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[Fleur de Lotus]

Voyageur-en-images solitaire


Poème à deux voix :
Fleur de Lotus Charly Java


Lui

Voyageur-en-images solitaire...
Perdu dans le paysage verdâtre...
Mais des collines aussi belles que des seins
Eclairés au soleil bleuté...

Alors faut-il gravir la montagne?
Surmontée d'immenses châteaux
Construits à la va-vite dans les replis
De la neige...

Derrière doit se trouver l'arc-en-ciel
Où se balancent tous les oiseaux du monde
Pour se reposer de leur ronde
A surveiller les sursauts de foudre
De la vie qui passe au triple galop
Et les monstres qui farfouillent dans les sacs à main
Les hyènes qui ricanent devant les dépouilles de demain...

A l'ombre des grands arbres philosophes
Des jeunes filles brillent sans doute
Babillent comme des coquelicots
Elles rêvent de surprises clitoridiennes
Et toi coeur-étincelles
Tu aimes la fête farouche
Et douce qui s'époumone dans les cris
Les corps qui ruissellent de sueurs
Brisent les os de la nuit
Ces jeunes filles fougueuses
Rieuses
(et les étoiles cliquettent sur leur peau)
S'abandonnent
Dans leurs beaux draps
En cristal de lilas
Soumises à des coulées de lave
Aussi suaves que des airs d'opéra
Et leur corps s'étire sous les caresses colorées...


Ou bien il n'y a rien
Sinon les restes de nos rêves incendiés
Des soleils fracassés
Et des oiseaux fous
Dont les ailes effilées tailladent
Le silence comme des rasoirs
Et sur de grands étalages de glace
Des carabines fument encore
Au milieu de hauts réverbères d'où tombe
Une marée visqueuse
Prise dans un filet d'étoiles filantes
Et les zombies passent avec
Un trou lumineux à la tempe
De jeunes héroïnes au sourire inachevé
Viennent quand on ne les attend plus
Elles bivouaquent parfois avec insolence
Dans la poésie
Et puis disparaissent par la trappe du silence
Elles respirent l'écriture
Comme on aime violemment une drogue
Elles redoutent la défaite des mots
La déroute des lueurs sur leur peau
La mémoire brisure-déchirure
Mais leur doigts luisent dans la caresse

Et toi tu as mis ta robe à briser les coeurs
Et dans tes mains crépitent des étincelles de douceur


Elle

Alors faut-il gravir la montagne?
Bercée de jardins paysages
Passant de saison en saison
L'imaginaire pour oraison
Pieds nus dans la neige
Et les pêchers sans âge
Les lilas offerts aux coeurs en nage...

La réalité irréelle est restée en bas...
En haut les yeux émerveillés
Crépitent devant des jours sans nuits
Du vert printemps à l'automne orangé
Du jaune soleil d'été à la neige blanche.
Voyageur passeur d'horizons
Tu as oublié de sonner le glas...
Raviveur de danses et de hanches
Par ta flamme le jour s'enfuit
Tes mots doux murmurent des corps exquis
Coulés dans la douceur de caresses bariolées...

Les trois grands arbres, tryptique
Font une ronde mystique
Eclairés de leur auréole bleutée
D'odeurs de lavande encensés...
L'herbe se fait verte et rosée
L'abbaye se pare d'une aura d'éternité
La montagne se mue en mer enclavée
Roselière dénudée à la marée odorante
Mon dos tout contre l'arbre, en attente...

J'ai déposé ma robe à briser les coeurs
Je l'ai échangée contre de tendres instants de bonheur
Dans cet éden d'étrange sérénité
La nuit pour douce éternité
La lumière de l'amour pour m'éclairer
Lire tes mots par le vent soufflés
Et chuchotés dans cet antre de paix
Les cauchemars s'enfuient dans ces murs épais
Ces ruines déambulent une aire de poésie...
En aveugle, tu as pris ma main, hérésie
M'a soulevée et protégée de ma nudité
Voyageur-en-images tu m'as parée de ton paysage
M'a enlevée en écriture pour un très beau voyage
Là-haut, il commence, au sommet de la montagne...


Fleur de Lotus Charly Java