Il me revient
Encore
Ce souvenir
Enfoui
Dans la ouate
Du temps
Intérieur
Il était le petit nouveau
De la classe
Nous étions tous
Des tricotés serrés
Tuques de hockey
Et cahiers Canada
Et lui nous arrivait
En début d'année
Avec ses cheveux bouclés
Son regard clair
Et ses pieds noirs
Son accent nous disait
Qu'il venait de France
Mais lui affirmait
Venir d'Algérie
Nous n'y comprenions rien
Mais nous étions fascinés
Par sa voix douce
Et sablonneuse
Comme un vent
De levêche
Chuchotant son exotisme
Aux oreilles glacées
Des gamins d'Amérique
À la sortie des cours
Nous formions une horde
Comme des loups autour d'une brebis
Pour l'accompagner sur le chemin du retour
Et nous l'écoutions raconter
Le parfum de sa Méditerranée
Sous un ciel bleu et lumineux
Et les bergers descendus
De ses montagnes
Et les caravanes
Venues de son désert
Nous étions envoûtés
Un jour, il nous avait invités
Dans son immeuble
À l'extérieur du quartier
Un appartement sombre
Où il nous avait fait écouter
La mélancolie
De sa mandoline
Une claire mélodie
Où son père avait disparu
Dans les yeux de sa mère
Il ne resta que quelques mois
Dans notre école
Sa famille partie ailleurs
Sur d'autres chemins d’exil
Aujourd'hui
J'ai oublié son nom
Mais quand je vois
Un enfant à la peau sombre
Qui pleure son pays
Je pense à lui
Et mon cœur s'ouvre