Y'en à qui vivent dans des palais
Flanqués de glaces et de tapis
Y'en à qui vivent dans des taudis
Suant de crasse sentant mauvais
Y'en à qui vivent dans le métro
La moitié de leur journée
Y'en à qui vivent d'un marteau
Sans espoir d'en pouvoir changer
Mais moi, je voudrais vivre avec toi
Y'en à qui vivent pour des mots
Que d'autres ont déjà prononcés
Y'en à qui vivent comme des héros
Dont les cendres sont oubliées
Y'en à qui vivent pour un chien
Sans autres préocupations,
Y'en à qui vivent pour presque rien
Immenses troupeaux de moutons.
Mais moi, je voudrais vivre avec toi
Y'en à qui vivent sur l'ouvrier
Et entretiennent sa misère
Y'en à qui vivent sur l étranger
Et les chantiers qu'il lui font faire.
Y'en à qui vivent d'un baiser
Deux cent francs pour un peu de vice
Y'en à qui vivent pour payer
Les bouches qu'ils baisent et qu'ils nourissent
Mais moi, je voudrais vivre avec toi
Y'en à qui vivent parc'qu'ils ont peur
De mourir sans les sacrements
Y'en à qui vivent des bonheurs
Fabriqués à grands coups d'argent
Y'en à qui vivent mais qui sont las
De vieillir jour après jour
Y'en à qui vivent pour l'audela
indifférent et sans amour.
Mais moi, je voudrais vivre avec toi
Y'en à qui vivent sans trop y croire
Dans les rues du quartier latin
Y'en à qui vivent pour la bagarre
Et lance un pavé pour un rien
Y'en à qui vivent un amour
Dont le fruit est inopportun
Y'en à qui vivent jour après jour
L 'angoisse du dernier matin
Mais moi, je voudrais vivre avec toi
Y'en à qui vivent en rèvant
D'être autre chose que ce qu'ils sont
Y'en à qui vivent en pensant
Que demain leur donn'ra raison
Y'en à qui vivent enfermés
Avec la clé de leur prison
Y'en à qui vivent condamnés
Par les excés de leurs passions
Mais moi, je voudrais vivre avec toi
Y'en à qui vivent pour des idées
Qu'il faut payer d'assassinats
Y'en à qui vivent pour des combats
Et des guerres qu'ils ne f'ront jamais
Y'en à qui vivent du sang des autres
Sans pouvoir assouvir leur faim
Y'en à qui vivent en apôtre
La puissance des assassins
Mais moi, je voudrais vivre avec toi
Y'en à qui meurent de trop manger
Ou d'trop jeuner parc'qu'ils sont las
Y'en à qui meurent pour des idées
Parc'qu'ils ne les partageaient pas
Y'en à qui meurent pour un baiser
Une caresse où un frisson
Y'en à qui meurent d'avoir aimer
Ce qu'interdisait la raison.
Je voudrais mourir avec toi
Et en te tenant dans mes bras
Te redire une dernière fois
Je veux vivre avec toi.
Pau 1976