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Lettre à l’absente

Posté par michelconrad, 25 mars 2020 · 692 visite(s)

Vous me l’aviez rappelé : « tout n’est que yin et yang, lumière et nuit ». Les mots eux-mêmes sont de tels prismes, ils ont tant de reflets ! Eux aussi, ils peuvent être doux comme des caresses, – ou tranchants comme des couteaux ! Maintenant que vous n’êtes plus, je m’adresse à votre être de lumière, qui vole quelque part entre les étoiles, et il n’est plus de place pour toutes les dissonances, tous les malentendus : il reste la quintessence de ce que nous avons à dire. Merci d’avoir vu en moi un être de lumière que rudoyait la Nuit. Votre voyage sera sans fin, il vous mènera aux vérités dernières, pour cueillir leur « iridescence », – vous aimiez ce mot, n’est-ce pas ? Il me reste, tant bien que mal, à m’efforcer d’être meilleur que je ne fus.
 
 

23/3/20

 

 

 

 

"L'arbre fruitier" (24/3/18). Tous droits réservés.

 

Image IPB





Bonjour M. Conrad,

Ce n'est pas une évidence de venir ici vous écrire ces lignes.
Nous ne pensions pas avoir à le faire...
Pas si tôt !

Nous voulons vous remercier très chaleureusement d'avoir adressé cette lettre à Bizheng.
Nous ne doutons pas qu'elle l'aura reçue et qu'elle la garde sur son sein blanc de traversante...

Nous avons découvert la richesse de vos échanges en ces "blogs".
L'un des tout premiers mots écrits est le mot "vulnéraire" : comme il résonne ces jours derniers ! Mais oui, le poème est ce vulnéraire ! Votre lettre est ce vulnéraire du coeur!

Nous ne comprenons que trop bien ces mots de "dissonances" et de "malentendus" qui confèrent à votre lettre un caractère si sincère. Que trop bien !
Elle aimait à le dire en riant, qu'elle se sentait parfois rattrapée par son "petit régime de Pékin intérieur", ce qui, en ces temps où le maître de l'Empire du Milieu est comme un nouveau Mao président à vie, n'est pas peu dire !
Nous pourrions peut-être formuler les choses ainsi, à sa manière littéraire : lorsque la victoire de la leucémie est devenue une certitude, Bizheng n'aura pas voulu lui laisser le trophée des liens propres aux heureuses rencontres. Avec plus ou moins de conscience, et par un effrayant paradoxe, elle aura cherché à détruire, pour que la destruction ne soit pas l'apanage de la maladie...
Ce n'est pas une consolation, nous le savons... c'est à peine une explication...


Par l'une de ces énigmes heureuses dont elle a toujours eu le secret, et en nous communiquant, à l'instant même où elle quitta cette vie, un tressaillement qui nous restera comme le plus clair du poème, la sidérante espiègle aura conduit jusqu'au printemps la neige qui a recouvert son sang.
Et chaque fois que nous entendons une eau scintillante couler, un sentiment d'espérance irrépressible passe notre noire tristesse.

Bizheng a laissé de nombreux manuscrits dans lesquels nous nous efforcerons de remettre le plus d'ordre possible. De temps à autre, nous viendrons publier le fruit de notre travail d'édition dans le salon Sans commentaires sous le nom En hoir de Loup-de-lune. Nous avons choisi ce salon-là, parmi ceux qui sont proposés par le site, parce qu'ainsi ce sera toujours un peu le "poème du silence" si cher à Loup-de-lune ( voir le poème "mer noire").


Voilà...

C'est vivre dans la chanson de Michel Berger :

On danse encore
Sur les accords
Qu'on aimait tant

On dit encore
Tous les poèmes
Qu'elle aimait tant

Mais pas comme avant


Plus jamais comme avant



Veuillez agréer nos respects.

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