Mon métier est peu connu.
Il mérite qu'on le regarde.
Je somnolais sous les voûtes
Un livre ouvert et mes pensées inertes
Anéanties par la torpeur du brasier mourant
Quand juché sur mon fauteuil l'épervier glissa sa lettre
Je lus et je bondis car l'heure pressait.
Gants cloutés, mes bottes au pied, je sifflais dans la salle.
Appelant les folles.
Puis, enfin paré
Suivi de mon troupeau de martres, cet affluent affreux
Ces jeunes sauvages nerveuses fonçant dans les couloirs
Vague vibrante dont je suis le pasteur
Féroce, les menais à l'assaut.
Nuées de loutres, ombres ondoyantes
Rampantes avec leurs ongles
Faisant en dévalant leurs bruits agaçants sur les dalles
Pareils à des feuilles sèches sur lesquelles dévale
La pluie nerveuse avant l'orage
Faufilées, rapides comme un seul homme,
Ventre à terre, bondissantes, plus sinueuses que les serpents
Bougent les rousses fourrures ondoyantes,
Mais avec un oeil aussi bleu que l'eau des sources en hiver
Marée de carnassièreres, ventres frôlant le sol, canines dehors
Silencieuses assassines
Troupeau meuble et mouvant
Elle courrent à l'hallali avec leurs crocs d'ivoire
Et leur regard précis
Fichées au plus tendre de lui, elles saignent leur proie
Quand j'en donne l'ordre
Il est tué quand il sourit encore
Me disant cher ami puis mangeant des mots simples.
Sur mes épaules, ronronnantes et souples,
Gueules encore rougeâtres
Et des sursauts plein les reins
Les chasseuses engloutissent
Des poissons qui frétillent,
Victuailles méritées.
Il nous faudra quelque sommeil et que l'épervier revienne
Avant que d'autres sur ma liste écrite avec leur sang
Ne connaissent pour leurs méfaits le repos éternel.