Je faisais visiter mon jardin à une vielle américaine qui n'avait pas d'opinion
La laissant
Du fonds de la cour je vis venir descendant la rue une mère et son enfant.
Elle est en noir, boursoufflée et malmenée par son poids.
Lui en blanc, filandreux, avec un bob vissé
Chahutant vif et bavard.
Il dit en trottinant des mots qui n'existent pas car il est petit.
Mais elle ne l'écoute pas occupée à masser son épaule rongée par le soleil.
Et cela faisait de loin un bruit flasque, comme une bouée affalée quand elle chahute des rochers,
Laissant chuter de sa main gauche un vieux parasol elle dit "das weg".
Ne sachant pas ou ils allaient j'imaginais les chemins des vignes ou des sentiers ombreux,
Les protégeant du soleil meurtrier.
Mais je ne voyais pas qu'avec de si minuscules ou de si grosses jambes ils puissent encore aller.
Alors, n'y pensant plus, l'qprès-midi aidant, je fis un somme à l'ombre des figuiers plantés là.
Puis je fis un rêve dans lequel ils apparaissaient chemin faisant.
C'était à l'envers.
Apparurent en songe un ange immense
Et une sorcière avide suivie par ses cohortes.
De leur lutte je ne vis rien car
Levé de mon hamac, ces songes disparaissant, je dis à l'américaine
Qu'l était temp qu'elle s'en aille.
Le soir venant.
Mais je compris que je vis
Ce qu'il est interdit de voir.