satyre en pourpoint

Ainsi qu’un vert galant, prend ma gerbe de vers

Et s’en coiffe le chef. Il lève une main vers

La muse qu’il attend, mais qui ne l’attend point !

Ondulant de la croupe, au détour d’un bosquet,

Une sylve étonnée fait cligner son quinquet...

Si bien qu’un ronflement attire notre cœur

Vers le coussin de mousse où pionce le dieu PAN,

Et qu’à se réveiller mettant un point d’honneur,

On le voit s’étonner de l’ardeur de Panpan !

 

Sur ce, ma farce est faite et je souhaite bon vent

À ceux qui me liront, ayant auparavant

Planté sur le chemin leur borne sémiotique,

La distance et le sens dans le champ sémantique !

Je vais finir d’un mot pour vous dire combien

Je me suis amusé à folâtrer au bois

En compagnie des mots ainsi que le grand bien

Que m’a fait votre appel à textes. Car parfois,

L’humeur revient d’écrire, on ne sait trop pourquoi ;

On regarde la flèche en son vide carquois ;

L’humour noir disparaît au profit d’une cause

Qui, tout soudainement, à vous-même s’impose.

 

Si vous me publiez, je ferai mes débuts ;

Je me flatte déjà de me fixer des buts

Qui renouvelleront ma sombre poésie !

Puissiez-vous apprécier ma propre fantaisie

Et faire qu’un lecteur me découvre, curieux

De la forme d’antan, qu’un honneur à mes yeux

Consiste à retremper dans le verbe du temps.

Sur ce, bonne rentrée ! Au plaisir de vous lire !

 

Ma révérence artiste ici même je tire ;

Je vous prie d’agréer mes saluts épatants

Jusqu’à plus ample choix parmi les sentiments

Qui baigneront ma plume, au moment du retour

Que vous m’aurez donné quant au délicat tour

Des espiègles visées, qu’à la façon d’aimants,

Je mets en mes façons champêtres de poète.

Puisqu’il faut bien finir, en imitant la chouette,

De mon nid de coucou, j’avise le hibou !

Du haut de ce grand chêne, une flûte de Pan

Égrène sa musique : au dieu qui fait le paon,

Des sylvains endiablés répondent de leur “bouh !”.

 

Et pour ma part heureux que tout cela finisse

En chansons, je grignote un bâton de réglisse ;

Il ne sera pas dit qu’à cheval sur mes rêves,

Je n’ai pas effleuré dans les branches des sèves...

 

*Je parle du lecteur, ce héros d’aujourd’hui

 

Miniature 26

01 septembre 2017 - 04:42

Comment faire tenir en deux vers l’illusion,

La chimère et le Sphinx, d’une fine allusion ?

 

Miniature 25

01 septembre 2017 - 04:40

À l’école on apprend à faire une fraction

Et l’on découvre ensuite, au travail, la friction !...

 

Miniature 24

01 septembre 2017 - 04:39

J’ai besoin, m’as-tu dit, d’un autre précepteur

Qui soit tout aussi strict que mon gros percepteur

 

Miniature 23

01 septembre 2017 - 04:38

Pour la dictée d’hier, le prof m’a infligé

Une bulle pointée et j’en suis affligé !