Le ventre vide
La faim jamais calmée
Aux moments des repas s'avère un long calvaire
La personne affamée
Subit trois fois par jour torture alimentaire
Insoutenable souvenir,
Celui d'inatteignables mais si goûteux repas
Et insatiable désir
De repas délicieux qu'elle ne goûtera pas
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Vitrines gaies et pimpantes,
Pleines de mangeailles, de boutiques achalandées
Devantures étincelantes
Des auberges où l'on voit des personnes attablées
Mais
Ces tenailles, cet étau
De l'estomac serré qui, de faim, se tord
Sur le ventre, cette peau
Flasque, qui cache à peine les souffrances du corps
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Piles de nourriture
De quoi se gaver, s'empiffrer : gâteaux moelleux, viande tendre
Ou produits de l'agriculture
Tant de bonnes choses, à acheter, à vendre
Mais
Sans finances, sans argent
Sans flouze, sans pèze, ne fut-ce qu'un biffeton
Comment se nourrir décemment,
Et remplir son caddie quand on n'a pas un rond ?
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Devant les vitrines
Rêver, fantasmer, se torturer de désir et d'envie
Prévert parlait de crime
Engendré par le hideux monstre de la jalousie
Oui, il est terrible ce bruit d'oeuf dur
Délicatement cassé sur un comptoir de bar en étain...
Ne pas s'acheter un fruit mûr
Ni faire ses courses sans compter, ni aller au restau... rien !
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Pays d'énormes gueuletons
De pantagruéliques repas, de bonne chair et de vins fins
Certains n'ont que quelques croûtons
Pour assagir les gargouillis de leurs terribles faims.
Peut-on faire bombance
Repas à quinze plats, indécente orgiaque ripaille
Quand on sait la maigre pitance
De celui qu'une constante et omniprésente faim tenaille ?
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23 juin 2015
en pensant à «La grasse matinée » de J. Prévert,
in Paroles