L'Ombre en hiver
Je m'étais toujours demandé quelle pouvait être la couleur du silence.
Moi qui ai l'âme grise de tant d'absences, je ne savais pas qu'un jour, une ombre me donnerait la réponse.
On dit que les anges veillent, on a raison de le croire.
On dit que ce sont des ombres et qu'elles sont bienveillantes.
Or, cette ombre qui avait envahi l'allée des Exburies de mon cottage, m'avait un moment inquiété.
De l'angoisse de ceux qui savent qu'ils vont perdre un être cher.
Pourtant, à n'en point douter, elle était l'ombre d'un ange, dense et sombre comme celle des cyprès aux bords d'un cimetière.
Et elle avait la délicate attention de prendre soin de mes fleurs.
Elle ne leur faisait aucun mal, je lui en savais gré, je n'avais plus peur.
Rassuré, je passais mon temps avec elle, obombré par sa présence.
Elle avait pris possession de mon espace intérieur meublé de bois clair, peuplé de livres anciens aux tranches dorées.
Je ne sortais plus. Je restais des heures dans le salon à écouter la Trauermarsch de Mahler, à lire un poème, toujours le même.
Elle était là silencieuse, partout dans ces lieux jadis tant éclairés par la lumière des jours heureux. Or voilà qu'ils sombraient peu à peu dans les ténèbres.
Le bois de la bibliothèque devenait d'ébène, les livres se recouvraient d'une poussière si sombre qu'ils disparaissaient dans l'absence.
Tout virait au noir: le velours bleu de mon fauteuil, la porcelaine blanche du service à thé, les motifs rouge et or du tapis d'Orient, et même les tableaux aux teintes autrefois lumineuses accrochés au mur.
J'attendais patiemment qu'elle veuille bien me dire un mot.
Mais je savais aussi que toujours elle se tairait.
Elle n'avait rien à me dire que je susse déjà.
31 octobre 2008
Je m'étais toujours demandé quelle pouvait être la couleur du silence.
Moi qui ai l'âme grise de tant d'absences, je ne savais pas qu'un jour, une ombre me donnerait la réponse.
On dit que les anges veillent, on a raison de le croire.
On dit que ce sont des ombres et qu'elles sont bienveillantes.
Or, cette ombre qui avait envahi l'allée des Exburies de mon cottage, m'avait un moment inquiété.
De l'angoisse de ceux qui savent qu'ils vont perdre un être cher.
Pourtant, à n'en point douter, elle était l'ombre d'un ange, dense et sombre comme celle des cyprès aux bords d'un cimetière.
Et elle avait la délicate attention de prendre soin de mes fleurs.
Elle ne leur faisait aucun mal, je lui en savais gré, je n'avais plus peur.
Rassuré, je passais mon temps avec elle, obombré par sa présence.
Elle avait pris possession de mon espace intérieur meublé de bois clair, peuplé de livres anciens aux tranches dorées.
Je ne sortais plus. Je restais des heures dans le salon à écouter la Trauermarsch de Mahler, à lire un poème, toujours le même.
Elle était là silencieuse, partout dans ces lieux jadis tant éclairés par la lumière des jours heureux. Or voilà qu'ils sombraient peu à peu dans les ténèbres.
Le bois de la bibliothèque devenait d'ébène, les livres se recouvraient d'une poussière si sombre qu'ils disparaissaient dans l'absence.
Tout virait au noir: le velours bleu de mon fauteuil, la porcelaine blanche du service à thé, les motifs rouge et or du tapis d'Orient, et même les tableaux aux teintes autrefois lumineuses accrochés au mur.
J'attendais patiemment qu'elle veuille bien me dire un mot.
Mais je savais aussi que toujours elle se tairait.
Elle n'avait rien à me dire que je susse déjà.
31 octobre 2008