
[Prologus]
Les hommes fatigués de leur vie de labeur
Recherchent le repos et beaucoup la douceur
Qu'offrent les bras de soie des belles de leurs nuits,
Repus du grain sacré, ivres du sang du fruit
Des vignes d'Eleusis, ils s'endorment rêveurs
Sur leur ventre arrondi, rendent grâce au bonheur
Des lendemains de peine. Ils iront à la fête
Que donne Cérèsa au-dessus de leur tête.
[Carmen I]
La blonde Cérèsa se répand sur le monde.
Pour le corps et l'esprit, elle offre en abondance,
Sous son ciel pellucide où volette l'aronde
D'éternelles moissons, des fêtes, de la danse.
La belle Cérèsa est assez bien gironde
Pour vivre de sa joie, se nourrir d'espérance,
Porter robes de soie - les plus belles au monde,
Rapport esthémantique à sa belle prestance.
La blanche Cérèsa aime - une parembole -
Le doux fruit de son sein, la sublime Coré,
Qui le Jour vagabonde oubliant son école,
Recherche d'une fleur l'arôme édulcoré.
[Carmen II]
Sadhé, le tenancier de l'antre de la Nuit,
Dans sa Chevrolet noire, étincelant carrosse,
Surgit concupiscent et de Coré épris,
Défait le grain sacré de l'enfant de Chronos.
Il en fait l'égérie d'un Club du nom d'Ang' Hell,
Une fleur de la nuit une Salomé nue,
Que les hommes perdus adorent en Cybèle,
Louent son beau pas de danse et son air ingénu ;
Sadhé se réservant les printemps de Coré,
Proférant son amour en semence létale,
Flétrissant son sein blanc en vaine vénusté,
Interdisant son nom narcisse coronal.
[Carmen III]
La noire Cérèsa fait décliner le monde.
Tordue en son malheur, en sa rage indécente,
Monnaye le bonheur dans le commerce immonde
D'une poudre léthale, insipide Népenthe,
Vengeresse déesse, émiettant sur les ondes
Ses messages de haine empreints de violence.
Toutes les nuits, les corps, quand le désir abonde,
Restent immaculés de noires lactescences.
Et pourtant le mortel - elle est encor l'Idole -
Lui est toujours fidèle et l'honore en silence.
Apaise la fureur de cette pauvre folle !
Bois encor l'or du blé malgré son exculence !
[Epilogus]
Ami, rêve et admire à l'Ang' Hell tard le soir,
C'est Elle que tu vois blanche et belle en journée !
Quand Sadhé la dévoile en habit de cuir noir
Et t'offre le nectar de sa belle tournée.
Cérèsa l'attendra ces quatre longues heures
Funestes pour son cœur où coule le Cocyte
Durant l'orgiaque danse aux rythmes tapageurs
Le temps de te réjouir de la Mort qui l'abrite.
© Mai 2007
Dix ans déjà, ce récit rimé ...du désespoir de Cérésa