Le vieux livre
Le vieux livre rangé sur sa tranche de vie
Se repose là haut sur l’étagère de chêne
Sa fine pelure montre un dos usé en peine
Depuis des ans au secret, chacun l’oublie
Il fut le temps jadis ; de lueurs assombries
Du jour effacé quand la lampe à pétrole
L’accompagnait dans les soirs qu’on assole
Parcouru savamment par des yeux attendris
Les feuilles jaunies nous racontaient l’histoire
De ces aînés fiers, mais fidèlement ambitieux
Pour l’héritage laissé à ces enfants soucieux:
Du sentiment d’antan pour ces êtres de gloire
Expérience reconnue de cent ans de science
Que lui jalouse sage, le nouveau conteur lorrain
Il se reprend les scènes de jadis; O grand devin!
Sans lesquelles le jeunot n’aurait d’existence
En ses mirifiques années! Combien de doigts?
Ont chiffonné sages ses pages fines écornées
Qui ont tracé pour celui-ci les records réalisés
Et de l’autre, exalté qui a quêté l’héroïque exploit
Les bougies, la lampe à pétrole ont alors disparu
Dans l’ombre morte des moisis murs endeuillés
Et notre contemporain s’allume à la lumière gaie :
Celle des nouveaux lux qui vous lisent la revue
Là un chérubin impatient tend sa soyeuse main
Jeune, intelligent la fleur de mon cuir il respire
Scrutent noble mes lettrines d’or à son bon désir
Et lit mes strophes passionné jusqu’au petit matin
Puis un jour d’hiver couvert frileux du grand froid
A perlé silencieux le regard de mon dernier mot
O mon maître! Tu m’abandonnais seul de si tôt
Tu t’éteignais, jeunesse érodée, tout comme moi.
ƒC