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Et lui offrir un luisel


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#1 En hoir de Loup-de-lune

En hoir de Loup-de-lune

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Posté 02 juillet 2020 - 03:13

(Notes : 1. Très vraisemblablement notre poème préféré de Loup-de-lune... Pourquoi ?... Existe-t-il des réponses à ce genre de pourquoi ?... Existe-t-il des pourquoi dans cet exercice de "lire le poème", mais le lire vraiment, non superficiellement, non en l'ombrant de nos attentes, de nos demandes, de nos classifications, de nos certitudes qu'il lui faudra rassurer, mais lorsque la plus belle, la plus sûre des interprétations est encore la lecture sincère, "à haute et intelligible voix", par l'autre entièrement disponible pour le texte tel qu'il est. Nous pouvons reprendre ici la réponse que fait Montaigne au sujet de l'amitié qu'il éprouve pour La Boétie : "Parce que c'était lui, parce que c'était moi !"... "Parce que c'était moi, parce que c'était elle !"... Parce que nous retrouvons dans le poème "Et lui offrir un luisel" comme le compendium de tout ce qui est cher à l'écriture de Loup-de-lune : le motif de la musique que s'ingénient à faire les mots choisis, parce que le son devient sens, et nous précisons que "noire" au vers 3 est le substantif "la (note) noire" ; les angles livrés à la phantasmagorie des visions leucémiques, et qui s'ouvrent, qui se déchirent, qui libèrent, qui explosent leurs bornes apparentes en cornes d'abondance _Nous avons parlé plus haut de "lire vraiment le poème"... bien que nous ayons vécu tant d'années auprès de Loup-de-lune, bien que nous la connaissions depuis si longtemps et que le point de départ de notre rencontre et de notre amitié soit la lecture transportante d'une anthologie de ses poèmes dans une revue littéraire de Suisse romande, personne, nous disons bien personne n'aura su lire les poèmes de Loup-de-lune mieux que la poète boétiane qui l'aura tellement fascinée : "Architecture de frontières, sanctuaire à ciel ouvert et cités englouties. Les vents muets de l'après ont tout minéralisé _statues naufragées, écrans échoués en clarté de limbes. C'est le règne d'une solitude, de l'inaccessible, de l'atemporel. Main en visière, le diagramme mental duplique l'ange l'oiseau, le fruité >>> iconographie de l'enfant diaphane, de l'enfant aiguë, de l'enfant nocturne cristallisé là, derrière cette géométrie d'angles et de vitraux. Douleur marmoréenne du passager brûlant chiffrant l'immarcescible. (...)" (à propos de Loup-de-lune by boétiane)... car voici la genèse des mots affins du langage qui ose "l'Inconnu pour trouver du nouveau !"... Merci, boétiane, merci, vous avez de ces lectures, vous avez de ces accueils, vous avez de ces réceptions qui prolongent la vie corporelle et temporelle, même la plus compromise, oui, vous avez de ces partages, vous êtes de ces attentions qui donnent envie de vivre comme d'écrire, et nous avons vu, nous en témoignons, nous avons vu Leukaima elle-même "se mettre entre parenthèses" et comme douter, en le bienfait de janvier dernier, l'espace de quelques heures aussi littéraires et poétiques que miraculeuses, de son fatal sceptre hématique !... Il y a eu, il y a cette saison de l'hoir... Il y a, il y aura continûment les jardins et les fructidors de la marraine-en-poésie !......_ Parce que nous retrouvons dans le poème "Et lui offrir un luisel" les voilages de la chambre imagière où "les rayons et les ombres" réinventent les géométries ; le safran qui symbolise le sang-lumière, le sang-lune, le sang "îletté d'orange et de soufre", la nuance du sang dévoué bien plus qu'assujetti à la leucémie, et dont le flambeau guide en trobaïrits, en découvreuse de poésie ; le suffixe -eresse, présent dans le néologisme du vers 21, pour marquer une féminité à la fois enchanteresse et majestueuse ; cet autre suffixe tant aimé, tant prisé, tant médité, -(e)scent, dans le mot "flûtescente", au vers 27, pour dire avec le son du sang l'inchoation, le commencement, la progression, la métamorphose perpétuelle où la mort est une nouvelle naissance, et la leucémie d'abord l'albescence ou la lactescence du rouge, et l'évanescence des énergies d'orgueil et de chimère et des épaisseurs d'amaurose ; le vers de treize syllabes "élucidant le tremblé de sa clouure astrale" : si la santé est un alexandrin, la leucémie est un vers de treize syllabes, non pas maladie-maladresse, mais arythmie qui jette les pas dans le chemin ou l'esquif dans le canal vers soi-même ; le passage de la chambre imagière dans la salle d'eau, de l'extase dans le collapsus (voir le poème et les notes publiés dans le salon Sans commentaires le 28/06/2020), de la contemplation dans l'écoulement lumineux... 2. Le titre du poème de ce jour a des airs de clausule, de conclusion... Après tant de moments d'écriture, pour retrouver une parole à soi passant la mutité du deuil, pour créer un langage et recommencer à communiquer avec la voix silenciée de l'âme soeur qui se trouve déjà "dans la chambre d'à côté", pour être une parcelle de la passerelle de ce temps qu'évoque la poète Samira Negrouche : "Si tu savais le temps qui me traverse/pendant que je traverse vers toi", pour peindre, pour enluminer le monde aux "pigments leucémiés", à la lueur plurielle du sang-flambeau, pour bijoutier des objets, des chinoiseries en mots qui ornent le mystère d'être au coeur des métamorphoses... "Et lui offrir un luisel" nous conduit aux funérailles continûment fluentes et scintillantes d'un insecte, de ce "brin d'ailes/élucidant le tremblé de sa clouure astrale", avec lequel Loup-de-lune s'identifie. Le mot "luisel" désigne d'abord la lumière ou la lueur du cierge allumé dans l'athanée à côté du cercueil dans lequel repose le défunt, puis le cierge, et enfin le cercueil lui-même qu'éclaire le cierge. Voilà donc un mot fondamental pour l'univers de Loup-de-lune, qui réunit en ses deux syllabes la mort et la lumière, le rayon et le repos. Les lectrices et lecteurs fidèles à cette saison de l'hoir l'auront anticipé : le mot "luisel" repose sur cette essentielle racine indo-européenne *leuk- "être lumineux, éclairer" à l'origine de "luire", "lueur", "lucide", "allumer", "lumière", "lune", "illustrer", "leucémie"... Nous avons retrouvé en note, tracée en imperceptibles caractères roses et formant des diagonales sur l'une des pages du manuscrit, cette citation traduite d'une Épître du poète latin Horace : "Tiens pour ton dernier jour chaque jour qui a lui pour toi, et tu béniras la faveur de l'heure inespérée." La forme "a lui" est en latin "diluxisse", du verbe di-lucere "briller, luire". Le repos et le rayon, la lumière et la mort... et c'est la leucémie qui fait plus intense l'heure, puisqu'à sa lumière de safran c'est peut-être la dernière heure en cette vie corporelle et temporelle, l'heure d'un poème encore, le plus lumineux comme le plus lucide, au clair de la traversée imminente... Le riche héritage de la racine *leuk- est aussi une clef pour ouvrir la porte de l'oeuvre hermétique de la mystérieuse Loup-de-lune... Quelques-unes, quelques-uns se sont sensiblement aventurés à faire déjà quelques pas lumineux, et même au-delà du vestibule... Nous saisissons l'occasion ici de les saluer toutes et tous encore une fois le plus chaleureusement du monde ! 3. Le filet d'eau devient le cercueil ou le tombeau de l'insecte mort, sorte d'ambre liquide, et les étoiles que les lampes de la salle d'eau mirent évoquent les clous. Alors c'est un cercueil liquide, il coule et les clous ne ferment pas mais ils brillent et ils palpitent dans le tremblé qui glisse vers l'infini en part de l'éternelle métamorphose. Nous avons pensé si fort aux derniers vers du poème lorsque, le 25 mars dernier, sur le coup de 15 h 00, le couvercle du cercueil blanc s'est refermé, lent, si lent, de cette lenteur où vient bivouaquer le miracle, sur le visage de Bizheng... Si fort qu'ils le disputèrent au réel et manifestèrent l'indispensable présence des poètes !... Et c'est la leucémie, dans l'apothéose de ce don de voyance accordé par sa luisance, qui offre un luisel à Loup-de-lune, et c'est Loup-de-lune qui offre un luisel au "brin d'ailes", cet autre soi-même de fragile et d'envol en puissance, et c'est le poème qui offre un luisel, au sens de flamme qui éclaire, à ses lectrices et lecteurs du présent et du futur, de tout le coeur, de tout l'être de son auteure, en quintessence et du fond et de la forme des poèmes de Loup-de-lune.)





Et lui offrir un luisel





Sa proposition musicienne
tréfila l'air désencombré

en noire sur l'obstacle vaste
il solfierait l'embryon

rayons d'un est cloisonné
des portées jaillissaient
et s'éteignaient

l'accord des angles mitoyens
commençait la lyre et son négatif

avec son hoirie de bourdonnement
le rouge chantourné des règles
revint obliquer dans les voilages escamoteurs

quand toute l'impéritie fut exprimée
par le horion
le néant de la trace épigrapha l'imagier


Allumé le safran
et la cascatelle du linge
qui saumone son humidité léoparde

leurs reflets parsèment
les circonspections du métal et de la céramique

affûteresse pour les ongles
la dépouille
descend
lente

trop puissant d'abord le flux de l'eau
puis outre le dépit du tourbillon
par degrés cette minceur flûtescente
aux fins de ravir un brin d'ailes
élucidant le tremblé de sa clouure astrale


𝕃𝕠𝕦𝕡-𝕕𝕖-𝕝𝕦𝕟𝕖 / 劉 碧峥

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Modifié par En hoir de Loup-de-lune, 14 mars 2021 - 08:38 .