Viens mon ange, viens
Abandonne cette répugnance
Cette moue face à la Création
Ce dégoût de l’Oeuvre
Cesse d'avaler ces couleuvres
Prend-moi sous ton aile
Oublions cette odeur infernale
Ce goudron qui nous étouffe
Et ce goût d'acier
Qui se mêle à notre salive
Quittons la ville, mon ange
Et son vacarme de bétonnières
Ces klaxons qui aboient
Et ces grincements de vies anxieuses
Laissons ces chats de ruelles
À leurs feulements cruelles
Et ces engoulevents
À leurs tournoiements
Perpétuels
Partons à la campagne
Le veux-tu?
Allons écouter
Le ciel sur la terre
Et ses mélodies estivales
Écoute-les, mon ange
Et revois l'ordalie
Écoute
Ces grillons qui crissent
Ces hirondelles qui gazouillent
Ces grives qui babillent
Ces cailles qui carcaillent
Et ces cigales qui content
Sur le toit des étés
Les jours d'enchantement
N'est-ce pas divin?
Bien sûr, mon ange
Nous savons
Que viendra la nuit
Et que nous tremblerons d'effroi
Aux hurleries des uns
Et aux grognements des autres
Mais au point du jour
Je te le jure
Pour te consoler
Nous irons entendre
Le coq coqueliner
Et nous irons à la ferme
Ouïr au poulailler
La poule qui caquette
Et qui crételle
Pour ses poussins
Qui piaulent et pépient
Près de la porcherie
Où les cochons couinent
Et ronchonnent dans la soue
Alors que dans le pré
Le pré magnifique
Les vaches mugissent
Et les moutons bêlent
Aux vents infinis
Viens, mon ange, viens
Viens voir et entendre
Cette terre qui existe encore