4 réponses à ce sujet

[RUDELLE Jean-Pierre]

                                                                           Une odeur adorée remonte la longue route de ma mémoire. Perdu là-bas, dans l'innocence de l'enfance, aujourd'hui senteur toujours magique, elle m'ouvre le chemin vers les images floues cachées dans les arcanes des souvenirs. Ainsi arrive sans crier gare, l'objet lié à cette odeur. IL me reconduit vers mes premières années de la découverte du monde.
                                                                           Senteur aux notes sibyllines, ensorceleuses offrant l'ivresse d'un breuvage interdit venant d'un pays lointain; odeur qui savait également porter un visage; visage connu, si doux et pourtant trop flou aussi; visage de ma mère dont je ne saurais connaître le regard comme un geste souhaité plein d'amour; visage presque invisible de nos rencontres épisodiques remplies dans la froideur de ne pas se connaître. Cri d'un enfant désirant sentir une main pleine de tendresse pour le guider dans les premiers pas de l'enfance. Pouvoir construire vers les années adultes l'image heureuse d'un bonheur  que l'on ne saura jamais dessiner, malgré cette soif pleine de gestes tendres, joyeux, remplis de lumière. Un cri, un appel. Oh ! Toi ma mère pourquoi tu n'as pas voulu ou su prendre ma main d'enfant pour me guider dans les premiers pas de la vie qui me devient solitaire.
                                                                          Toute cette déchirure, vient me conduire, tel un baume bienfaiteur, à l'image pleine de senteur de ce premier plumier debois laqué noir, une image incrustée sur son couvercle. Dessin aujourd'hui perdu dans l'immensité des années pareil à un vertige. ais il me reste ce parfum qui comme un mirage se plait à reconstruire cette vision adulée d'un plumier en bois laqué noir et rouge vif à l'intérieur. Trois compartiments le réalisent. Le plus grand pour le porte plume et les crayons; les deux autres plus petits pour ranger les plumes Sergent Major, gomme et autres petits accessoires utiles à l'apprentissage du jeune écolier.
                                                                          Dès mon entrée en salle de classe, installé à mon pupitre, je posais fièrement avec délicatesse et un respect de roi, mon plumier en haut de ma table, proche de l'encrier de porcelaine blanche rempli de cette encre violette à l'odeur si tenace.
                                                                          Là, dans cette classe aux grandes baies vitrées où le regard pouvait s'évader vers la montagne, commença mon apprentissage et la découverte des premières lettres que l'on trace maladroitement sur la page où des taches d'encre viennent se déposer grossièrement, victime de notre maladresse. Découverte des lettres, des chiffres, puis des mots posés sur la feuille en une écriture mal assurée. Ecriture gauche, tremblante d'une main découvrant ce monde qu'enfant on croit barbare.
                                                                         Puis arrivent les groupes de mots, les phrases, sensation d'une nouvelle et merveilleuse exploration. Les mots parlés, prononcés, prennent forme, se dessinent sur la feuille blanche. Prodigieuse création vers une autre communication par l'aventure des paroles écrites, se liant, se mariant, s'enchantant entre elles pour de formidables aventures poétique, romanesque. Savoir lire, joie de l'évasion. Un échange formidable vient de nous unir avec le reste du monde. Nous ne pouvons plus être seuls.
                                                                          Toi ma mémoire, tu sais me rendre possible toute cette histoire. Sans toi le vide serait trop grand car je ne pourrais unir chaque phrase pour te réveiller vers des instants ivres de ma soif d'oublier le néant.
                                                                           Au fil du temps notre mémoire aime s'enrichir. Sans elle, rien ne pourrait venir refleurir dans ce présent. Présent parfois si vide qu'il faut appeler les richesses du passé pour réaliser la beauté d'un avenir.
                                                                           Demain, je ne voudrais, naïf que je suis, souhaiter qu'un monde rempli de joie. A présent souhaiter que toutes nos larmes de douleurs deviennent des larmes de lumière heureuse. Je voudrais qu'elles illuminent par cette richesse d'amour, notre horizon, notre présent, notre futur.
                                                                           Enfin, tenir le bonheur dans ses bras, le serrer si fort, jusqu'à la douleur d'aimer. Il faut savoir accepter dans le mystère de cette si douce et si cruelle caresse, le courage et la volonté d'un regard, nu et vierge de toute noirceur. Dans un cri d'extase et d'amour rempli de beauté, exploser dans la lumière  de tous les yeux chargés de passion et vivre enfin sans une larme, si ce n'est celle de l'ivresse d'un bonheur accepté.

                                                                                                                                           JP D'ILLIBERIS

[M. de Saint-Michel]

Comme il est bon, parfois, de revenir au "pays lointain" que garde précieusement notre mémoire!

[Laurence HERAULT]

Les souvenirs d'enfance, joyeux ou tristes mais toujours nostalgiques... L'odorat, et le goût, y jouent souvent un rôle déterminant, et les sentiments y sont exacerbés.

 

C'est étonnant de constater combien une simple petite odeur peut nous ramener des années en arrière, dans des lieux, et des moments, que notre être conscient pensait avoir oubliés !

Des années où chaque détail comptait, où l'on était sans doute en éveil, à l'écoute de tous nos sens... Avant de se faire grignoter par la monotonie des jours et les soucis du quotidien...

 

Merci pour ces émouvants souvenirs qui nous replongent aussi dans la genèse de notre vie.

[RUDELLE Jean-Pierre]

[quote name="Laurence HERAULT" post="349936" timestamp="1532263134"]
Les souvenirs d'enfance, joyeux ou tristes mais toujours nostalgiques... L'odorat, et le goût, y jouent souvent un rôle déterminant, et les sentiments y sont exacerbés.
 
C'est étonnant de constater combien une simple petite odeur peut nous ramener des années en arrière, dans des lieux, et des moments, que notre être conscient pensait avoir oubliés !
Des années où chaque détail comptait, où l'on était sans doute en éveil, à l'écoute de tous nos sens... Avant de se faire grignoter par la monotonie des jours et les soucis du quotidien...
 
Merci pour ces émouvants souvenirs qui nous replongent aussi dans la genèse de notre vie.[/quote]

Merci à vous, vos commentaires comme vos textes me touchent. L'apprentissage de l'écriture est également un moment merveilleux puisqu'i nous ouvre les portes pour exprimer et communiquer entre-nous nos émotions, nos sentiments, notre recherche vers le beau. Sans l'écrit que serions nous ?

Comme il est bon, parfois, de revenir au "pays lointain" que garde précieusement notre mémoire!

Pays lointain dans la mémoire, pas si loin que l'on peut le penser. Il suffit de si peu de chose pour le faire remonter vers nous. Merci pour vos commentaires toujours appréciés.

Comme il est bon, parfois, de revenir au "pays lointain" que garde précieusement notre mémoire![/qu[quote name="M. de Saint-Michel" post="349929" timestamp="1532257996"]Comme il est bon, parfois, de revenir au "pays lointain" que garde précieusement notre mémoire!

Merci pour vos commentaires toujours appréciés. La mémoire pays pas si lointain que cela, il suffit de si peu d'émoi pour réveiller un monde rempli de mille et mille évènements heureux ou pas.