Ô vous mes souvenirs, mes ombres du passé,
Qui hantez les recoins de mon cœur harassé ;
Vous qui fûtes ma vie et tissâtes sa trame,
De joie en grand bonheur et de dispute en drame ;
Vous qui accumulez, depuis mes premiers jours,
Tous mes instants de vie, additionnant toujours ;
Vous qui savez encore, au fond de ma mémoire,
Le tissu de ma vie, cette changeante moire ;
Vous qui savez les noms, les personnes, les lieux,
Les amis les plus neufs, mais aussi les plus vieux ;
Vous qui, jalousement, gardez la moindre phrase,
Chaque intonation, sous-entendu, emphase,
Qui savez de l’esprit le mélange éclectique
Et du baiser d’amour la décharge électrique ;
Vous qui savez les nuits, les fêtes et les veilles,
Et qui vous souvenez de toutes ces merveilles ;
Vous qui avez tissé, chaque jour, un destin,
Et repris ce travail chaque nouveau matin ;
Vous êtes de ma vie la lourde couverture
Qui me tient bien au chaud, me berce et me rassure.
Chaque instant précieux et souvenir nouveau
Est un long fil de plus autour de l’écheveau
D’où l’on déroulera le long fil de ma vie
Qui, sinueux, serpente et, en chemin, dévie.
Oui vous, mes souvenirs, qui savez tout de moi,
De ma plus douce larme au plus intense émoi,
Restez en moi toujours, demeurez-moi fidèles,
Que je puisse chérir vos pages les plus belles,
Ne me laissez sombrer _ aux limbes, suspendu _
Dans ce chaos où vit l’esprit qui s’est perdu ;
Laissez-moi profiter, pendant mon temps sur terre
D’un esprit vif et plein, et d’une pensée claire.
15 avril 2015
en pensant à la maladie d’Alzheimer
et à Marylou, amie poète, qui en est affectée.