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FARABAL

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Hors-ligne Dernière activité : juin 02 2022 09:17

#379042 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 22 juin 2020 - 10:36

" Eloge confiné ", à la manière de Saint-John Perse

 

          Calmes…

 

           j’aime le port altier de ma fille au balcon de colonnades blanches

 

          les calmes s’élèvent sur les frondaisons de l’arbre à pain et au delà

vers la mer, dans l’ombre c’est le noir de l’âme des pirogues gorgées d’eau,

ils brancardent les morts, les pas sont fiévreux et lents, et lents

 

          (nous étions confinés, eux, elle, nous. Seuls les chats chassaient les

rats dans les champs de canne désertés des négresses.)

 

          la poussière pourpre recouvre le vert des manguiers, la poussière

assèche la pluie, assèche la foi des hommes tournant leur regard en dedans

et leurs pas immobiles et la poussière lave…

 

          le gouverneur, seul, les blanchisseuses, et nos filles comme des joyaux

chamarrés dans l’écrin des cases et leurs robes

 

          (et les chevaux immobiles)

 

          Calmes... puis les regards altiers par dessus les masques et les pas se

croisent à distance et arpentent la mort dans le champ rond des oraisons

 

          au loin les coraux figés figent les vagues

 

          je parle depuis le silence

                    et la tête des chevaux.




#378923 Brèves donnant parfois des nouvelles

Posté par FARABAL - 19 juin 2020 - 11:57

ça a de la gueule, certains vers sont très beaux, il y a du rythme et du contraste, des associations de mots qui font mouche... et même du sens : j'aime bien !




#378920 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 19 juin 2020 - 11:03

C'est vrai que la gamine à la fin elle a dit : " mais en fait, ils sont vraiment morts les parents ou pas vraiment ? "

Il a fallu que je lui explique que non, on était tous devenus des oiseaux !

 

"Fantaisie" est le mot adéquat, merci :)

 

Bien à vous,

Erik




#378889 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 18 juin 2020 - 10:40

" L'oiseau confiné ", à la manière de Jacques Prévert

 

                                        (pour ma plus jeune fille...)

 

Ils ont confiné l’oiseau

Et l’oiseau ne chantait plus,

Ils ont confiné l’enfant

Et l’enfant ne chantait plus.

 

Et voici le père qui travaille

La mère qui fait la cuisine

L’oiseau s’ennuie, l’enfant baille,

Tout le monde fait grise mine…

 

Mais voilà qu’un nuage passe

Il prend l’oiseau sur son dos

Qui prend l’enfant dans ses ailes

Tous trois s’envolent vers le ciel

 

De tout là-haut on devine

La maison près de l’école

Qui s’étiole et décline

Au milieu de l’herbe folle

 

Mais le père se met en colère

Et la mère avec le père :

« – Où sont-ils donc passés ? »

« – Mais que font-ils donc ? »

 

Alors l’oiseau s’affole

      L’enfant trébuche

            Le nuage pleut.

 

                  Il pleut de l’eau de larmes,

 

Et la mer peu à peu monte

      La mer emporte le père

            La mer emporte la mère

                  La maison, la rue, l’école...

 

                               Et tout se met à flotter

                                                                                 Perdu entre ciel et mer

Et l’oiseau se met à chanter

                                                            Dans la lumière de l’arc-en-ciel




#378759 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 15 juin 2020 - 09:50

A Laurence : ce n'est pas du tout une digression, au contraire, merci d'avoir vu cette référence à Devos !




#378608 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 13 juin 2020 - 08:08

" Lou confinée ", hommage à Guillaume Apollinaire

 

Je t’adore mon Lou, confinée aux Ardennes

Nous, nous sommes dans nos cases-trous

A Nîmes - parqués aux arènes

Sur l’échiquier je suis le cheval-fou

 

Chaque mètre qui nous sépare

Fait mille fois le tour de la Terre

Mais je les franchirai dare-dare

En brandissant mon cimeterre

 

Lou, je saccagerai l’éternité.

Je trancherai le fil de chaque étoile

Pour le renouer à l’extrémité

De chacun de tes cheveux

 

Tu prendras l’essor de la comète

Et j’enfourcherai ta croupe folle

Nous sillonnerons le ciel - d’une traite

J’en darderai de mes rayons la corolle

 

La voie lactée rejaillira de ton sein

Qui ensemencera le ciel enfin lavé

Ce nouvel univers sera le tien

Et je sais que je serai sauvé

 

La sale guerre c’est eux

Ma seule guerre c’est toi

Confiné dans le soir

             noir

                     j’ai froid

 

Adorée Lou, je m’enroule

Dans tes cheveux.




#378538 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 11 juin 2020 - 09:31

" Un confiné au nez finaud ", d'après Robert Desnos

 

Un confiné au nez finaud

Qui s’en est allé,

Qui s’en est allé,

 

Peu avant qu’on lui dise « no ! »

Qu’il était malin,

Qu’il était malin,

 

Il s’en alla par le train

De huit heure vingt-sept,

De huit heure vingt-sept,

 

Bientôt arrivé à Sète

Mais que faites-vous là ?

Mais que faites-vous là ?

 

Et pourquoi « no ! » ?

 




#378537 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 11 juin 2020 - 09:20

Merci Patricia !

Effectivement, avec Baudelaire, j'ai du prendre pas mal de temps pour affiner les choses... C'est intéressant d'essayer d'imiter les anciens, toute proportion gardée : on se rend compte de la richesse et de la complexité de leur talent - sauf que eux, en plus, ils l'ont inventé !

Bien à vous,

Erik




#378428 Les oiseaux qui s'en vont

Posté par FARABAL - 09 juin 2020 - 10:21

Plutôt "Au dessus des nues", non ?

Amicalement :)




#378425 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 09 juin 2020 - 09:41

Oui, je l'ai retrouvé dans une malle de mon grenier en faisant du rangement tellement je n'avais plus rien à faire ! :)




#378270 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 06 juin 2020 - 06:26

" Spleen du confiné ", hommage à Charles Baudelaire

 

Quand de longues nuées d’invisibles miasmes

S’étalent sur les villes aux méandres profonds,

Laissant dans leur sillage un horrible marasme

Ronger le cœur des hommes reclus dans leurs bas-fonds ;

 

Quand sur la terre entière les peuples confinés

De morceaux de tissus font de vains boucliers

Et que leurs rois maudits les ont abandonnés

Egrenant les grains de morbides sabliers ;

 

Le poète qui naguère voguait auprès des dieux

Soudain se voit sommé de répondre pour eux

Tel un antique augure que le destin rappelle.

 

Et comme la chouette au linteau de l’étable,

Il chuinte dans le noir pour conjurer le diable,

Seul, écartelé, un clou planté dans chaque aile.




#378189 Quelques bribes du temps qui passe...

Posté par FARABAL - 04 juin 2020 - 10:31

J'aime vraiment beaucoup : "Dans le marbre des mots je sculpte l'éphémère."

Bravo :)




#378131 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 03 juin 2020 - 11:49

" Ballade du confiné ", à la manière de François Villon

 

Oncques vit n’en pareil dépit

De par lèpre ni par peste

Male mort s’épancher ainsi

En semailles portées par vent d’est

 

Lors puissants rois dedans leurs forts

Confinoient par mille et par cent

Multe gens et bien plus encor

Puissants rois, au parler très franc

 

Tant que nul ni n’en quel pays

Ni seigneur ni simple marchand

Ni non plus la belle Anaïs

Roi ni reine, prince ni brigand

 

Nul ne soit d’aucun mouvement

Agréé s'en aller marcher

Ni tenté comme feuille au vent

S’en venir par rues folâtrer

 

Me voyez confiné ici

Tel merlot bien seul en son nid

Par tout temps sans frère ni ami

Point non plus de quelconque mie

 

Priez Dieu pour le grand Ulysse

Espinglé tout seul en son port

Et pour noble Dame Thaïs

Moi manant déjà serai mort

 

Mais que Christ en sa sainteté

Me gracie de quelque péché

Confiné déjà l’ai été

Point mérite d’être retranché.




#377939 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 31 mai 2020 - 10:03

" Confiné ", d'après Arthur Rimbaud

 

Je n’ai plus où aller.

Quoi ? Là confiné !

Alarme, c’est l’hallali

J’ai une faim de damné.

 

Des anciens remèdes

Sevré des imbus

Toussant, criant à l’aide

J’écluse mon dû.

 

Ô Elle ! Ai-je rêvé ?

Morbide prêtresse

As-tu bien lavé

Mon étoile de sang ?

 

Des cigales criardes

Le raffut s’est tu

Et je m’encanarde

D’un joli tutu.

 

C’est le mois de mai

Fais ce qu’il te plaît !

Aux murs des palais

Dieu que tu es laid !

 

Je n’ai plus où aller.

Quoi ? Là confiné !

Alarme, c’est l’hallali

J’ai une faim – de damné.




#377937 Poètes confinés

Posté par FARABAL - 31 mai 2020 - 09:39

Je vois que chacun à ses idées sur les majuscules ! Je crois que Nerval les distribuait un peu au hasard - sauf bien sûr le respect qu'on lui doit...