Dimanche 18 novembre 2012 / 0415
Il y a quelques jours, je suis allé à l'enterrement d'un voisin. La cérémonie était parfaite. Les gens convenablement habillés, les fleurs sur le cercueil, devant l'autel aussi, les croque-morts discrets et efficaces, la quête pour le cancer, et le silence recueilli des participants.
Avec un ton juste, d'une voix légèrement chevrotante, le curé a ouvert en grand la porte du paradis pour le défunt. Dieu nous aime tant, il sait pardonner; et puis il y a ceux que l'on va retrouver baignant dans le bonheur et la félicité, la cohorte de petits angelots, seulement habillés de leurs ailes ... ah, ce curé ... comme il les aime les petits anges ... il vient d'être arrêté ce matin pour pédophilie.
La veuve très digne ne pleurait pas.
Ses amis ont voulu dire quelques mots. La camaraderie, la convivialité, le cœur sur la main toujours à offrir un verre aux copains, l'homme de convictions mais trop timide pour manifester ... ah mais ! Comme il savait le dire, attablé au comptoir, qu'il fallait se battre contre la vie chère et défendre le petit commerce. Le patron du bar, qui était venu dans sa grosse Mercedes, en versa une larme. Généreux ce défunt là, généreux avec ses amis, et réglant toujours son ardoise.
Ses cinq enfants, très proprement vêtus pour l'occasion par le secours populaire, ne bronchaient pas d'une airelle.
La famille aussi voulait manifester combien elle avait de peine. La sœur tristement habillée de noir, sac croco, foulard Dior, parfum Chanel qui recouvrait celui de l'encens, la sœur donc, petit mouchoir brodé effleurant sa larme pour ne pas l'effacer, nous entretint longuement sur la douceur de cet homme, l'amour qu'il avait de ses enfants qu'il voyait trop peu – il rentrait si tard le soir – (re larme du patron de bar), et sa femme qu'il aidait tant, qu'il aimait tendrement ...
Sa femme, il la battait à pierre fendre ce brave homme.
Je suis sorti de l'église en claquant la porte, puis j'ai attendu à l'écart que la veuve se soit débarrassée de toute cette hypocrisie pour l'embrasser et lui rappeler que mon épouse et moi, nous serions toujours là, pour elle, pour ses enfants.