(FG / BeV)
Poèmes
***
Loup-de-lune
un délicat nuage noir glissait
ses métamorphoses sur les étoiles
et presque de concert
nous nous sommes écriés :
"Regarde, la lune va mettre son loup
et pourtourner les yeux qu'elle a posés sur nous !"
c'est depuis ce nocturne-là
que je m'évertue à raviver
ta voix et ton parfum
avec des poèmes lucides
qu'un aérien velours masque
*
Plaie
Une feuille
lance dansante
écorche
le vent qui l'emporte
La venelle
où je m'engage
effusion
de solitude
*
Église artérielle
bordeaux radial
tout au bout de la nef
un coeur dépeint
les systoles verrières
vêtent de rutilances tuniquées
l'angoisse et la bienveillance
le numineux vulnéraire
et le demi-secret d'un ange
*
Languide
à travers les frondaisons
s'enténébrant
cet enlacis de veines
que l'indicible taille
le macassar du ponant
effuse sur les prévenances de ouatine
*
Caducifolié
un mouchoir imbibé
de la mémoire des pluies
enfonce mon pas dans le trottoir
par un charme mimétique
au faisceau de l'embellie
son éclat de neige a pris l'aspect
des feuilles d'automne qui l'environnent
et j'épouse sa chute orchestique
et colosse comme le ciel
après son détachement de l'arbre alpin
qui a dénébulé ses faîtes glacés
*
Héraldique sylvestre
le mouvement de la nuée
allume les bruns et les verts
que la lisière a fascés
un théâtre costume d'ombre
les ramées de zéphyr
qui silhouettent leur zoophanie fée
le chant d'insistance
confirme le sécable et son oiselle
en désir de verticales tavelées de brillance
*
Scission
il se souvenait très précisément de la hauteur à laquelle, sur le fût, la lumière se séparait alors de l'ombre
et c'est à cette exacte ligne que l'arbre avait été brisé par la tempête nocturne
et la partie qui fut celle de l'ombre gisait maintenant dans le pré, ses frondaisons transfixant la lisière pour s'ensoleiller
et la partie qui fut celle de la lumière se dressait, fascinatoire verticale, insaisissable aigu, latente flavescence d'une architecture enténébrée
*
Ponant
la forme avait trop d'éclat pour confirmer un disque
elle glissait en source des orangés
qui savent outrepasser l'horizon et la descente
et continûment une gaze ondoyante
s'éployait devant son spectacle
les mouvantes frondaisons aspiraient à informer leurs cryptides issants
or fut méticulosé le périmètre juste avant sa disparition
silhouettant des linéaments d'encre et émiant la superstition du rubis
le désir amarina un ciel
en mauvincendiant des carènes-ouates
et naquit une pluie d'abondance
transfixant la lucarne
avec son irréversibilité du brisement
elle se mua en crépitation de grêle qui pénétra si loin dans la chambre
que ses gemmes d'eau vinrent se coaliser avec les encres du carnet
et comment après une telle pulsion de fragments
une telle frénésie de parcelles
un pas dans l'escalier
qui n'était pourtant pas le pas
avait le pouvoir de reconstituer toute une présence à l'étage de l'hôtel ?
qui n'était pourtant pas la présence
et d'où pouvaient bien tirer
après une telle absence
qui n'était pourtant pas l'absence
leurs parts de lumen et de résonance
les piètres détonations du feu d'artifice étésien ?
*
Lanterne
Pérenne lueur
au pied de la madone
écailleuse
De matinières courbes
symétrisent un bouquet
où flue du rouge sang
Joigne ma mélancolie
la nuit noire
aux fins d'épanouir
*
Phénix
C'était un temps indéterminé
après la bataille
le sang tout le sang
répandu
le cruor tout le cruor
était devenu lucide
à la manière d'une leucose lustrale
l'étoile hypogée
longuement s'y baigna
et se leva
délinéamentant les vols nouveaux
les armes
toutes les armes
traversaient la lumière
*
Myriam
le triangle que la lucarne entrebâillée meut
allume tour à tour les trois petits bouquets que Myriam avait composés au retour de cette escapade solitaire, utopienne et durée
gagnées par l'un des angles
les extrémités de deux allumettes d'oubliance
noircissent encore davantage
et assermentent les fusains des évocations sépulcrales
vêtue de sa nuisette liliale
Myriam les aura craquées
de toute cette foi sans paroles
en l'épiphanie des fleurs au vase de l'insomnie
un débord d'eau scintille
et à travers la transparence qu'il épaissit en perle
si lucidement brasillent les bracelets
par lesquels effusa
le diaphane des poignets serpentés de bleu
*
Canicule
sur le meuble veiné
parmi les vanneries à fruits
la lucarne donne
un triangle de lumière
il rehausse le rose
le rouge fraise
et le soliflore orangé
l'ombre de la corolle
broussaille au coeur une garrigue
le poisson de bois fauve
planté dans son losange
frémit d'un tel épanchement
où s'est annulée l'eau
*
Travaux d'automne
Un acrimonieux ouvrier s'élança mais
la main injonctive d'un collègue l'arrêta
et la petite vieille de gris et de mauve
pénétra leur nattage de silence et d'onomatopée
traversa le chantier
franchit l'échafaudage
et vint raviver au pied du bois suppliciateur
duquel on avait ôté son dieu
de meurtrissure et de pâleur
la flamme de la veilleuse
en déposant la grande feuille couleur d'ardeur
qu'elle avait recueillie
sur son itinéraire auroral
à l'extrémité de son arthralgie
*
Joyau antinomique
une feuille
affranchie de la frondaison
danseuse qu'ont passementée
toutes les métaphores aurifères
elle pourrait gagnant le vert
s'évaporer
mais en neige inverse la témoigne
un papillon jaillissier
*
La gratitude prodigieuse
les fleurs parme
que j'aimais retrouver près de l'orée
auréolées du tremblé des butineurs
ont été fauchées
je n'ai pas eu le coeur
de les abandonner à leur morose fatum de foin
j'en ai par conséquent recueilli un bouquet
je détache chacune des corolles
de sa tige sinuée de meurtrissures
et les dépose
comme une petite épiphanie de nénuphars
sur une assiette emplie d'eau
où elles roseclaireront encore un indéfini de jours
puis fanées
elles empreindront la faïence
dans le double cercle d'or et de grenat
qu'elles effleureront sans oser le débord
d'une profuse évocation d'ailes fossiles
*
Bestiaire sylvestre
parmi le silence
bruissé d'orle
du cri
poignit la lettrine
et la ramure en jaillit
actinies treillissant vers le ciel
tandis qu'entre les libers verticaux
une silhouette de cryptide
sertissait son instant
dans l'ardente répercussion du vert pluriel
*
La métamorphose
Sous l'inopinée
cascatelle
une adolescente déliant
ses longs cheveux de
jais
l'oubliance
des heures
en robe bleu pastel
elle a ouvert son cartable
les manuscrits
feuilles de grammaire
cahiers d'histoire
figures de géométrie
débordent
leurs encres serpentent un ru multicolore
Cette infatigable battue
qui natte les forêts
du silence et du nom
de l'espoir et de l'aboi
tout autour du village
tout au long des rapides
de la rivière
Où fulgore une joaillerie de vouivre
*
Nuance
Sur un degré
de l'escalier
qu'octobre pyrochrome
illuminait
par lequel je progressais
vers le jardin public
enlyré de l'absolu de l'enfance
ce morceau de papier
rouge
dont la mouillure
parut récente
Il manque
du cruor
quelque part
au plus guerrier des alizarines
*
Apesanteur
Tout le rose du jour
réuni en cet aluminium globulent
qu'a foulé mon pas
D'anthracites en automnures
de mélancolies en réembrasements
abstrait des directions
et de leurs contrats
il s'évertuera à décacher les jardins
*
Aux prémices de la fenêtre et de l'abat-jour
des émanations de croix
dans le trouble lamellé
du safran blême
un levant est supplicié
un rhombe lactescent
trémule d'asyndète
au mitan des armoires
orphelin de la clarté
*
Feuilles d'automne échancrées
et prestidigitatrices
des voies ressassées
sur des roses des vents
des roses des vents
se posent
et ma direction
avec ce penchement du buste consort
c'est contempler
les expéditions enluminées de leurs incidences
*
Concentration
Cet aboi
qui se voulut mystérieux
en témoignera le principe
et la défoliation lumineuse
s'empare de la promenade
marie
les rousseurs
avec les céladons et les ors
les citrons
avec les olivines et les écarlates
pour le jais jaillissant d'un freux
Sur cet aboi
qui sait désennuyer de l'azur
bifurque son brillant
*
Embellie mythologique
le clair-obscur repu du troupeau
sur une matinée déclive
où des arbres mélopent l'invocation
la nue échappant un faisceau
peint avec les frondaisons d'automne
l'ample frisson d'une toison d'or
*
Mademoiselle LIN
Je ne sais si
c'est le souffle d'un mot que
j'aurai prononcé
qui remue ainsi
zéphyrien
au-dessus de la table des repas
les feuilles indigo
pareilles à des ailes de papillons
que retiennent d'insoupçonnées tigelles
........................
Après que tu eus éprouvé une parole
qui te fut évocatoire
tu seras passée
et tu as laissé de ton vol fugace
étranger à la chair des yeux lugubrement sursitaires
cette empreinte qui n'en finit plus d'osciller
incalculables prolongements de mes sentiments pusillanimes
***
Soupçons mallarméens
I
partance_
pétale
qu'au bord de l'étang ma main
diaphane
en parme nacelle
échappe
embarcadère des ombres
II
sans plus de distance_
à travers l'entrebâillure
bruits de sabots
l'indéfini pétille
III
scrupules apyres_
couleur de feu
qui a rehaussé le bord du chemin
mue d'une flamme
dont les angles droits ne brûlent rien des cailloux
IV
vespéral_
épiphanies nébuleuses du rose
où sont silhouettées
les cimes-vouivres
V
l'arbrisseau verrier_
la caducité
en suspens
l'effeuillement
fait des proies
triomphantes d'incarnat
et de flamme mirabelle
au tremblé
au tournillé
au dansé du vitrail arachnéen
VI
sépulturées_
dans la voirie neigeuse
qui aura évincé la boue
pour préluder aux transparences
les feuilles d'automne
endormant leurs limbes ignescents
ont gagné un luisel
à l'enfance même du cristal
VII
du tréfonds_
pour que poudroie
le pardon
ose
un rai de ta lymphe
VIII
l'aube vespérale_
une épiphanie
cygne la bonace lacustre
cette nuit interminablement
sera attardée
par sa lacune immaculée
et passante
IX
rougenoir_
marinier
de la brise
un pétale
fait escale
un rai
telle une épingle
la pierre aussi
saigne
*
à l'orée du terrain
où atermoie le pas prochain
de la lampe aérienne
le freux oblique
le matin divisé
effuse une lumière de jais
X
flagrante douleur_
l'absence
où flambent les obliques
des feuilles dénutries
ce bûcher
où supplicier les feux mêmes
qui enluminèrent notre oaristys
XI
la dernière proie_
une sphère de soie
tissue de bleus et d'ors
lentement descend
vers l'appétition du jaguar
après quelques rebonds
sur la tacheture frémissante
elle roule les reliques du rouge
loin de la griffe pannée
XII
surréel_
les douze dernières marches
de l'escalier
s'évanouirent
dans le même temps que sonnèrent les douze coups
de midi
et je demeurai suspendue
appartenant par degrés
au poudroiement des horloges
XIII
les galaxies silenciées_
ce soir les flambois zéphyriens
de la forêt haussée au fusain
brûlent le poème mystique
transmis à l'encre d'étoile
sur le rouleau bleu de nuit
dont le souffle du déploiement
époudre le sépulcre lactescent de l'auteur
et le fermail de l'almageste princeps
XIV
émissole_
de leur vêpre imagier
les rides de la mer
réverbèrent l'irracontable aboi
XV
ophiure_
parfois elle rêvait
à cette métamorphose
pour embrasser au pluriel
XVI
néophanie_
ici et là
au sein des conciliabules paniques
on évoquait
la fulgurance des linéaments
qui suggérèrent le jaguar bondissant
les géométries es
sentiel
les de l
a vil
le ét
aient dil
ac
éré
es
dans l'impéritie plurielle
du sang bipède
engagé à contempler la merveille
là existait la seule effusion
sinon des diagonales de pétales
tournillaient
épiphanes des coloris et des formes
qu'ont créés des enfants de galaxies
au dire des survivances encrées
en les almagestes immémoriaux
XVII
fenêtre de l'embellie_
rose
un drap
cascatelle suspendue
et la vétuste lanterne
son rêve
d'y retremper la lande de ses cires
XVIII
la mort de la musique_
au coeur de la ville tumultueuse
cette feuille d'automne perforée
comme une déchirure de carton
du dernier orgue de Barbarie
XIX
de promenade en promenade_
depuis si long temps de rêverie
ce ne sont plus
des branches brisées
au-dessus de la rivière
les berges
pêchent à la ligne
l'éternité du courant
XX
rescousse_
enluminures des carreaux
pointillés des réverbères
serpentements duals des voies
parsemis du contrebas
les lueurs de la ville
à l'orée de la nuit
vont mosaïquant un phare
pour guider la cathédrale
sur la mer de brume
XXI
respir_
air
musicien
tu aquarelles
un silence
nue de rose
la rumeur de mon sang
XXII
matin floconné_
à travers le ciel
pour toute une lame
longue
est volé l'oiseau
longuement
elle ira éventrant
l'escarcelle ardoise des neiges
pourvoyeuse du méconnaissable
XXIII
le pleur-ciel_
sur la veilleuse
de la tombe
cet ange peint
les yeux clos
sous la flamme
surabonde
sa réserve de larmes safran
XXIV
Zhoushan_
quelle invisible bienveillance
a déposé
sur la tombe
de LIN
cette libellule
à laquelle il manque
une aile ?
elle n'est plus et
c'est un joyau
où flue l'arc-en-ciel
XXV
séjour_
j'aime, au bout de tous mes nomadismes, revenir dans ce logis qu'on appelle "la petite chambre", foyer où d'abord convergent toute sorte d'inflexions de voix insaisissables, pour s'éteindre par degrés, et ensuite faire saillir, laisser peser, le fruit du plus nourrissant silence ; la récurrence des oiseaux de couleurs baignant dans la lactescence des voilages, qui ne les dilue cependant pas ; et ceux-là qui sont gorgés de la nuance rouge sang tendent ardemment vers l'incandescence vermeille de la poignée qui claire la promesse du vol et du ciel
XXVI
sagittaire_
la brume estompe les arches du pont
dardées
les tours dans l'immobile
les feuilles d'automne adverses à la résurgence des rais
les flèches de jais pour la cible et l'aile affines
XXVII
ravisseur_
à chacun des tours que j'accomplissais, se développait un peu plus le bonhomme de neige qu'au centre du terrain façonnaient concordamment une femme et une enfant emmantelée de rose. Soudain j'entendis un hurlement, je vis un corps prosterné au-dessus d'un petit corps gisant, au coeur de la blancheur vaste qui en accentuait la roseur jusqu'au rouge, dans le même temps que la créature de neige s'enfuyait à toute allure avec le butin de la vie
XXVIII
couronnement du surréel_
une longue suite
de traits d'ombre
au bord du terrain
ma main
sait les rassembler
telles des tiges
et mon pas
sait partir
à la recherche de leurs corolles
XXIX
nocturnal_
j'ai recherché longtemps
l'homme qui courait chaque matin
et qui déployait l'aube derrière lui
mais tant de verticales autour de moi
qui furent les fugaces succédanés
où le noir des oiseaux vigile en corolles
XXX
émancipation _
à la pointe de chacune des branches de la rose des vents s'exhalait ce cerf-volant même que la main vulnéraire de l'enfant est sur le point d'échapper quand promener ainsi le ciel en laisse va meurtrissant jusqu'aux bleus les météores de son regard
XXXI
legs périhélie_
au pétale rose
j'ai remis
le demeurant de ma vie
le vague va scénographiant
les palindromes de la durée
à l'acmé diaphane
XXXII
arborescence_
du titre d'une pièce lointaine
une Égypte onirique m'ennuage
par ses pulpes généreuses
un sycomore m'a engourdie
à son écorce le sommeil m'adosse
et parmi le succès nocturne
les palpitations exquises
qui fleurissent ses ramées
vont constellant ma scène assoiffée de réplique
XXXIII
ravissement_
mes soifs s'étanchaient surtout
à sa lenteur clarinée de verseuse
tout autour de la cascatelle de thé
couleur d'aurore éclosière
l'immuance en céramique bleue
des papillons kyrielles
XXXIV
après la giboulée_
gifle de neige
donnée à ta pierre tombale
dans l'ovale dédoré
le visage fond
à chacune de tes transparences
fait escale l'arc-en-ciel
XXXV
juillet nué_
une jaillie
nielle de son oiseau
l'azur
son éploiement nébuleux
souffle et relustre
les coquelicots frumenteux
XXXVI
cardiaque_
prélude à l'automne
le sinué des feuilles
et leur diagonale plurielle
inachevable estompement des fûts
systoles vermeilles et or
de brise
qui approchent le coeur
XXXVII
la vieille maison_
les volets de grenat
sont déclos
les carreaux
brûlent de corolles garance
bûcher des reflets
et du fantôme qu'ils déguisent
XXXVIII
effeuillaison_
en deçà même
de la brise
des légers d'air
soufflent
à travers les cimes ourleuses
et le jaune de prodigalité
luit sur l'étang
tant de nacelles de vacance
et d'évagation
XXXIX
automne liquide_
l'escalier
qui mène aux lointains des tours
n'est plus que gouttellements
et feuilles lancéolées
mon pas
une lente nacelle itérative à contre-courant
des ruisseaux déclives de flambes glacées
XL
imagination marine au salon_
au pied de l'écran
le coquillage retourné
béant
libère des ressacs
des embruns d'images
XLI
du feu au feu_
ma tempe effleurée
par l'oiseau de cendre
ma pensée fugitive
déjà évanouie dans le brasier urbain
XLII
de la lampe à la lampe_
l'abat-jour matutinal
avec sa lumière safran
coule
devient un ruisseau
tout le jour
je marche sous la pluie battante
jusqu'à ce grand lac
qu'allument les feuilles d'automne
XLIII
voleurs d'éclats_
les intermittences des nuées
rallumaient sur l'édifice
les ors dont les griffons s'étaient demi-vêtus
de passage en passage tramant une envie
tumultueusement des freux
iraient diminuant l'ascendant d'un soleil
XLIV
impressions d'église_
de très hautes ouvertures, nutricières des rêves du vitrail, allument les ors qui ceignent, enrubannent ou arment
la blancheur éclatante des suggestions qui vêtent les hagiosomes consume le succès de la matière
une mélancolieuse musique sera récurremment discontinuée par cette tousseuse spectrale que je tiendrai pour une moniale lorsqu'elle aura trouvé l'espace et le temps du cimetière de mes fées
XLV
vitrail résurrectif_
ce rai
de tous les franchissements
autour duquel s'étoffe
ton épiphanie
XLVI
messidor après la guerre_
tant de sang linceulé
de nocturnales cyanées
à déblondir pour jamais
nos moirures de pain
XLVII
relèvement d'entre..._
partout
dans la maison de Marianne
des fragments de craie
multicolore ossuaire sporade
et l'enfant Louise
infatigable à redessiner
à rédimer
à réinventer le corps sur le tableau noir
XLVIII
ravissement_
il traversait le long clair-obscur de la forêt
lorsqu'il franchit la lisière
il s'aperçut que le bouquet
qu'il avait ourdi de musarderie
en musardise à travers les champs circonvoisins
était entièrement effeuillé
médusé il essaya de revenir sur ses pas
une brume parme, des linéaments incarnats, des ondes bleu effaré
allaient métamorphosant et approfondissant le clair-obscur
il desserra la caducité de son poing
et tandis que les tiges sans pétales s'échappaient
aux fins de joindre l'humus
le sublime lever de sa main fit une étoile éclatante
XLIX
numineux_
à l'entrée du village, en venant par l'ouest, l'une des toutes premières maisons qui paraît est presque centenaire
malgré les mois passés dans une chambre voisine, je ne sais pas si elle est habitée et tiens à l'ignorer toujours
certains signes de présence récurrente, tels ces carreaux nués de parme soudain ou de la soierie d'une inflexion de voix, suffisent aux appétences de mon imagination
la façade donnant sur la route des imminences commence en blanc granuleux et se termine en larges bandes de bois brun foncé
cette seconde moitié plus près du ciel est parsemée d'étoiles déclinant toutes les délicatesses pastel, qui semblent continûment s'effuser d'une demi-lune rivée telle une estafilade de chair argentine
L
sanguine_
parmi la façade
que le courre insole
des dorages léoninent un découpage
dans le dernier quart des degrés
qui me dévoient et qu'il domine
les mines de mes carotides exécutent une proie
LI
éphémère_
j'ai trouvé dans une forêt
trois glands encore à demi protégés
par leurs demi-coques
et réunis par une ramille
je ne me lasse pas d'en contempler l'harmonie
et de recevoir cet apaisement
de l'intensité presque nitescente du vert olive
il prononce l'éternel
il semble qu'il durera toujours
à travers mes appétences mes exigences
à travers mes langueurs
à travers les transformations les corruptions
et bien après que j'aurai disparu
il accordera une parcelle
où pressentir mon regard accompli
LII
transmutation_
le couchant
mais essentiellement ce qu'il fait de la chambre
avec l'instrument de la fenêtre en mansarde
que j'ai entrebâillée
instrument
car il y a imminence musicienne
et même organe
car il y a le vivant s'évertuant
comme il appose le tremblé
de ses quadrangles mirabelle
sur les fleurs prasines de la tapisserie si éclose
un devoir de différence empreint les corolles
une exigence de cloison fée
un nectar et son butineur naissent
de la reluctance du jour qui expire
LIII
misère miraculeuse_
cette voix goujate et piètre incarcère la forme acuminée entre les contrats d'une tache qui avilirait le tapis de la chambre
(rire triste et vigoureux)
or l'heur de la fantaisie a saisi là tout un ichtyoïde pour s'épanouir
et le reliquat d'arantèle suspendu au plafond patiente jusqu'à l'aubaine des pêches
il n'est pas exclu qu'accompli le poisson s'évade par la fenêtre en mansarde parmi la persuasion de pluie marine
il restera toutefois l'étoile liliale de la taie d'oreiller
sa nage tranquille en le vêpre onirique
à côté de mes veules appâts
tandis qu'en une dernière foudre mince
s'évanouira le fil
LIV
fraction d'octobre_
la bruine perlière
platine l'effeuillement
sanguines digitées
et xanthies
nervurent ce rêve
de transparence
où passer la saison de méchoir
LV
aumône_
mon coeur
en oripeaux de mendiant
pour ce rai du levant
vaisseau pollinique des voilages
LVI
réconfort_
de carreau
en carreau
le serpentement
d'un flocon
sa morsure de fraîcheur
dans le sel de mon pleur
LVII
crayonnage d'enfant_
entre le bonhomme de neige
et la fillette rose
un coeur orangé
qui le dispute à l'arbre
pour affruiter les nuages
LVIII
au cimetière de Zhoushan_
au travers de mes pensées
la ravissante libellule
et l'éclat joignant l'éclat
m'est soufflée la solution
LIX
partages_
s'élucide et s'irise aujourd'hui le foyer de la force qui me fut donnée au moment où il fallut lever avec ton père et ton frère le poids de ton cercueil blanc
quand je vois cette libellule inlassablement revenir entre le ciel et ton stûpa infatigablement prenant sa part de mes journées sans trajectoire et sans réponse
LX
ailes soeurs_
j'escompte retourner à Zhoushan en oiseau parent de ta cendre et en résurgence surprise de transpercer le fabuleux
LXI
le cryptide hyalin_
dans l'angle du carreau
se réfléchit le crépuscule de la chandelle
un félin mûr
tombant de l'arbre
en est pénétré
au milieu de la cour se figeant
son regard
est un oeil bleu cendré et une flambe à l'équerre
LXII
oiseaux des voilages_
après si long temps d'imminence
la croisée polychrome
s'essore
loin de l'ouverture amblyope
LXIII
le temps_
deux oiseaux
noirs
s'envolent
la frise des cimes
les
subsume
sur le cadran
qui rougit l'heure
au bord du stade
il manque
le trait lumineux
de la morte minute
LXIV
aube_
à la pointe de mon bistre insomnieux
se perce et se dilacère
le vague fuligineux des masses émergentes
il en jaillit des corolles hiémales
qui arquent en roses un ciel
au-dessus de la cour
que viennent furtiver des gemmes de félins
LXV
adoptions_
aussi je consacrai
des journées entières
à parcourir les voiries
pour recueillir les étoiles foulées
et dans la modicité
de ma paume s'incurvant
ces denses orphelines des altitudes
savaient étancher leurs soifs
LXVI
stûpa_
entre l'huile sacrée et le volume cinéraire
enfin je les ai réunis
les livres que nous avons partagés toi et moi
ô ma vie de nomade légère
mon bagage est devenu idéal
et sur la terre hospitalière
de chambre en chambre toujours je vais
où ton filet de voix réitérée
d'entre les reliures de notre bibliothèque funéraire
me destine le poème de notre perpétualité
LXVII
calligraphie_
c'est en chancelant passant du fuligineux
que je t'appelle
avec la gravure du zénith
allumant sur le stûpa
les traits thésauriseurs qui te donnent ton nom
LXVIII
transabîme_
chaque jour je reprendrais le poème qui eût métamorphosé le pierrier où neigea le jais de ton dernier regard
un jardin pour que le parme le dispute au blanc et l'inde au rouge aux fins de lisérer de corolles nos passages tout le long d'une durable saison
LXIX
lux_
au-dessus des cires épuisées
éparses à même la dalle
qui scelle tes cendres
au-dessus des ors calligraphes
qu'équinoxes et solstices vont dépeignant
une escale poudroyante
avitaille la libellule
j'en raviverai au débord de minuit
les iridescences
à l'instant d'allumer la lampe qui prie
pour veiller sur nos souvenances
LXX
foyer_
de fête
de radiophonie
d'acrimonie
de trivial
toutes les voix
ont convergé vers ma chambre
pour natter le silence
le papier insondable
où le mot lilial
vagit
LXXI
le premier jour de la leucémie_
ce matin-là
entraient dans le lac
pour y prendre leur bain
six éléphants
c'est que bien sûr un petit cirque était de passage dans notre ville pour quadrupler son spectacle et nous sourit bientôt son chapiteau multicolore tout environné d'autres pittoresques rescapés de l'arche de Noé
mais la vision avait coïncidé
avec l'insolite éclabousseur de ton sang
LXXII
partance_
les corolles parme
entrebâillent l'air
mon corps atteignant à la taille
de l'imminent coulé
il me reste cette oeillade
pour les chrysocales de l'ossuaire
qui parsème le chemin parcouru
***
Loup-de-lune / LIU Bizheng
Modifié par Loup-de-lune, 18 mars 2022 - 11:10 .