
Ni cri ni geste
Carmen VI: Ruptures musicales
Rien. Ils ne s'écrivent pas. Ni cri, ni geste.
Lui, introduit son pas silencieux en elle, reine altière et mélodieuse. Lui toujours, position basse, attitude presque aptère, dans l'attente immobile d'Elle, prêt à pénétrer dans sa voix écartée, développe son corps aux muscles tendus.
Magnifique est son jet, son assemblé presque désarticulé, son enchaînement déclinant l'espace celé, rat aux dimensions célestes, déstructurant les lois humaines qu'il obère en prince du geste.
Point d'arrêt. Dans son ascension, son regard la suit, son geste guide sa voix. Sa voie accentue son pas et le porte vers des octaves aux faussets périlleux dans cette course mélismatique.
Contre-ut. La fugue est inutile, elle est à lui, possessive mais captée.
À Lui Elle s'enchaîne fragile, re-liée à la virtuose motilité de son geste.
Son émis. Son Élu. Point d'orgue. Émission voluptueuse et souriante, troublant l'éther, aérée, aérienne, dans son ambitus vertigineux, chiaroscuro de l'essence même de sa voix au torse des résonances illimitées.
Enfin, l'extase. La connexion sexuelle. L'Eros convoqué.
La provocante production sonore, cambrée, apertement reproductive, ouverte à l'enfantement du chant désiré, dé-cambrée sur sa corde tendue aux vibrations perdues en Lui.
En émissaire soudain 'falsetto', Il s'écrie en Elle, réceptive, délurée, diluée.
Elle aussi, ces cris vers Lui.
Colorature exposant l'argument chromatique aux entrechats agiles de sa danse macabre aux sissones coupantes, comme autant de réponses libérées des arabesques de son Sultan qui danse en Roi.
...
[juillet 2007]
La voix s'articule parfois à l'instar du geste...