boxeur groggy dans son coin,
il sent la brûlure bienfaisante
de la serviette humectée
sur ses paupières alourdies
par le froid, cruel aux pauvres,
l'alcool, triste compagnon
de ses jours,
l'insomnie, terrible compagne
de ses nuits
le savon court sur son corps,
parfois lui échappe, et il retrouve
sa jeunesse, en un éclair,
la sensation de cette même main
caressant le ventre d'une truite
dans son trou ou sous un rocher,,
prête à glisser entre ses doigts,
et cette joie, mêlé de la crainte
aussi de perdre un trésor
à sa portée, mais aussitôt enfui
empoignant la serviette fumante
par les deux bouts ,
il déploie maintenant dans son dos,
le compas de ses bras noueux
qui décrivent de grands cercles
en une danse des rubans chinoise,
pleine de fougue, folle et endiablée,
qui l’emporte au bout du monde
dans une joie enfin retrouvée
il se frotte, il s’étrille sans fin
comme le faisait son grand-père
avec sa jument, les jours de marché,
il redevient l’enfant qu’il était,
insouciant et gai, heureux de vivre
et de gambader dans les bois
il explore la géographie de son corps,
les territoires inconnus, oubliés
avec étonnement, avec émerveillement,
et pour un instant,
il retrouve le bonheur
du temps d’autrefois, intact, préservé,
en une renaissance, une résurrection
qu’il n’espérait plus
Et le voilà, lui, le paria, le désespéré,
qui pleure,
mais de joie