Il n'est plus temps de voyager
Le temps est une nuit constellée
de petits rubis à la saveur saline
qui, sans bruit, nuée assassine ,
de la terre , le sort a scellé.
Dans chaque vers, je fuis ,
au compas du voyage,
sur des chemins sans âge
pour y chercher l’oubli .
Chemins qui ne mènent nulle part,
la vie n’est-elle qu‘errance,
pourquoi une telle urgence
pourquoi chaque départ.
Des trains, des avions, des tapis volants, des rêves,
des voyages qui mènent presque au bout de l'enfer.
sur la mappemonde où, chaque jour se lève
un nouveau soleil errant entre deux mers .
Rivages, visages, regards , cœurs , j'ai voyagé,
côtoyant les abîmes et les vallées secrètes,
aux portes du sublime où des peuples oubliés
ceignaient leur front de cendres aux soirs de fête.
J'ai adoré la grandiloquente nature,
ses fulgurants éclairs au cœur de la tempête
mais pas le monde offert comme une imposture
où au cœur des forêts ,des géants courbent la tête.
Rivages trompeurs , le vert cache de noirs écueils,
l'exotisme perverti sous le masque des couleurs.,
où l’or et l’encens enchâssent les cercueils,
coeurs d’un bois dur qui ne sent la douleur.
Sur terres, il ne reste qu'un homme, un seul,
rescapé du déluge,il délire et il pleure
son Pays en détresse, blanchi de linceuls ;
de vains sanglots que Nature tient pour un leurre,
offert aux yeux des journalistes qui déballent
à des spectateurs comblés, des morts, la liste,
alors que sur le front les trompettes ouvrent le bal
et de noirs figurants envahissent la piste .
.
Voyageur, toi qui es de passage as-tu écouté
derrière les riches et somptueux ouvrages,
les rumeurs qui hantent les jardins ombragés,
où la peur a pris la place des si gais ramages.
Entends les feux qui crépitent aux portes dorées,
ce ne sont pas des pétards, ni des feux d'artifices
mais sous les flonflons de la fête chamarrée,
des gens qu'on fusille, des corps au supplice.
Et le petit matin contemple le temps aboli .
Comme un tourbillon, le présent emporte tout,
la vie, les illusions, le passé défini ;
pourtant, il faut aller en voyage jusqu'au bout.
Le jour est une longue nuit constellée
de petits rubis à la saveur saline
que disperse une nuée assassine
sur la terre dont le sort est scellé .