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Gazon maudit
Vous étiez Gabrielle, une inconnue étrange
Qui passait dans ma rue plus belle que l'archange,
D'un battement d'aile, moi qui semblais un ange,
Vous m'avez soulevée de rêves qui dérangent.
Et je vous ai suivi, jusque dans cette chambre
Où l'encens parfumait en volutes envoutantes,
Nos voiles qui tombaient en de tendres méandres
A la lueur docile des désirs en attente.
Vous avez doucement défroissé les draps fins
Qui couvraient mes plaisirs toujours inavoués,
Sous vos doigts j'ai muée de diable en séraphin
Je me suis découverte, aux baisers dévouée.
Et vos cheveux défaits de rivières en crues,
Débordaient sur mes seins leurs limons satinés,
En redressant des monts que je croyais recrus,
Ils ouvraient des vallées de leurs flots obstinés.
Les flammes dans nos yeux, loin dessous nos paupières
Embrasaient sous nos mains les pudeurs qui retiennent,
Et consumant mon cœur que je croyais de pierre,
Étincelaient mon corps de mille et un « je t'aime »
De la lave coulaient de nos bouches entrouvertes,
Rougissant la morale, à nos feux débordant,
Nous étions toutes deux sur notre ile déserte
A l'abri des pécheurs, des prêcheurs sermonnant.
Je dirai aux hommes qui se croient si magiques
Qu'à accorder les femmes ils sont bien trop parfaits,
je vais en les laissant à leurs vaines musiques
Conjuguant désormais l'amour à l'imparfait.
